Croix du POWN

Légende :

Croix du POWN : Polska Organizacja Walki o Niepodleglosc (Organisation polonaise de lutte pour l'indépendance)

Genre : Image

Type : Médaille

Source : © Collection privée Droits réservés

Détails techniques :

Croix en argent et email

Lieu : France

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Analyse média

La croix porte sur ses quatre branches les lettres POWN et en son centre un médaillon en email rouge représentant l'aigle blanc polonais. Il est à souligner que l'aigle porte une couronne. Celle-ci avait été supprimée en 1945 par le gouvernement communiste puis rétablie en 1990 après la chute du communisme. 


Fabrice Bourrée

Contexte historique

Dans l'entre-deux-guerres, 500 000 Polonais arrivent en France pour chercher du travail, notamment dans les bassins miniers du Nord-Pas-de-Calais, où ils se retrouvent 300 000, soit 75% de cette émigration ouvrière. Cette population reste très souvent en communauté, habite dans les mêmes cités minières (corons), crée des associations culturelles, sportives, catholiques (prêtres polonais) et envoie même ses enfants à l'école polonaise (instituteurs arrivant aussi de Pologne). Ces colonies polonaises constituent un véritable vivier de la résistance. En effet, lorsque le consul polonais de Lille envoie en zone Nord, à l'été 1942, les agents Rémy Szczesny et les frères Paczkowski recruter de nouveaux membres pour la POWN, il trouve très facilement des personnes dignes de confiance et, de surcroît, très liées entre elles depuis des années. Par ailleurs, en zone nord, des mouvements déjà constitués (S, Orzel, Zorza) rejoignent la POWN. C'est en 1943 que le mouvement recrute massivement.

A l'origine, la POWN est constituée en 1941 à Lyon grâce à Aleksander Kawalkowski. Il a été plus facile en zone Sud d'organiser le mouvement dès 1941 puisque cette zone est moins surveillée donc permet grandement la conspiration. Les bureaux des Affaires polonaises liées aux structures des Affaires étrangères utilisent comme couverture les institutions légales autorisées par Vichy (Union des Polonais en France, la YMCA polonaise, la Croix-Rouge polonaise ou PCK, le Groupement d'assistance aux Polonais en France ou GAPF) pour mener à bien des activités de renseignements et d'aides auprès des soldats polonais souhaitant fuir la France. C'est ainsi que le lycée polonais de Villard-de-Lans sert de paravent au camouflage de jeunes Polonais qui veulent gagner clandestinement l'Espagne. De plus, Zygmunt Zaleski, Président du GAPF et directeur de ce lycée, sert de boîte aux lettres à la POWN : il est en relation avec le consul de Pologne au Portugal et reçoit par cette voie les messages et les fonds en provenance de Londres.
Le mouvement s'organise différemment suivant la zone Sud et Nord. Dans la zone Nord, on compte tout de même 5000 membres sur 8000 en 1944.

La POWN s'apparente à un mouvement car elle présente à la fois l'apparence d'une organisation militaire mais aussi exerce des activités à caractère politique. C'est ainsi que les principales tâches définies par le gouvernement polonais pour la POWN se déclinent en six points : organiser la résistance partout où se trouvent des Polonais ; préparer des opérations de sabotage ; faire de la propagande anti-allemande ; organiser les services de renseignements ; préparer la mobilisation des Polonais ; collaborer avec la Résistance française en remplissant le rôle d'alliée comme l'armée polonaise régulière, en Grande-Bretagne, à l'égard des Forces françaises libres. A ses débuts, la POWN développe d'abord son activité dans le sabotage et les renseignements (envois de rapports économiques, militaires au gouvernement polonais à Londres). Les agents du mouvement sont assermentés avec pour objectif, en libérant la France, de libérer la Pologne, comme l'explique toute leur presse clandestine (Walka, Komunikat, Sztandar, Wyzwolenie).

