Plaque à la mémoire de Roger Mercier, Paris 19e

Légende :

Plaque apposée 26 rue Alphonse Karr dans le 19e arrondissement de Paris  là où demeurait Roger Mercier au moment de son arrestation

Genre : Image

Type : Plaque commémorative

Producteur : Roger Gauvrit

Source : © Collection Roger Gauvrit Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur

Date document : 2017

Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris XIXe

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Contexte historique

Roger Mercier est né le 12 novembre 1923 à Reims (Marne). Il est le fils de Victorine Rosse et d’Eugène Mercier. Il habite chez ses parents au 26 rue Alphonse Karr à Paris (19e) au moment de son arrestation. Il est célibataire et apprenti lithographe. Sans travail dans l’imprimerie depuis juin 1940, il travaille comme manœuvre, emballeur. Il est membre d’un groupe de jeunes qui, sous la responsabilité de Camille Bouvinet et de Ventura, diffuse de la propagande communiste (témoignage de Camille Bouvinet). Le 22 octobre 1940, il colle des papillons gommés avec ses camarades. La recrudescence d’inscriptions à la craie, d’affiches et de diffusion de tracts dans le 19e arrondissement alerte les services de la Préfecture de police, malgré l’arrestation d’Auguste Gacher, qu’ils considèrent comme l’instigateur de cette propagande. Des enquêtes et filatures sont donc effectuées dans les milieux communistes du 19e par des inspecteurs de la Brigade spéciale des Renseignements généraux. Les rapports de police ne font état d’aucune dénonciation ayant précédé les arrestations, contrairement à ce qu’a cru Mario Ripa (lettre de Mario Ripa à son retour de déportation). Le 23 octobre 1940, les inspecteurs de la BS procèdent par groupes de deux (« R. et M. », « T. et C. », « H. et R. »), à des perquisitions aux domiciles de 8 personnes : Maurice François, 18 ans, Paul Millet, 44 ans, Roger Mercier, 16 ans, Marcel Mercier, 18 ans, Georges Durand, 18 ans, Alfred Varlet, 19 ans, Henri Varlet 20 ans, Mario Ripa, 24 ans et son frère. Ils sont tous arrêtés et interrogés dans le cadre de l’« Affaire François, Ripa, Varlet, Mercier, Millet, Durand ».

Les inspecteurs trouvent sur Roger « une lettre au dos de laquelle sont inscrites au crayon des instructions reçues par lui de la part du nommé Gacher » (PV de saisie). Son frère Marcel « est trouvé porteur d’une liste de souscription de la Jeunesse communiste et de huit tracts ronéotypés ou imprimés d’inspiration communiste ». La « visite domiciliaire effectuée au domicile des frères Ripa, des frères Varlet, des frères Mercier et de François n’a donné aucun résultat », note le commissaire principal André Cougoule. C’est donc au cours des fouilles à corps où les enquêteurs trouvent quelques tracts et des interrogatoires et confrontations que la police conclut que « ces individus ont reconnu, ou d’avoir diffusé des tracts clandestins d’inspiration communiste, ou collé des papillons gommés de même origine ou fait à la craie des inscriptions de même nature ». Lors de son interrogatoire, Roger Mercier reconnaît avoir fait à la craie des inscriptions sur les murs, les trottoirs et la chaussée, à l’instigation d’Auguste Gacher, inscriptions dont les modèles lui ont été donnés par celui-ci et qu’il a recopiés au dos de la lettre retrouvée sur lui. Il nie toute autre activité, « je n’ai jamais distribué de tracts ou collé de papillons » (PV d’interrogatoire). Inculpé par le commissaire André Cougoule d’infractions aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939, Roger Mercier est conduit au dépôt de la maison d’arrêt de Fresnes le 24 octobre, sur mandat du juge d’instruction du tribunal de première instance de la Seine.

A l’issue du procès qui a lieu le 21 décembre 1940 à la 15e chambre, en présence de son père, légalement responsable, Roger Mercier est condamné à 6 mois de prison avec sursis et relaxé « en raison de son jeune âge ». Il est remis à sa famille. Son frère Marcel, également condamné à 6 mois de prison avec sursis, est interné au camp d’Aincourt, avec Mario Ripa et Georges Durand. Roger Mercier est de nouveau arrêté, le 28 avril 1942 par des policiers allemands assistés de policier français. Ce jour là une rafle est effectuée par l’occupant dans tout le département de la Seine. Roger Mercier est interné le même jour au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), le Frontstalag 122. A Compiègne, il reçoit le matricule "4118". 

Roger Mercier est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000». Ce convoi d’otages composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes (responsables politiques du parti et syndicalistes de la CGT) et d’une cinquantaine d’otages juifs (1170 hommes au moment de leur enregistrement à Auschwitz) faisait partie des mesures de représailles allemandes destinées à combattre, en France, les Judéo-bolcheviks responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Son numéro d’immatriculation lors de son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 est inconnu. Le numéro "46252 ?" figurant dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 correspondait à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Il ne figure plus dans mon ouvrage Triangles rouges à Auschwitz.

Roger Mercier meurt à Auschwitz, le 17 octobre 1942 d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 801). Il n’a pas encore 19 ans. Roger Mercier est homologué comme « Déporté politique ». La mention Mort en déportation est inscrite sur son acte de décès (arrêté du 15 juin 1995 paru au Journal Officiel du 28 juillet 1995). Cet arrêté corrige le précédent qui indiquait mort le 6 juillet 1942 à Compiègne, mais mentionne toujours une date erronée : décédé le 11 juillet 1942 à Auschwitz, soit les 5 jours prévus par les textes en cas d’incertitude quand à la date réelle de décès à Auschwitz. Il serait souhaitable que le ministère prenne désormais en compte par un nouvel arrêté la date portée sur son certificat de décès de l’état civil d’Auschwitz, accessible depuis 1995 (Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau). Une plaque honore sa mémoire rue Alphonse Karr. 


Biographie rédigée en 2008, installée en septembre 2012, par Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942, Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé).