Stèle en hommage au capitaine R. Baudouin, Langres (Haute-Marne)

Légende :

Stèle dédiée au capitaine Robert Bourgouin, commandant le 4e escadron du 2e régiment de spahis algériens de reconnaissance, tué les des combats de la libération de Langres le 13 septembre 1944. 

Genre : Image

Type : Stèle

Producteur : G. Chaillaud

Source : © Cliché G. Chaillaud Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur

Date document : 15 octobre 2017

Lieu : France - Grand Est (Champagne-Ardenne) - Haute-Marne - Langres

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Contexte historique

Le capitaine Robert Baudouin commandait le 4e escadron du 2e régiment de spahis algériens de reconnaissance. Après avoir débarqué en Provence, remonté la vallé du Rhône, contribué à la libération de Lyon puis Dijon, l'escadron Baudouin prend la direction de Langres où il doit s'emparer de la citadelle. 

Le 13 septembre, à 14h30, l'action se déclenche. Les chars débouchent tandis que le capitaine Baudouin, à la tête d'une patrouille à pied du 3e peloton (Landry, Guillot, Cadic, d'Aboville) se dirige vers la porte, suivi des hommes du Génie chargés de déposer la charge explosive sous la porte murée.
L'automitrailleuse du lieutenant de Mérode et celle du maréchal des logis Dillies progressent en même temps. Au moment où les éléments atteignent la première enceinte, l'ennemi ouvre un feu violent. Tandis que les armes automatiques balayent la route et les glacis, les grenades pleuvent sur le détachement. La riposte immédiate et brutale de nos chars neutralise la défense à l'Est de la route. Mais à la poterne, la concentration de feu est toujours aussi violente. L'ennemi n'ignore pas que la menace pèse de ce côté-là. Le Spahi d'Aboville est blessé à la jambe.
Légèrement abrité par le mur de la première enceinte et par les blindés, le détachement à pied attend le moment propice. Profitant d'une accalmie, le capitaine Baudouin se lance en avant. L'ennemi n'attend que ce moment. Toutes les armes crachent à la fois. Le capitaine fait encore quelques pas et s'écroule sur la route. Un homme du Génie se précipite jusqu'à lui et le relève, aussitôt assisté de Guillot et du lieutenant de Mérode qui, témoin de la scène, a déjà sauté de sa tourelle pour se porter au secours de son chef, laissant son auto-mitrailleuse au commandement du brigadier-chef Bernard de Gastines. Instantanément, le capitaine Baudouin est transporté jusqu'à l'auto-mitrailleuse de Dillies qui le ramène dans les lignes, tandis qu'un char du peloton Magdelain, « Tartarin », commandé par le chef Labiste, passe la poterne afin de tenter de forcer le passage. Il est touché par un projectile antichars et commence à flamber. La rapide intervention de l'aide-conducteur Blasco permet de maîtriser l'incendie. Grièvement blessé, le conducteur Demange parvient cependant, grâce à une énergie peu commune, à ramener le char dans les lignes. Quant au capitaine Baudouin, l'affreuse plaie qu'il porte à l'abdomen ne laisse aucun espoir au docteur Bouzonnie. Le blessé a encore toute sa connaissance. L'aumônier, le R.P. Deal, est là pour lui donner les seuls secours que le capitaine peut encore attendre en ce bas monde. De ce corps exsangue, la vie se retire à chaque seconde... En pleine conscience cependant, Robert Baudouin remet son âme à Dieu, avec la même foi et la même noblesse qui avaient empreint toute sa vie. Après avoir traversé les Pyrénées et l'Espagne pour rejoindre les troupes d'Afrique, après avoir connu l'existence infernale des camps et les alternances d'espoir et de désespérance, après avoir voulu se battre coûte que coûte et être parvenu à réaliser ce désir, le capitaine Baudouin jalonne de son sacrifice une étape de la libération du sol de France, sans avoir pu cependant connaître la suprême consolation de serrer une dernière fois dans ses bras, sa femme, ses enfants, qui, à quelques kilomètres de là, attendent encore avec anxiété les nouvelles de l'absent.

Dans la salle de la Mairie de Saint-Geosmes où le corps a été déposé, l'escadron Baudouin est rassemblé autour du Chef tant aimé. Il n'est rien de plus pénible que de voir pleurer des hommes. La gorge longtemps serrée, crispée à en souffrir, laisse enfin échapper les sanglots qui apaisent. Le général du Vigier, qui a connu et apprécié le capitaine, est venu s'incliner devant sa dépouille mortelle. Il ne peut que communier avec la même sincérité d'expression au deuil qui frappe l'escadron. « Le Capitaine, c'était comme mon père. » C'est ainsi qu'un vieux Spahi indigène résume au général, avec une naïveté touchante, l'étendue du deuil qui frappe les pelotons. Pendant toute la nuit, l'escadron veille celui qui, par son exemple, sut insuffler à chacun les plus nobles vertus. Cette mort semble avoir arrêté dans les esprits des hommes la notion du temps et du réel. La guerre existe-t-elle encore ? Et pourtant... Depuis 17h00, le drapeau blanc flotte sur la citadelle, comme si l'ennemi s'était rendu compte qu'il ne pouvait espérer imposer maintenant de sacrifice plus pénible au Régiment... Mais, ailleurs, les combats se poursuivent...

Par décret en date du 28 novembre 1944, le capitaine Baudouin est décoré de la Légion d'honneur à titre posthume : « Officier hors de pair, véritable preux, devenu légendaire au Régiment. Le 10 septembre 1944, commandant un groupement de Blindés et d'Infanterie chargé de reconnaître offensivement Dijon, a été violemment attaque par l'ennemi sur ses arrières, a su prendre les dispositions les plus judicieuses pour monter une contre-attaque et se dégager en infligeant à l'ennemi des pertes sanglantes et en détruisant plusieurs canons. Chargé, le 12 septembre, de reconnaître la route de Langres a bousculé avant la nuit toutes les résistances ennemies rencontrées. Reprenant sa progression le 13, au lever du jour, a libéré, par une manœuvre habile et audacieuse, le village de Saint-Geosmes solidement tenu par l'ennemi, capturant un canon et des prisonniers. Arrêté par la citadelle de Langres et chargé de couvrir le travail de destruction de la porte par le Génie, s'est avancé seul à pied en tête de ses autos-mitrailleuses. A réussi à atteindre l'objectif, grenadant l'ennemi malgré un feu exceptionnellement violent. A trouvé une mort glorieuse debout, face à l'ennemi qu'il défiait de toute sa bravoure et de toute sa foi dans sa mission de libération de la Patrie. » 


Extrait de :
Burnous rouges tombeaux blancs
Souvenirs du 2°Régiment de Spahis Algériens de Reconnaissance au cours de la campagne 1944-1945 en France et en Allemagne.
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