Henri Broder

Légende :

Membre de l'Armée juive depuis janvier 1943, Henri Broder rejoit le maquis de Biques dans le Tarn en janvier 1944 et y devient l'adjoint de Pierre Loeb. Après l'intégration des maquis de l'AJ au sein du Corps franc de la Montagne noire le 6 juin 1944, Henri Broder devient adjoint au chef de peloton. C'est au sein du "peloton Trumpeldor" qu'il prend part aux combats de la Libération.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Mémorial de la Shoah / Coll. Henri Broder Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique sepia

Date document : 1944

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Henri Broder est né dans le XIIe arrondissement de Paris le 18 janvier 1923. Son père Salomon, combat dans l’armée anglaise durant la Grande Guerre avant de s’installer en France en 1920 où il rencontre la mère d’Henri Broder, Malka Judkowiez ; le couple a sept enfants. Henri fait ses études au lycée Louis le Grand où il suit notamment les cours de Georges Bidault, professeur de géographie. Henri Broder qui se définit comme "nationaliste", envisage d’intégrer l’école militaire de Saint-Cyr pour devenir officier. Son frère est mobilisé en septembre 1939 et combat pendant la campagne de 1940 tandis que le reste de la famille prend la route de la Vendée, avant de revenir à Paris après la défaite.

Par souci de rester dans la légalité, ses parents se soumettent à l’obligation de se faire recenser comme Juifs, quoique la famille ne revendique pas son appartenance au judaïsme, conformément à la loi du 2 juin 1941 édictée par le gouvernement de Vichy. À 17 ans, Henri Broder choisit de franchir la ligne de démarcation vers la zone non-occupée ; il ne reverra jamais son père qui meurt à la fin de l’année 1941 tandis que sa mère est arrêtée et déportée (elle n’en reviendra pas) et que ses frères et sœurs se dispersent. Il arrive à Nîmes où il obtient ses diplômes de bûcheron, de chauffeur de gazogène et de charbonnier. Il devient secrétaire comptable dans une société d’exploitation industrielle et forestière. C’est durant ce séjour à Nîmes qu’il rencontre des réfugiés juifs venus de Belgique ; ces derniers lui font découvrir le sionisme. Contraint par la législation du gouvernement de Vichy, son patron lui demande d’obtenir un "certificat de non-appartenance à la race juive" au bureau des questions juives de la Préfecture de Paris qu’il obtient en prétextant d’une amitié, supposée ou réelle, entre son patron et le préfet : "C’était mon premier contact avec le mot Juif", le second étant les rafles dont il est le témoin.

Il rencontre une famille de juifs émigrés de Belgique, les Bornstein, sionistes, en contact avec l’Armée juive où il choisit de s’engager en janvier 1943. "Puisqu’on veut que je sois juif, soyons-le et faisons quelque chose pour le judaïsme", témoigne-t-il dans les années 1970. Il est convaincu que le combat contre les Allemands est la première étape nécessaire pour la fondation d’un Etat autonome en Israël. Jacques Roitman et Maurice Hausner lui font prêter serment, sur un pistolet et une Bible, "de lutter jusqu’à la mort pour qu’un jour, il y ait l’État d’Israël".

N’étant pas identifié comme juif, Henri Broder est convoqué aux Chantiers de jeunesse en juillet 1943. Affecté à Bourg-en-Bresse, il rejoint ensuite Collonges au Mont d’Or près de Lyon où il doit intégrer l’école des cadres. Concerné par la loi du 16 février 1943 instaurant le Service du travail Obligatoire (STO), il entre dans la clandestinité et, grâce à l’aide de Jacques Lazarus qu’il rencontre en janvier 1944, intègre le maquis de Biques, près d’Alban dans le Tarn, fondé par l’Armée juive en octobre 1943. Il y devient l’adjoint de Pierre Loeb.

L’objectif est de rassembler les jeunes juifs, de les former au combat et de les faire passer en Espagne grâce à la filière créée par Dika Jeffrokin pour qu’ils rejoignent la Brigade juive en Palestine. Il est prévu que le jour du Débarquement, les maquisards rejoignent les autres maquis de la région pour constituer le Corps franc de la Montagne noire. Jusqu’au jour J, le maquis juif conserve donc son autonomie.

En mars 1944, les maquisards se replient à la Jasse-de-Martinou, près de Lacaune à son tour attaqué par les Allemands le 20 avril 1944. Le maquis s’installe alors à l’Espinassier, "un village abandonné dans la montagne, que nous avons rénové pour le rendre plus habitable". Suite au débarquement du 6 juin 1944, le maquis de l’Espinassier rejoint comme prévu le Corps franc de la Montagne noire où il conserve sa spécificité juive au sein du 4e escadron en arborant des épaulettes bleu-blanc. Au sein de cet escadron, Henri Broder devient chef de peloton adjoint avec le grade de maréchal-des-logis chef. Il prend part aux combats de la Libération : "il fallait combattre les Allemands et libérer la France et ensuite continuer notre mission : avoir un pays pour les Juifs".

Henri Broder est démobilisé à Toulouse le 31 août 1944 avec le grade d’aspirant après avoir suivi deux stages d’élève officier.

Après la guerre, il poursuit son engagement sioniste, intègre la Haganah et suit la formation fournit par les Palestiniens du Palmah (forces paramilitaires juives sionistes). Il part ensuite en Afrique du nord pour soutenir et former les Juifs victimes de persécutions. De retour en France, il est attaché au Bureau de recrutement de l’Agence Juive au moment de la Guerre d’indépendance, pour y accueillir les volontaires.

Il participe à la création d’un camp d’entraînement à Sathonay, près de Lyon, où, sous prétexte de simples activités sportives, les jeunes volontaires reçoivent une instruction militaire en vue de leur départ pour la Palestine. Après un bref séjour en Palestine, il revient en France où il souhaite "s’assimiler". Il fait partie des créateurs de l’association France-Israël.

Titulaire de la croix de guerre avec étoile de bronze (citation du 25 avril 1945) et de la croix du combattant volontaire de la Résistance, Henri Broder est nommé chevalier de la Légion d’Honneur en mai 1993.


Auteur : Guillaume Pollack, Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16P 92252 (dossier d'homologation) ; 2010 PA 52 (fonds du MLN).
Mémorial de la Shoah, Paris : DLXI-10, témoignage non signé d'Henri Broder, recueilli après-guerre par Anny Latour
United States Holocaust Memorial Museum Collection : témoignage vidéo d’Henri Broder. (http://collections.ushmm.org)
Organisation juive de combat – France – 1940-1945, éditions Autrement, 2008.