Remise de la croix de la Libération à Rol-Tanguy

Légende :

Henri Rol-Tanguy se faisant décorer de la Croix de la Libération par le général de Gaulle, le 18 juin 1945

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Musée de l’Ordre de la Libération Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc.

Date document : 18 juin 1945

Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris

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Contexte historique

Georges René Henri Tanguy est né à Morlaix (Finistère) le 12 juin 1908. Sa mère est blanchisseuse, son père putatif officier marinier. Il obtient le certificat d'études à Brest en 1921. Il est à Paris avec sa mère en 1923 et devient ouvrier métallurgiste. Adhérant à la CGTU, à la JC, puis au PC, il est surtout attiré par le cyclisme et il tient à acquérir une haute qualification professionnelle. La montée du fascisme le fait s'investir dans le combat politique, et surtout au Syndicat des métaux CGT de la Région parisienne dont il est permanent en octobre 1936 puis fin 1938. Entre temps, engagé en février 1937 dans les Brigades internationales, il participe en 1938 à la bataille de l'Ebre comme commissaire politique de la 14e – expérience  capitale au cours de laquelle il acquiert une réelle compétence militaire.


En 1939, il voit dans le Pacte germano-soviétique un aléa de la politique de l'URSS qui ne change rien à la nécessité de lutter contre le fascisme. Incorporé à Brest, puis muté en Lorraine, démobilisé dans la Creuse en août 1940, il reprend contact dès le 19 à Paris avec ses camarades syndicalistes grâce à Cécile Le Bihan, sa femme, ex-secrétaire au Syndicat des métaux, qu'il a épousée le 15 avril 1939 et qui assure pendant toute la Résistance son secrétariat et nombre de ses liaisons. Henri Tanguy devient l'un des responsables des comités populaires de la métallurgie et se consacre à leur mise en place dans la Région parisienne. Il passe dans la clandestinité le 5 octobre 1940, jour de l'arrestation d'Henri Gautier, trésorier du Syndicat des métaux, qu'il apprend immédiatement par Cécile. Il y reste jusqu'à la Libération. En mars 1941, dans le cadre de la restructuration du Parti communiste commencée à l'automne 1940, il est désigné par Jean Laffitte responsable politique du triangle de direction de la région P2 qui englobe l'Île de la Cité, l'Île Saint-Louis et Paris Rive droite à l'exception des VIIIe et XVIe arrondissements. Alors que le PC se prépare à la lutte armée, Danielle Casanova lui demande en juillet 1941 de s'y consacrer. Il devient responsable du premier triangle de direction des futurs FTP de la Région parisienne, aux côtés de Raymond Losserand, responsable politique, et de Gaston Carré. Après leur chute en mai 1942, Henri Tanguy est responsable "militaire" du nouveau triangle dont Roger Linet est le "politique" et Raymond Colin le "technique".


Les actions FTP se diversifiant, il élabore une tactique fondée sur l'intervention de trois groupes de trois, le premier attaquant, le second protégeant l'action et le repli du premier, le troisième couvrant le repli général, chaque homme ayant lui-même une fonction spécifique dans son groupe. Cette tactique est expérimentée avec succès lors de la manifestation de ménagères rue Daguerre, le 1er août 1942. Pour des raisons de sécurité, Henri Tanguy est nommé, en septembre 1942, responsable politique des FTP en Anjou-Poitou. Mais en avril 1943 il est rappelé à Paris, où les cadres manquent après de nouvelles arrestations. "Politique" de l'interrégion FTP (Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne), il est entouré de Joseph Epstein (militaire) et d'Edouard Vallerand (technique), qui est arrêté dès le 3 juillet. Il s'occupe tout particulièrement de la formation et de l'information des FTP. Début septembre, il représente les FTP au Comité d'action contre la déportation (CAD) puis, fin 1943, dans les FFI en cours de constitution. D'abord responsable du 3e Bureau (opérations) de l'état-major de la région P qui englobe Paris et onze départements, il est ensuite sous-chef d'état-major de la région P1 (Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, Oise). Il prend alors le pseudonyme de "Rol", du nom de l'un de ses camarades de la 14e Brigade tué en Espagne. Le 1er juin 1944, il est élu chef régional FFI au cours d'une réunion des responsables militaires des mouvements résistants de P1, à l'unanimité des présents (FTP, Libération-Nord, CDLR) – CDLL, l'OCM et le MLN étant absents. Le 5 juin, cette désignation est entérinée par le COMAC, Vaillant compris, initialement favorable à la candidature du DMR Sonneville ("Montrose"). Henri Tanguy devient le colonel "Rol". Entouré d'un état-major efficace dont il sait gagner la confiance, il suit de très près dès le Débarquement l'évolution de la situation militaire et de la mobilisation des populations d'Ile-de-France. Ses conceptions reposent, comme chez les FTP, sur l'action immédiate et le développement de la guérilla. Mais pour lui, il ne faut entreprendre d'action qu'après l'étude minutieuse des possibilités réelles de succès. Aussi refuse-t-il certaines consignes FTP qu'il juge inadéquates parce que lancées dans l'abstrait, comme la célébration systématique de Valmy ou la riposte immédiate à des exécutions d'otages. Certains responsables FTP lui en tinrent durablement rigueur. Aussi bien, à partir du moment où il a été versé dans les FFI, il ne connaît de hiérarchie que la leur, COMAC et état-major national. Là se trouve le fondement de l'autorité qu'il acquiert dans son état-major. Dans la préparation de l'insurrection parisienne, il s'en tient à ses principes réalistes ; d'où l'intense travail d'état-major pour avoir le maximum de renseignements sur le rapport des forces, l'état d'esprit des Parisiens, le moral et les moyens de l'armée allemande ; d'où la précision de ses directives, hors de toute incantation.

