Les organismes affiliés au Conseil National de la Résistance

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A- Les organismes sociaux haut ▲

Parce que la répression allemande et vichyste n'a cessé de s'amplifier, il est apparu indispensable aux forces de la Résistance intérieure de mettre sur pied un système d'entraide social solidaire. Le contexte est à la clandestinité, qui aura poussé le sens de la solidarité entre camarades d'un même mouvement ou réseau de Résistance à son paroxysme.

Dès la fin de l'année 1941, le mouvement de zone Sud Combat avait été le premier à constituer un service social. Berty Albrecht, qui l'avait créé, cherchait à venir en aide aux familles des membres du mouvement arrêtés par les Allemands ou la police de Vichy. Le service social de Combat, dirigé par Yvette Baumann, aidée d'assistantes sociales régionales et départementales, se chargeait ainsi d'envoyer des colis aux prisonniers politiques, à distribuer des subsides à leurs familles et à faire toutes les démarches pour améliorer leur situation.
Avec l'avènement des Mouvements Unis de Résistance (MUR), le service social de Combat est mis à la disposition des autres mouvements membres de zone Sud, où il va croître.

A Lyon, le Révérend Père Chaillet avait lui aussi fondé une organisation de sauvetage d'enfants juifs promis à la déportation, l'Amitié chrétienne, dont le champ d'action sera ensuite étendu aux autres victimes de la répression ainsi qu'à la zone Nord.

En zone Nord, les mouvements OCM - sous la direction de Marie-Hélène Postel-Vinay, épouse Lefaucheux -, Libération-Nord, CDLR et Défense de la France ont chacun un service analogue.

Bien des résistants des zones Nord et Sud, animés d'un devoir de secours guidé par un esprit de solidarité et de justice, cherchent à combler les carences de la Croix-Rouge française et du Secours national, restés sous l'emprise du gouvernement de Vichy. C'est ainsi qu'au printemps 1943 va poindre la nécessité d'une coordination des services sociaux, directement rattachés aux services généraux de la Résistance.

Avec l'accord du commissaire à l'Intérieur André Philip, la Délégation générale et le CGE oeuvrent à cette tâche, avant d'être retardés par l'arrestation de Jean Moulin. Ce comité de coordination, qui prendra le nom de COSOR, verra le jour en février 1944 grâce à la tenacité de Jacques Bingen. Sa présidence est confiée au RP Chaillet, dont "l'autorité morale n'est pas discutable".

Auteur(s) : Paulina Brault

Le Comité financier (COFI) haut ▲

Outre la nécessité d’assurer la vie matérielle des organisations clandestines (organismes centraux dont le personnel permanent ne cesse d’augmenter ; groupes francs et maquis qu’il faut ravitailler ; services sociaux d’aide aux familles des combattants ou déportés, etc.), le financement de la Résistance se pose aussi bien en termes d’efficacité que de durabilité. Il faut rappeler que l’insuffisance du financement a été l’une des causes principales de conflit entre Jean Moulin et les chefs de mouvements de Résistance.

A la suite de l’arrestation de Moulin, la distribution des subsides est restée l’apanage de la Délégation générale, lui faisant courir un risque supplémentaire.

Du côté d’Alger, les réserves en billets métropolitains s’épuisent jour après jour, donnant jour à une véritable crise de trésorerie. A la fin de l’année 1943, une réorganisation s’impose, qui sous-entend la création d’un comité dédié.

Tandis que le placement en France de bons du Trésor reçoit l’entière approbation du Commissariat aux Finances d’Alger, il s'agit de gagner la confiance des bailleurs de fonds éventuels, et pour cela, de faire appel à des personnalités capables de la susciter.

En février 1944, après en avoir longtemps discuté avec Chaban-Delmas et Bloch-Laîné, Jacques Bingen, alors délégué intérimaire, décida avec l'approbation de Georges Bidault de créer un Comité financier, appelé plus couramment COFI. Outre que le financement des permanents de la Résistance est une nécessité absolue, il s'agit également de financer les mouvements, tout en apportant des gages de confiance aux différents bailleurs de fonds.

André Debray ("Bossuet") en fut le premier président. Directeur de la Banque de Paris et des Pays-Bas, il fournissait de ce poste d'observation de premier ordre, des renseignements très importants sur la situation économique, les travaux effectués en France par les Allemands, les affaires passées sous leur contrôle, etc. A ses côtés siègent au COFI : René Courtin, représentant le Comité Général d'Etudes (CGE) et Jacques Chaban-Delmas, délégué militaire national, Bloch-Laîné ("Balli"), représentant le Délégué général, chargé, après Chaban-Delmas, des questions financières, Michel Debré, autre membre du CGE, Félix Gaillard, inspecteur des Finances, M. Nicole ("Laplace), professeur au Collège de France et délégué de l'Union des Cadres et Industriels français (UCIF), Jacques Meynot et Lorrain Cruse, adjoints au délégué militaire national. Jacques Soulas, chargé de mission, venu d'Alger et mis à la disposition de la délégation, en assurait le secrétariat. Le Comité se réunissait chaque semaine et disposait de tout un réseau de correspondants et de démarcheurs dont l'un des plus actifs était le champion de tennis Marcel Bernard. Les débuts sont "décevants", selon l'aveu de François Bloch-Laîné lui-même. Les grandes institutions de la place, censées jouer le jeu, se drapent dans leur vertu : " Seuls les margoulins disposent de caisses noires permettant de souscrire à des emprunts clandestins sans laisser de traces en comptabilité, sans mettre des employés, dont la discrétion n'est pas certaine, dans le secret ", répondent-elles au COFI. Dans l'impasse, les résistants sont obligés de se retourner vers les petits courtiers ou les particuliers. Avec le risque, réel, de permettre à des collaborateurs économiques ou politiques, à des commerçants peu scrupuleux d'acquérir des brevets de résistance, de se refaire une virginité politique ou de "blanchir" des fortunes acquises au marché noir.

Le premier moyen de financement utilisé par le COFI consistait en chèques et virements sur la banque d’Algérie. Puis, début mai 1944, le lancement de bons du Trésor est adopté : bien que ces bons fussent pourvus d’une authenticité supérieure aux titres émis en France, leur détention faisait courir aux porteurs de grands dangers. Le COFI décida alors de se faire envoyer par Alger des chèques analogues, mais certifiés par la Banque d’Algérie elle-même.

Par ailleurs et même s'il refuse, à plusieurs reprises, des offres importantes en raison de l'identité du prêteur, le COFI accepte l'argent qui, à ses yeux, n'est pas synonyme d'amnistie automatique. Il faut sans cesse rassurer les épargnants. Certains exigent un message radio. Fin mars 1944, un souscripteur important demande, avant tout accord, que la BBC passe le message suivant : "Les deux poires pour la soif sont arrivées", à passer à 19 h 30, trois jours de suite.

Source(s) :

D'après René Hostache, Le Conseil National de la Résistance, les institutions de la clandestinité, PUF, 1958 et Jean-Marc Binot et Bernard Boyer, L'argent de la Résistance, Larousse, 2010.     

 

D. Organe militaire : le COMAC haut ▲

Le COMAC (d'abord COMIDAC), Le 1er février 1944, le Comité central des mouvements de Résistance créé une commission d'action (COMIDAC) pour diriger les Forces Françaises de l'Intérieur (FFI) nouvellement constituées, en les plaçant sous le contrôle des mouvements de Résistance (l'incorporation des FFI). Le 13 mai 1944, le CNR décide que la Comidac relève désormais de son autorité, sous le nom de Comité d'action militaire (Comac), qui devient l'"organisme de direction et de commandement des FFI". Le Comac est notamment composé des trois "V" :  Pierre "Villon", "Valrimont" (Maurice Kriegel), tous deux communistes et "Vaillant" (Jean de Vogüé).

A COMPLETER /REMANIER AVEC :

 

Le COMAC, ou Comité militaire d'action, a d'abord été créé en février 1944, sous le nom de COMIDAC, par le Comité central des mouvements de résistance. Le CCMR réunissait, en dehors du CNR, les huit mouvements qui y étaient représentés. La création du COMIDAC répondait à la volonté d'organiser et de diriger l'action de toute la Résistance, l'action immédiate comme l'action au jour J. Cet organe de commandement comprenait trois membres, un délégué des mouvements de chaque zone et un délégué du Front national. Pouvaient participer aux réunions un représentant de l'AI, un de l'état-major FFI qui s'était constitué en décembre, et enfin les délégués civil et militaire du CFLN.  C'est le COMIDAC qui a nommé chef d'état-major des FFI le colonel Dejussieu-Pontcarral, et qui, conformément à sa logique de fusion des troupes résistantes, a décidé de s'adjoindre le chef de l'ORA, le général Revers, comme conseiller technique. 