Outre les activités de propagande, les membres de la POWN passent à l'action, en particulier à partir de juillet 1943 et ce, jusqu'à la Libération. En effet, le colonel Antoni Zdrojewski est parachuté en tant que militaire de l'armée clandestine polonaise en France avec pour mission de s'occuper de l'organisation des éléments de la Résistance polonaise aux côtés des FFI. Un accord de coopération militaire est signé entre le colonel Zdrojewski et le général Chaban-Delmas le 28 mai 1944 : les détachements militaires s'intègrent dans les FFI tout en conservant leur commandement propre, mais sont tout de même soumis au commandement tactique français. Les membres de la POWN et les FFI contribuent alors à la libération de territoires.

Les personnes engagées dans la POWN expliquent les raisons de leur combat tout d'abord par la volonté de défendre la liberté, mais aussi par amour de leur patrie, à laquelle elles restent très attachées. La foi religieuse joue également un rôle important : elle permet à certains de tenir bon dans les moments difficiles. Il ne faut pas non plus négliger l'importance des réseaux de sociabilité (associations, opinions politiques) qui influent sur leur engagement.

Il est intéressant de procéder à une analyse sociologique de ces combattant(e)s. Au début, les chefs de la POWN ne souhaitent pas intégrer les femmes dans leurs rangs, mais ils se sont vite rendu compte de leur grande efficacité non seulement comme agents de liaison, mais aussi comme aide médicale : si bien que certaines équipes sanitaires ne sont constituées que de femmes. Par ailleurs, il n'est pas rare de voir des membres de la même famille s'engager dans la POWN. Les 30-40 ans sont les plus nombreux dans la POWN. Viennent ensuite les plus de 40 ans, qui exercent souvent des fonctions de chefs, puis les jeunes de 20 ans, qui s'engagent plutôt dans les actions armées. En ce qui concerne leurs activités professionnelles, les membres de la POWN sont majoritairement des mineurs de fond, mais toutes les catégories sont représentées. Les intellectuels exercent le plus de responsabilités, mais les chefs de section, dans la zone Nord, sont très souvent d'origine sociale modeste (mineurs, ouvriers). Le chef national, reconnu par le gouvernement polonais de Londres, est Aleksander Kawalkowski qui a trouvé des volontaires, notamment dans les associations polonaises en France avec lesquelles il entretenait déjà des relations avant la guerre. Néanmoins des conflits de pouvoir ont éclaté entre Kawalkowski et le lieutenant-colonel Zdrojewski.

Le nombre total de membres de la POWN s'élève à 8000 en 1944, ce qui n'est pas négligeable. Leur situation future à la libération n'est pas claire pour tous : certains sont obligés de repartir dans leur pays, d'autres restent, en ne sachant pas s'ils seront reconnus comme Français à part entière. Il est intéressant de noter que ces résistants se sentent, pour la plupart, Polonais et en même temps Français. Une ordonnance de 1945 précise que les étrangers peuvent acquérir la citoyenneté française pour actes de guerre ou de résistance. Les demandes de naturalisation de la part des Polonais croissent par rapport à l'avant-guerre, mais sont moins élevées que celles faites par les Italiens, notamment à cause de la politique des retours en Pologne (de 1946 à 1948) et de la Guerre froide. Les naturalisations dépendent également des générations : les anciennes sont souvent plus réticentes à la demander. Enfin, signalons que la naturalisation n'est pas forcément synonyme d'intégration, voire même d'assimilation. Il nous est donc difficile de dire si les Polonais ayant appartenu à la POWN se sont intégrés à la société après la libération de la France. Il y aura, pendant des années, une opposition entre la résistance des communistes, incarnée par le PKWN (Comité polonais de libération nationale), et celle des non-communistes de la POWN. C'est ainsi que l'on ne parlera de la POWN qu'à partir de la fin des années 1980, au moment où le bloc communiste s'effondre. 


Extrait de Peggy Desoutter, "Le mouvement POWN", CD-ROM La Résistance dans le Gard, AERI, 2009