La Malquière, premier maquis des EIF

Légende :

Photo de groupe des premiers maquisards de La Malquière : Adrien Gensburger, Roger Cahen, François Lévy, Jean Hirsch, Jacques Rozensweig, Roger Bloch, Daniel Kouglia et Henri Glovinsky.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Mémorial de la Shoah / Coll. MJDP, Adrien Gensburger Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : Novembre 1943

Lieu : France - Occitanie (Midi-Pyrénées) - Tarn - Viane

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Contexte historique

En novembre 1943, La Malquière (vieille ferme d’un hameau de la commune de Viane dans les Monts de Lacaune) accueille le premier maquis des Eclaireurs israélites de France (EIF). Les huit premiers résistants juifs qui le créent viennent des différentes fermes organisées par les EIF et dissoutes au cours de l'automne 1943. Ils s'installent dans cette ferme en ruine dont le nom semblait inquiétant (en patois : "la mauvaise"). Adrien Gensburger témoigne : "Après de longues et vaines recherches dans la région, nous avions fini par trouver au fond d’un étroit vallon dans un hameau encore partiellement habité, une maison avec deux pièces et un grenier, le tout parfaitement logeable. A côté un local qui allait nous servir de cuisine et de réfectoire et tout près une excellente source qui devint le témoin de nos ablutions". (RHS, 1997/3 n°161).

Ces huit jeunes pionniers sont Roger Cahen, François Levy, Jean Hirsch, Jacques Rosenzjweig, Henri Glovinski, Roger Bloch, Daniel Kouklia et Adrien Gensburger. Seuls les deux plus âgés, dont Roger Cahen, ont fait la campagne de 1939-1940 et ont donc une formation et une expérience militaire.

A la Malquière, la vie quotidienne est rythmée par de longues séances d’entrainement physique dans la journée et des cours de théories militaires dans la soirée. Peu armés, au départ, et décidés à tout pour se procurer des armes, les maquisards organisent, en février 1944, un raid sur les dépôts d'armes des maquis tarnais, au détriment, bien sûr, des autres maquis. Lucien Lublin dans ses archives personnelles explique que leur "action" leur rapporte treize mitraillettes, douze revolvers, des munitions, vingt grenades. Certes, cet incident entraîne des tensions avec les chefs locaux de la Résistance, mais il est vite oublié (cf. Kauffman - R.H.I.C.O.J. - p. 129). Avec des armes, l'entraînement devient plus sérieux et plus intensif. Ils apprennent à lancer les grenades, à manier les mitraillettes, bien rudimentaires à côté des redoutables armes allemandes. Ces "petits soldats encore bien novices (…), mettent tant d'ardeur et de passion à apprendre, qu'en moins de quinze jours ils savent manier une arme, et en apprennent autant qu'une recrue normale en trois mois" écrit Anny Latour.

Exercé à la guérilla et au maniement des armes, ce maquis juif de Vabre est vite réputé pour son sérieux et sa discipline, conséquences de son ancienneté dans le maquis, de sa tradition scoute et de sa droiture morale.
Charles d’Aragon, adjoint de Dunoyer de Segonzac, commandant la zone A des FFI du Tarn, écrit dans La Résistance sans héroïsme (Ed ; du Seuil, 1977) : "Dans quel temps vivions-nous ? Nous avions vu tant de Juifs partir en groupe et captifs vers l’Allemagne. Voilà enfin que nous avions devant nous, rassemblés, entraînés, des Juifs prêts à prendre le même chemin, mais cette fois en armes. Personne n’avait l’air plus militaire que ces hommes dont les propos nous rendaient graves".

Devenue trop étroite pour faire face à l'afflux des résistants, La Malquière est dissoute et ses effectifs répartis entre La Roque, créée le 15 mars 1944 et Lacado, créée le 24 avril 1944.


Auteur : Valérie Pietravalle

Sources et bibliographie :
Valérie Ermosilla (Pietravalle), La Résistance juive dans le Tarn 1939-1944, réalités et représentations, mémoire de maîtrise sous la direction de Pierre Laborie et Jean Estèbe, Université Toulouse Le Mirail, 1987.
Adrien Gensburger, « Les EI au maquis », Revue d’Histoire de la Shoah, Centre de Documentation Juive Contemporaine, 1997/3 n° 161, pages 74 à 79.
Anny Latour, La Résistance juive en France, Stock, 1970.
RHICOJ, Les Juifs dans la Résistance et la Libération, Paris, éd. du Scribe, 1985.
Charles d’Aragon, La Résistance sans héroïsme, Ed. du Seuil, 1977, page 186.