Mais, coupé du CNR, cet organe de commandement manquait de la légitimité politique que le Conseil avait acquise en raison même des caractéristiques qui avaient suscité la critique initiale des mouvements : sa liaison avec le CFLN et sa composition ouverte aux partis politiques. En mai 1944, le COMIDAC décida de se rattacher au CNR. Par une décision du Conseil du 13 mai, il devint le COMAC (pour éviter la confusion avec le COMIDAC d'Alger, comité interministériel du CFLN). Ses trois membres étaient Villon, rapporteur du COMAC auprès du CNR, Vogüé, l'un des dirigeants de CDLR, représentant la zone Nord, et Kriegel-Valrimont pour le MLN, essentiellement constitué en zone sud. Commission militaire du CNR, le COMAC reçut en même temps le titre "d'organe suprême de commandement des FFI". 

Dès sa formation, le COMAC fut l'objet de deux sortes de critiques. La première tint à sa composition. Deux membres sur trois étaient en effet communistes (Villon) ou proche du PC (Kriegel-Valrimont), proportion qui n'était pas représentative de la répartition des forces armées de la Résistance. En outre, le troisième membre, Jean de Vogüé, quoique industriel et homme de droite, se trouvait en parfait accord avec les précédents. Comme eux, il était partisan "d'éviter la main-mise exclusive du commandement allié sur les FFI", de "faire triompher l'insurrection nationale", de "prouver ainsi que la Résistance française a été capable de concevoir et de réaliser avec l'appui de tout le peuple français entraîné par les appels du CNR, la libération intégrale de la plus grande partie du territoire". Aristocrate d'origine, il ne craignait pas de se référer à 1793. Cette convergence des cultures insurrectionnelles assurait la cohésion du COMAC, mais suscitait aussi les critiques des membres du CNR, du Parti socialiste comme des autres mouvements de zone nord, qui craignaient les représailles sur la population civile et souhaitaient que l'insurrection ne soit pas déclenchée sans coordination préalable avec les Alliés.
En outre, la création du COMAC instituait, sur le papier du moins, une dualité du commandement. Le 4 avril précédent, par décret du CFLN, le général Koenig avait été nommé commandant en chef des FFI, en même temps que commandant des forces françaises stationnées en Grande-Bretagne. Acceptée par les délégués civil et militaire du CFLN tant que le débarquement n'avait pas eu lieu, la dualité formelle suscita une crise à partir du 6 juin. Menée entre le DMN et le COMAC, la négociation déboucha sur un compromis entériné au CNR le 17 août 1944. Le COMAC accepta d'agir "par délégation du général Koenig" et de faire exécuter ses ordres "par priorité". En contrepartie, les DMR devenaient de simples officiers de liaison au service des FFI. En cas de désaccord grave entre le COMAC et le DMN, l'arbitrage reviendrait au CNR. C'est ce qui allait se produire trois jours après la conclusion de l'accord, au moment de la trêve.
Le rôle du COMAC dans la libération de la France est difficile à mesurer. Ne disposant pas de moyens de communication, il a certainement plus influé sur le moral des FFI et sur leur ardeur au combat que sur le déroulement concret des opérations. A l'échelle de Paris, cependant, son rôle pratique est certain. Sa résistance à la trêve a reposé sur une expérience de terrain : Villon s'était placé auprès de Malleret-Joinville, le chef de l'EM-FFI, Kriegel-Valrimont auprès de Rol-Tanguy, commandant FFI pour la Région parisienne, et Vogüé auprès du colonel Lizé qui commandait les FFI de la Seine. La participation directe du COMAC aux combats parisiens a également permis à Kriegel-Valrimont d'obtenir du général Leclerc que Rol-Tanguy co-signe l'acte de reddition du général Von Choltitz, le 25 août 1944. Là, le symbole rejoignit la réalité.
Convaincu de "représenter la nation dans le cadre de la légalité nouvelle, née de la Résistance et de l'insurrection nationale", le COMAC tenta de poursuivre son action au-delà de la libération de Paris. Il s'opposa à la décision du général de Gaulle, prise dès le 28 août, de dissoudre les états-majors FFI et d'en verser les forces dans l'armée régulière. Par l'accord conclu le 12 septembre avec le GPRF, il obtint la création d'une direction FFI au sein du ministère de la Guerre, et d'être constitué en un Comité auprès du ministre "chargé avec lui" des décisions relatives aux FFI et à l'armée en général. Croisant le fer à plusieurs reprises avec le ministre, le COMAC finit par disparaître en janvier 1945 lorsque le Comité central du PCF appela au "retour à l'ordre républicain" et que le GPRF supprima la direction FFI du ministère de la Guerre.

 

 

Source(s) :

Claire Andrieu, "Le COMAC", in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.