L’Union de Juifs pour la Résistance et l'Entraide (UJRE)

Légende :

Tract réalisé par l'UJRE intitulé "L'Union des Juifs pour la Résistance et l'Entraide. Son action et ses buts". Ce tract n'est pas daté mais semble avoir été réalisé en janvier 1944 puis réédité en avril et août 1944. 

Type : Tract

Source : © Mémorial de la Shoah, CMXXV-8 Droits réservés

Détails techniques :

Tract dactylographié de 4 pages

Date document : sans date [janvier 1944]

Lieu : France

Ajouter au bloc-notes

Analyse média

Après avoir dressé un bilan de la situation et de l'attitude des Juifs en France face au danger, l'UJRE dresse un état des lieux de la résistance des Juifs impliqués dans les différentes organisations. Elle expose enfin les raisons pour lesquelles les JUifs doivent rester unis et annonce le programme de l'UJRE dans cet objectif. : entraide, résistance, représentation des Juifs, cahiers de revendications.


Contexte historique

En avril 1943, la direction nationale de la section juive de la MOI, réunie à Paris, décide de créer une nouvelle organisation, l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE), avec pour objectif le regroupement de toutes les organisations juives illégales dont Solidarité, l’Union des femmes juives ou encore le Secours populaire en zone sud. La nouvelle formation doit regrouper tous les Juifs et pas seulement les Juifs immigrés et adopte pour cela le français et non plus le yiddish comme langue usuelle dans ses tracts, brochures et journaux (Droit et Liberté). Une seconde organisation voit le jour quelques temps après mais cette fois-ci destinée aux jeunes Juifs : l’Union de la Jeunesse juive (UJJ).

La formation de l’UJRE est à mettre en relation avec l’institution du Conseil national de la Résistance. Dans son ouvrage, La Résistance organisée des juifs de France (1940-1944), Jacques Ravine écrit à ce sujet : "L’unification de toutes les organisations de la résistance française et l’institution du CNR obligèrent les militants juifs à hâter l’union de toutes les formations de résistance juives et à créer un corps représentatif habilité à exposer au CNR les problèmes et les aspirations de la population juive". A l’instar du programme du CNR, l’UJRE élabore en avril 1944 un document qui définit son action et ses buts : "Si la persécution ne fait pas de distinction entre eux, la lutte commune entre tous les Juifs s’impose. Ils rejoindront les soldats juifs des armées alliées, américaines, anglaises, soviétiques, et les partisans de l’Europe occupée. L’UJRE œuvrera à la création d’une représentation unique des Juifs de France, englobant les représentants de tous les groupements juifs de résistance. Cet organisme représentera les Juifs auprès du CNR jusqu’à la victoire, auprès du GPRF après la victoire, ainsi qu’auprès de nos instances juives internationales qui pourraient être créées".

A l'automne 1943, l’UJRE met en place ses propres groupes de combat, l’UJJ disposant également des siens pour les jeunes. Le premier groupe de combat voit le jour à Lyon autour de Julien Winny et Albert Goldman puis se mettent progressivement en place ceux de Toulouse, Marseille ou Grenoble. Un rapport de janvier 1944 signale que les groupes de combat de Grenoble et de Toulouse sont en formation. Un comité militaire des groupes de combat est mis en place dont le commandement est confié à Charles Lederman qui a dorénavant sous son autorité toutes les unités de l’UJRE en zone Sud.

La différence essentielle entre les groupes de combat de l’UJRE et les FTP-MOI réside dans le fait que les membres de l’UJRE ne changent pas leurs habitudes de vie et s’instruisent militairement dans l’objectif du combat final alors que le ralliement aux FTP-MOI implique l’interruption de l’activité professionnelle, l’abandon de la vie familiale et la mobilisation quotidienne pour les opérations à mener. Cependant, une coopération active est mise en place entre les deux structures, l’UJRE fournissant aux FTP-MOI de nombreux combattants et les FTP-MOI contribuant à l’instruction militaire des membres de l’UJRE. C’est ainsi qu’à Lyon, à titre d’exemple, le groupe de combat de l’UJRE opère en collaboration avec le bataillon Carmagnole et c’est lorsque Carmagnole délègue Jacques Tancerman auprès du groupe de l’UJRE que celui-ci se consolide grâce à son expérience antérieure. 

L’essentielle des actions menées par les groupes de combat de l’UJRE se fait au détriment des institutions officielles tels que l’UGIF ou le commissariat général aux questions juives, ou à l’encontre des dénonciateurs de Juifs. A Marseille, une quinzaine de groupes de combat fonctionne sous la direction d’Albert Lévine et Nat Taich notamment, tandis qu’à Grenoble ils sont commandés par Maurice Igla, Charles Wolmarck et Maurice Bursztyn.

En février 1944, l’UJRE organise à Paris une milice patriotique juive qui groupe jusqu’à 200 membres. Dans son numéro de juin 1944, le journal clandestin Droit et Liberté annonce fièrement l’admission des groupes de combat de l’UJRE de Lyon au sein des Forces françaises de l’intérieur. A Lyon, Paris, Marseille, Nice, Toulouse ou encore Limoges, les groupes de combat de l’UJRE, parfois autonomes, parfois intégrés dans des détachements FTP-MOI ou FFI contribuent activement aux combats de la Libération. L’UJRE appelle également les Juifs de France à s’engager dans l’armée française reconstituée pour contribuer à la défaite de l’Allemagne nazie.

Après la Libération, L’UJRE prend en charge l’éducation des enfants de déportés et de fusillés, dans le cadre de sa Commission Centrale de l’Enfance, CCE, et reprend la publication de la Naïe Presse, le plus important quotidien yiddish d’Europe. Aujourd’hui, l’UJRE porte la mémoire du génocide et de la résistance des juifs (création de Mémoire des Résistants juifs de la MOI, MRJ- MOI). Elle édite la Presse Nouvelle Magazine, mensuel d’information qui aborde de manière critique les problèmes politiques, sociaux et culturels, nationaux et internationaux.


Auteur : Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 19P 69/21 (GF UJRE Lyon) et GR 18P 160 (UJRE)
Claude Collin, Jeune Combat. Les jeunes juifs de la MOI dans la Résistance, PUG, 1998.
David Diamant, Les Juifs dans la Résistance française 1940-1944 (avec armes ou sans armes), Paris, Roger Maria Editeur, 1971.
Jacques Ravine, La Résistance organisée des juifs en France 1940-1944, Paris, Julliard, 1973.
Renée Poznanski, "L’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide" in Dictionnaire historique de la Résistance, Paris, Robert Laffont, 2006.

Simon Cukier, "La participation de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’entraide (UJRE) à l’assaut final contre l’occupation", colloque "La libération de la France", octobre 1984.