Voir le recto

"Courrier général 4 : Administration, décret n° 366", 25/07/1942 (intégration aux FFC)

Légende :

Document intitulé "Courrier général 4 : Administration, décret n° 366 fixant les règles d'intégration aux Forces Françaises Combattantes du personnel des territoires occupés par l'ennemi ou soumis à l'autorité du Gouvernement de Vichy", fait à Londres, le 25 juillet 1942, suivi de sa note d'application

Genre : Image

Type : Décret

Source : © Archives municipales de Tours - Fonds Jean Meunier - 5Z5/1N102 et 103 Droits réservés

Détails techniques :

Document imprimé sur papier pelure de 5 pages (voir aussi verso et album).

Date document : 25 juillet 1942

Lieu : France - Centre - Val-de-Loire (Centre) - Indre-et-Loire - Tours

Ajouter au bloc-notes

Analyse média

Edicté à Londres, le 25 juillet 1942, et introduit clandestinement en France occupée à l'intention des chefs de réseaux, le décret 366 est un texte capital qui fixe les règles d'intégration aux Forces françaises combattantes (FFC). Pour autant, ce décret, signé Charles de Gaulle, chef de la France combattante et président du Comité national, fut longtemps méconnu des historiens et du grand public, de même que la note ou circulaire d'application subséquente n°1368/D/BCRA datée du 27 juillet 1942. (1)

 

Ce décret, proposé par le commissaire national à l'Intérieur, au Travail et à l'Information André Diethelm, au nom du Comité national français (CNF) et de son chef, de Gaulle, s'inscrit dans la continuité de l'ordonnance portant organisation nouvelle des pouvoirs publics de la France combattante.

Le premier article du décret établit que les Français combattant l'ennemi sur le sol occupé qui ne seraient pas encore affiliés à un réseau des Forces françaises combattantes (ils sont appelés "agents spéciaux"), sont encouragés à le faire.

Le deuxième article établit que tout volontaire prêt à combattre l'ennemi sur le sol occupé - que sa participation soit pleine ou occasionnelle - peut bénéficier d'un dédommagement, pour lui comme pour sa famille, s'il est arrêté. De même, si ce volontaire vient à mourir, ou à se blesser en mission, est-il prévu un régime de pensions militaires, ouvert à ses ayants droit. L'éventualité d'une indemnité pour préjudice matériel est envisagée.

La note d'application qui suit est signée du Commissaire national à l'Intérieur, André Philip. Elle vient préciser le déroulé des démarches à entreprendre pour intégration aux Forces françaises combattantes.

les actes d'engagement doivent préalablement être soumis au général de Gaulle pour validation. Une fois validés, l'ouverture des droits se met en place. Naturellement, les volontaires déjà enregistrés comme agents spéciaux sont dispensés de cette démarche.

Les chefs de la Résistance devront classer les membres de leurs organisations selon une grille catégorielle précise. Sera ainsi admis :

- au grade d'agent "O" : toute personne concourrant à la Résistance de manière occasionnelle ; fidélité est due au CNF et à son chef, de Gaulle. Ce grade ouvre droit à des indemnités, aux distinctions honorifiques et, pour l'agent ainsi que sa famille, à un dédommagement en cas d'arrestation, de blessure grave ou d'exécution (pension militaire) ;

- au grade d'agent "P 1" : tout agent régulier qui, en plus de son activité résistante, exerce une profession rétribuée lui permettant de subvenir à ses besoins ; ce grade ouvre les mêmes droits que ceux des agents "O", avec, en sus, le versement conditionnel d'indemnités périodiques ;

- au grade d'agent "P 2" : tout agent qui est mobilisé entièrement au service de la Résistance ; l'engagement y est qualifié d"inconditionnel", encadré par la discipline militaire et sanctionné, le cas échéant, par un tribunal militaire. En contrepartie, l'agent P 2 jouit d'une solde, d'une pension, et de l'accès aux distinctions honorifiques.

Il est en outre indiqué que les chefs de la Résistance peuvent faire évoluer un agent d'un grade "O" ou "P 1" à un grade "P 2" et qu'un agent peut-être une femme ou un homme.

Le paragraphe suivant est consacré à la constitution des dossiers : après proposition, le chef de la Résistance renseigne le "questionnaire signalétique" (voir dernier document dans l'album). Le volontaire doit alors écrire un court texte deux fois : l'un des exemplaires lui est remis, l'autre, portant le code indicatif du volontaire, est envoyé au CNF à Londres.

La notice introduit ensuite la "procédure de secours", consistant à assurer un secours de première urgence à l'agent blessé ou emprisonné lors de sa mission. 

Enfin, il est rappelé que les agents peuvent prétendre à certaines distinctions honorifiques, toujours sur proposition du chef résistant, qui doit accompagner la demande d'un exposé détaillé. 


Paulina Brault

(1) Ministère de la Défense, numéro spécial des Chemins de la Mémoire, "Dans les archives secrètes de la Seconde Guerre mondiale", décembre 2015, pp. 44-45.

Contexte historique

Le 13 juillet 1942, le terme de « France combattante » fut adopté pour succéder à celui de « France libre ». Définie officiellement comme l'« ensemble des ressortissants français, où qu'ils soient, et des territoires français qui s'unissent pour collaborer avec les Nations unies dans la guerre contre les ennemis communs » et le « symbole de la résistance à l'Axe de tous les ressortissants français qui n'acceptent pas la capitulation et qui, par les moyens à leur disposition, contribuent où qu'ils se trouvent, à la libération de la France par la victoire commune des Nations unies », cette nouvelle appellation visait à signifier la prise en compte, par la France libre, de la Résistance intérieure, dans le combat de la Résistance française. La France libre et la « France captive » sont « les deux éléments constitutifs d'une seule et même France qui est la France combattante ».

Dans ce cadre, tout ce qui concernait à la fois la France libre et la Résistance intérieure changeait de nom (les délégués de la France libre devinrent « délégués du Comité National Français », le Journal officiel de la France libre devint Journal officiel de la France combattante, la Lettre de la France libre devint la Lettre de la France combattante, etc.). 

Si la France Libre devient la France Combattante dans les actes officiels, le qualificatif de « Français libres » reste admis pour les combattants, les unités, les navires, les réseaux et les territoires qui l’ont acquis (territoires français libres, Forces françaises libres, comités de la France libre, Caisse centrale de la France libre, libellés des billets de banque).

Le premier numéro du Journal Officiel de la France Combattante, édité à Londres et daté du 28 août 1942, homologue ce changement de nom et publie cette circulaire du 29 juillet 1942 de l’État-major du général de Gaulle : « En prenant la décision de substituer l’appellation « France Combattante » à l’appellation « France Libre », le Comité national, prenant acte de l’adhésion de tous les groupements qui, à l’intérieur même du pays, participent activement à la Résistance, a voulu marquer que la « France Combattante » groupait à la fois la France Libre représentée par les Forces Françaises Libres, les possessions d’Outre-mer et les Français de l’étranger , et la France Captive qui lutte contre l’envahisseur et l’autorité usurpée du pseudo gouvernement fonctionnant sous le contrôle de l’ennemi ».

Le 13 juillet 1942, le gouvernement de Grande-Bretagne reconnaît la France Combattante et le Comité national Français comme son organe directeur. Il sera suivi par la Nouvelle-Zélande le 18 août, l’Australie le 25 septembre et l’URSS le 28, le 24 octobre par tous les gouvernements en exil à Londres.

 


Paulina Brault

D'après l'article "De la France Libre à la France combattante" du site de la Fondation de la France libre, consulté le 4 mars 2016.