Serge Ravanel : les mystères de la presse clandestine

Légende :

Serge Ravanel évoque les mystères de la presse clandestine

Genre : Film

Type : Témoignage filmé

Source : © AERI Droits réservés

Détails techniques :

Durée de l’extrait : 00:01:04

Tournage et montage : Nicolas Voisin

Interview réalisée par Clémence Piet et Manuel Valls-Vicente.

Date document : Année 2007

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Rhône - Lyon

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Analyse média

Retranscription :

 

" Mon activité militante a commencé par des distributions de journaux. Et tout le mystère qui entourait les journaux... A savoir que quand un journal paraissait, on ne savait pas du tout qui était derrière, ou qui le produisait. C'était clandestin. Et donc, on était en admiration devant ces journaux, on se demandait qui les faisait. Et donc, j'ai développé un groupe de dix à douze personnes, autour de la faculté de Droit. Ce groupe avait des règles de travail de clandestinité. On faisait de la distribution de journaux. Il y avait par exemple le Père Duchesne, le Coq enchaîné, des journaux qui ont vécu trois mois, six mois, huit mois et qui ont disparu. Moi, je suis rentré plus tard au mouvement Libération, dont je n'avais jamais vu le journal. Je ne savais pas qu'ils possédaient un journal ; il ne m'était jamais passé entre les mains. " 


Contexte historique

Serge Asher est né le 12 mai 1920, à Paris. Sa mère, réfugiée tchèque, lui transmet son amour de la France, " pays des Droits de l'Homme ". De plus, Serge voyage en Europe et comprend ainsi très vite le danger du régime nazi.

En septembre 1939, ayant réussi l'entrée à l'Ecole Polytechnique, Serge est d'abord mobilisé à Fontainebleau. Lui et ses camarades se retirent ensuite vers Poitiers, assistant jusqu'en juin 1940 à l'exode de populations désoeuvrées. En décembre 1940, Serge intègre l'école Polytechnique, repliée à Lyon.
En avril 1941, il prend contact avec le général Cochet et intègre son groupe de résistance. Ils discutent de la situation militaire et cherchent ainsi à garder espoir. Mais Serge a besoin d'action. A l'occasion d'une visite à Paris, il fabrique lui-même un système pour se glisser et voyager sous les wagons de voyageurs, le sol défilant à moins d'un mètre sous lui ! Il évite ainsi les contrôles allemands, alors qu'il est nécessaire de disposer d'un Ausweis pour passer la ligne de démarcation.

En juin 1941, il intègre un groupe catholique d'action sociale. Il prend alors un pseudonyme et organise des groupes de diffusion de journaux clandestins, en recrutant dans les universités lyonnaises.

Un an plus tard, le secrétariat du mouvement Libération-Sud le recrute. Serge se rend à Marseille, au mois de novembre, afin d'étudier la mise en place de groupes de sabotage avec les responsables locaux. Mais à la place du correspondant avec lequel il a rendez-vous, c'est un policier qui l'arrête... Il s'évade dès le lendemain.

Le 15 mars 1943, Serge Ravanel est arrêté en même temps que d'autres résistants lyonnais, dont Maurice Kriegel-Valrimont et Raymond Aubrac. La direction du mouvement Libération organise leur évasion : après avoir simulé des maladies, ils sont transférés à l'hôpital où un commando de résistants les enlève le 24 mai.

Serge devient, le 12 juin 1943, chef national des groupes francs (GF) des Mouvements unis de Résistance (MUR). C'est à ce moment qu'il choisi le pseudonyme de " Ravanel ", qu'il gardera par la suite. Ravanel est le nom d'une aiguille rocheuse à Chamonix et " renvoie à l'effort que l'homme peut accomplir pour atteindre des objectifs désintéressés ". A ce titre, on lui demandera de libérer Jean Moulin, arrêté par la Gestapo le 21 juin 1943, mais cette opération échouera faute de temps. L'évasion de Raymond Aubrac, arrêté en même temps, sera un succès en octobre 1943... 

Pourtant, trois jours plus tôt, Serge avait été arrêté par la police allemande lors d'une réunion à Meximieux dans l'Ain. Il saute par la fenêtre et plonge, de nuit, dans le fleuve, afin d'échapper à ses poursuivants. C'est sa troisième évasion !

Au début d'avril 1944, Serge devient responsable régional des corps francs de la Libération (CFL) de la région Midi-Pyrénées (R4), de manière provisoire d'abord, puis officielle. Ainsi, le 6 juin 1944, le général Koenig le nomme chef régional de l'ensemble des forces militaires régionales de la Résistance, qui sont désormais réunies sous le nom de Forces françaises de l'intérieur (FFI). Serge est nommé colonel.
A cette fonction, il oeuvre pour l'unité des groupes de Résistance, quelles que soient leurs opinions politiques et leurs différences. Du 17 au 24 août, il dirige les combats de la libération de la région et prépare l'insurrection populaire prévue dans le programme du Conseil national de la Résistance (CNR). Le 16 septembre 1944, le général de Gaulle se rend à Toulouse, mais la rencontre n'est pas à la hauteur des espérances de Serge. Les services de renseignements de la France libre ont été très négatifs sur les mesures prises, et la visite du général de Gaulle à Toulouse se caractérise par sa froideur. Pourtant, ces critiques s'avèreront par la suite infondées. Quatre jours plus tard, suite à un grave accident de moto, Serge abandonne son poste à Jean-Pierre Vernant (" Berthier ").

En janvier 1946, il est compagnon de la Libération. Une fois rétabli, il intègre l'armée régulière où il sera rétrogradé, ce qu'il accepte car il souhaite "servir et non se servir". Il démissionne en 1950, déçu par l'amalgame. Il devient alors ingénieur, occupant différents postes. Dans les années 1990, après un long silence sur le sujet, Serge pense qu'il faut de nouveau se préoccuper de la Résistance et participe à de nombreuses initiatives sur le sujet. Il écrit ses mémoires (L'esprit de la Résistance, Editions du Seuil, 1995), entre au Comité d'action de la Résistance (CAR), à la Fondation de la Résistance. Il crée, en 1993, l'AERI (Association pour des études sur la Résistance intérieure) avec d'autres résistants.

Serge Ravanel, Grand Officier de la Légion d'Honneur, est décédé le 27 avril 2009 à Paris.


DVD-ROM « Valeurs de la Résistance, valeurs des jeunes aujourd’hui », AERI, 2012.