Rue Victor-Boltz, Mulhouse

Légende :

Voie dénommée rue Victor-Boltz par une décision du conseil municipal du 17 décembre 1956 en hommage à ce commissaire de police natif de Mulhouse, résistant, mort en déportation à Flossenburg.

Genre : Image

Type : Nom de rue

Producteur : Bertrand Merle

Source : © collection Bertrand Merle / Aéria Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur

Date document : 2017

Lieu : France - Grand Est (Alsace) - Haut-Rhin - Mulhouse

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Analyse média

Voie dénommée rue Victor-Boltz par une décision du conseil municipal du 17 décembre 1956. Elle est située à Bourtzwiller, ancienne commune rattachée à Mulhouse le 2 septembre 1947. Cet événement est rappelé dans la toponymie locale par la place du Rattachement. C’est une voie courte, résidentielle, bordée de maisons individuelles. Elle mène de la rue de Soultz (D429), un des grands axes de circulation du quartier, à la rue Christian-Pfister du nom d’un historien défenseur de l’Alsace française. D’autres rues mémorielles se trouvent à proximité immédiate. Citons les rue du Lieutenant-Paul-Noël-Dinet (mort au front à l’automne 1914), Henri-Dunant (1828-1910, fondateur de la Croix-Rouge), Jean-d’Armagnac (tombé à Bourtzwiller le 20 janvier 1945 lors les combats de la Libération) et un peu plus loin dans le quartier les rues du 20-Janvier, du Vercors, des Maquisards et Pierre-Brossolette (1903-1944). Mais aussi un rappel de la Première Guerre mondiale avec la rue du 15-Août en souvenir de six civils fusillés par les Allemands le jour de l’Assomption 1914 ; un monument en leur mémoire est adossé à l’église paroissiale Saint-Antoine. C’est dans ce quartier aussi qu’étaient situés les anciens Tissages de Bourtzwiller, dirigés par Paul Winter alias commandant Daniel, chef des FFI du Haut-Rhin, un des fondateurs dès 1940 de la 7e colonne d’Alsace, futur réseau Martial.
Aucune indication biographique ne figure sur les plaques de la rue Victor-Boltz.


Bertrand Merle

Sources :
Les rues de Mulhouse. Histoire et patrimoine. Conseil consultatif du patrimoine mulhousien et avec le concours de la Société d’histoire et de géographie de Mulhouse. Editions JM 2007 et JM 2009 actualisées et enrichies.

Contexte historique

Victor Boltz est né à Mulhouse (Haut-Rhin) le 21 avril 1885 dans une famille catholique. Ses parents sont Winsenz (Vincent) Boltz, caissier, et Ottilie (Odile) née Simon. A cette époque, la famille habite 15 Wilhelmtellgasse, aujourd’hui rue Guillaume-Tell. Le document est rédigé en allemand, l’Alsace étant devenue allemande à l’issue de la guerre de 1870-1871. Il se marie à Toulouse le 21 novembre 1940 avec Augustine Schoettlé, née à Kingersheim (Haut-Rhin). Les témoins sont des collègues: Paul Ehrard, commissaire de police et Jean Chagnon inspecteur de la sureté. Il décède en déportation à Flossenburg (Allemagne - Bavière). L’état civil de la Ville de Mulhouse indique la date 1er mai 1944 selon un rajout, en français cette fois-ci, en date du 28 août 1946 inscrite sur son acte de naissance avec la mention « mort pour la France ».

En 1914, il parvient à quitter l’Alsace après la début de la Première Guerre mondiale et s’engage comme volontaire dans l’armée française. Après le conflit, il est nommé commissaire de police à Mulhouse en 1919, chef de la sécurité. Dans ce cadre, il participe à la lutte contre le mouvement autonomiste dans la région. Le 23 avril 1928, il arrête à Riedisheim (Haut-Rhin) Frédéric-Charles Schweitzer et à Mulhouse, Marcel Stürmel (1900 - 1972) deux leaders de ce mouvement. Avec d’autres personnes, ils sont accusés de mener un « complot sur la sureté intérieure de l’Etat. » Ils sont tous les deux relaxés à l’issue du procès de Colmar (mai 1928). Marcel Stürmel est élu député entre 1929 et 1940, devient adjoint au maire pendant l’administration nazie de Mulhouse (1940 - 1944), condamné, puis amnistié en 1954. Quand survient l’annexion de fait au cours de l’été 1940, Victor Boltz rejoint Toulouse où il est nommé commissaire divisionnaire. Il est ensuite muté à Limoges. C’est dans cette ville qu’il est arrêté par la Gestapo le 17 avril 1943. Les nazis lui reprochent d’appartenir à la France Libre et notamment de faire partie des créateurs du mouvement Franc-Tireur.
L’Ecole nationale supérieure de la police (ENSP) a publié dans le cadre du 65e anniversaire de l’école la copie d’un courrier concernant Victor Boltz daté du 20 juin 1943. L’intendant de la police de la région de Limoges y répond à un courrier du 7 juin émanant de la préfecture régionale. Il indique, sur des informations qui proviennent du service régional des renseignements généraux, que « les services de police allemands découvrent une organisation gaulliste qui avait pris naissance au sein du corps urbain des gardiens de la paix de Limoges. » Quatre gardiens sont arrêtés ainsi que deux commissaires. Victor Boltz, commissaire central est l’un d’eux, le second est André Bertrand, commissaire divisionnaire chef du service régional de la sécurité publique, « que Boltz connaît intimement. » Plus loin dans cette note, son auteur précise que « ce mouvement gaulliste est appelé Franc-Tireur [et qu’il] se proposerait de paralyser l’action des troupes allemandes au cas où un débarquement anglo-américain viendrait à se produire. »

Après son arrestation, Victor Boltz est conduit au fort de Romainville le 26 mai 1943 (Seine-Saint-Denis), transite par Fresnes (Val-de-Marne) et Compiègne (Oise) le 19 janvier 1944 puis est déporté dans l’univers concentrationnaire à Buchenwald (Allemagne - Thuringe) le 27 janvier par le convoi I.173 avant d’être transféré à Flossenburg (Bavière) en avril sous le matricule 43920 où il décède quelques jours plus tard. En 1945, après l’armistice, un télégramme de recherche que publie l’ENSP est lancé par la hiérarchie du commissaire: « sans nouvelle » depuis son dernier transfert. Un arrêté du 7 avril 2009 (Journal officiel de la République française du 24 juin) publie une liste de personnes sur laquelle figure Victor Boltz, précisant que la mention « mort en déportation » peut figurer sur les actes et jugements déclaratifs de décès. Après guerre, sa dépouille a été rapatriée au cimetière central de Mulhouse. Victor Boltz est résistant déporté, décoré de la légion d’Honneur et des croix de guerre 1914-1918 et 1939-1945.


Bertrand Merle

Sources :
"Victor Boltz", note biographique, La Résistance des Alsaciens, DVDrom de l’Aéria sous la direction d’Eric Le Normand. Aéri. 2016. µ
Archives départementales du Haut-Rhin.
Etat civil de Mulhouse. Naissances 1885.
Archives municipales de la Ville de Toulouse. Mariages 1940.
www.ensp.interieur.gouv.fr/content/download/12206/107394/.../résistants_Partie2.pdf
Victor Boltz. www.AJPN.org
www.bddm.org/liv/recherche.php
Le journal de prison de Marcel Stürmel 24 février -1er mai 1928. www.hewwemi.net/le-journal-de-prison-de-marcel-sturmel -
Le procès du complot autonomiste à Colmar. www.gallica.bnf.fr