Le 18 août, "Rol" lance l'ordre de mobilisation générale qui concrétise le déclenchement de l'insurrection décidée par le CPL. Le 19, il intervient à la préfecture de police pour faire confirmer la grève de la police et Alexandre Parodi place sous son autorité de chef régional FFI l'ensemble des forces gouvernementales d'Ile-de-France. Dès le 20 au matin, il rejette la trêve, entraînant dans son refus le chef FFI de la Seine, le colonel de Marguerittes ("Lizé"). Le même jour, son état-major s'installe dans l'abri souterrain de la place Denfert-Rochereau, où il dispose des moyens de transmissions permettant de suivre au plus près le développement de l'insurrection et d'agir en conséquence. Pour contraindre l'ennemi à s'isoler dans quelques réduits, l'action de "Rol" repose sur la mobilisation de la population parisienne et sur le développement de la guérilla urbaine selon une logique militaire – bien montrée par Robert Frank lors du colloque sur la libération de Paris en 1994. D'emblée conscient de la nécessité de l'arrivée rapide des troupes alliées, "Rol" envoie auprès d'elles dès le 18 août la mission de De Varreux ("Brécy"), membre de son état-major, qui échoue, puis le 20 la mission Cocteau ("Gallois"), son chef d'état-major, qui contribue à accélérer la marche sur Paris de la 2e DB. Le 25 août, à la gare Montparnasse, "Rol" signe aux côtés de Leclerc un exemplaire de l'acte de reddition de Choltitz. Le 18 juin suivant, il est fait Compagnon de la Libération par le général de Gaulle.

Après la Libération, Rol entre à l'état-major du général Kœnig pour préparer l'intégration des FFI dans l'armée. Il prend le nom de Rol-Tanguy, officiellement reconnu fin 1970, que porteront ses quatre enfants. Engagé en octobre 1944, il est admis au grade de lieutenant-colonel après un stage de perfectionnement. Mis à la disposition de la 1ère Armée de De Lattre de Tassigny, il participe en 1945 à la campagne d'Allemagne, de la Forêt noire au Danube, comme adjoint du lieutenant-colonel Gandoët, commandant le 151e RI. Excellent officier selon ses pairs, il est avec d'autres anciens FTP victime de la Guerre froide. En 1952, l'Armée le relègue "personnel sans emploi" puis le met à la retraite d'office en 1962. Membre du comité central du PCF jusqu'en 1987, il n'y exerce jamais de responsabilité importante, sa fidélité ne compensant pas son indépendance d'esprit. Il se retire en 1976 à Monteaux (Loir-et-Cher), où il continue à œuvrer pour la mémoire de la Guerre d'Espagne et de la Résistance. Grand-Croix de la Légion d'Honneur en 1994, Henri Rol-Tanguy s'est éteint le 8 septembre 2002.



Roger Bourderon, "Henri Rol-Tanguy" in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.

Henri Tanguy dit "colonel Rol"

Plan du PC de Rol-Tanguy à Denfert-Rochereau