Retraite allemande dans le nord de la Drôme, août 1944

Légende :

Croquis de la position des unités allemandes à la fin août 1944

Genre : Image

Producteur : Alain Coustaury

Source :

Détails techniques :

On a marqué les axes principaux de la retraite, les voies de communication et les lieux drômois évoqués dans la notice.

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes)

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Analyse média

Carte de la position des unités de la 19e Armée allemande le 30 août 1944 : Lyon, Vienne et région, nord de la Drôme.   Elle permet de localiser les lieux évoqués par Irène Brunet et René Delhomme.

Le premier symbole du cartouche légende correspond au déploiement temporaire du chef de l'HeeresgebietSüdfrankreich ou HGSF, grand état-major territorial du sud de la France ayant jusque là sous ses ordres cinq HauptVerbindungsStab ou HVS. À savoir : HVS 590 à Lyon, HVS 588 à Clermont-Ferrrand, HVS 564 à Toulouse, HVS 563 à Montpellier et HVS 894 en Avignon. Chacun de ces HVS, coiffait des VerbindungsStab départementaux. Ainsi, le HVS 590 de Lyon avait autorité sur le VS 998 de Valence et le VS 577 de Privas. Avant les premières escarmouches lyonnaises, cet HGSF était implanté au Grand Hôtel de Lyon. Mais, au moment où l'insurrection se dessine, il est fort possible que ce commandement territorial ait choisi de se « desserrer » à St-Symphorien-d'Ozon, se rapprochant ainsi de la 19ème armée de Wiese en approche, pour assurer un recueil facile. Plus au sud, vers Condrieu, le Kampfgruppe du général Schwerin est composé d'une forte colonne articulée autour de sa 189ème Infanterie-Division partie à pied depuis Montpellier. Marschgruppe et Kampfgruppe étaient les deux formes d'organisation des colonnes disparates (administratifs, marins, civils, collabos) mélangés aux Grenadiers ayant remonté le long de la rive droite du Rhône.


Informations et interprétation, Pierre Balliot.

Réalisation, Alain Coustaury ©

 

Contexte historique

Irène Brunet, née Delhomme, le 12 mars 1926, Veuve André Brunet et son frère René Delhomme, né le 20 juillet 1929, ont raconté leurs souvenirs des journées 30, 31 août, 1er et 2 septembre 1944, alors qu’ils ont respectivement 18 ans et 15 ans. Le 18 juin 2012, à l’appel d’Irène, René se rend chez sa sœur pour la photo, dans le jardin (document exposé). Irène Brunet et René Delhomme se souviennent de quelques jours de 1944 Elle a décidé de rencontrer son frère René, au village avec elle, lorsque la Drôme vivait ses derniers moments d’occupation par les troupes allemandes. Ils ont tous les deux assisté, en l’espace de quatre jours, au niveau de leur pays natal, au repli de la 19e Armée allemande, avec les lourdes conséquences qui l’ont accompagné. Celles-ci furent brutales localement et dans la région – René fut blessé – et parfois même sanglantes : 19 personnes trouvèrent la mort – fusillées ou brûlées dans une remise – au cours du massacre de Chanas (à une dizaine de km de Saint-Sorlin, dans l’Isère). Par ailleurs, la présence de forces de la Résistance dans la commune et les alentours, a conféré à la libération du pays et à l’arrivée des unités alliées, une teinte singulière qui n’a pas échappé aux yeux d’adolescents d’Irène et René, ainsi qu’en atteste leur témoignage, réalisé à deux et tapé par Claudette Serves, la fille d’Irène.

Le 30 août 1944, en fin de matinée, vers midi, des motards allemands passent en éclaireurs dans le village. « Les "Boches" arrivent ! ». Les habitants s’affolent…. La population déserte le village pour se réfugier dans les bois ou dans la Valloire. Cette nuit-là, nous avons dormi dans « la cabane Pupat », au quartier Barathon. Il y avait notre grand-mère, Cézarine Rozier/Brunet, nos parents, Gaston et Jeanne Delhomme, notre tante et notre cousine Suzanne et Yvette Babouin, la famille Faletty (Dinha, Suzanne, André et Roberte). Dans la journée, nous entendions des tirs. Nous nous sommes réfugiés dans la « Combe de la Maladière ». Un peu plus loin se trouvait notre pharmacienne, Mme Saboya, le Dr Borgéda et Melle Vaïda, personnes de confession juive, qui se cachaient comme nous. Des tirs au-dessus de nos têtes.… Et, tout à coup, des Allemands. Une grenade défensive « à manche » éclate ! Tout le monde se sauve en criant, certains étant blessés. Les Allemands tirent deux coups de fusil devant nous pour nous arrêter… et nous nous trouvons dans la cour de la maison de Mme Plantier. Un Allemand, parlant un peu français, nous dit qu’il était médecin… et de rajouter : « mademoiselle pleure pour sa beauté ». Il met des pansements à tous ceux qui avaient reçu des éclats de grenade. Nous étions des blessés légers. Un coup de sifflet, et tous les Allemands partent. Le lendemain 31 août, après avoir dormi sur place, notre grand-mère Cézarine est venue nous chercher en voiture à cheval. René a été conduit chez le Dr Barbier à Beaurepaire pour une radio (au-dessus du bureau du docteur, il y avait encore le portrait de Pétain). À ce jour, 22 janvier 2012, René a toujours l’éclat de grenade dans l’épaule. Le 1er septembre, nous étions dehors. Notre maison se situe dans le village, quartier La Roche, route de Châteauneuf [de Galaure]. Nous entendons tirer dans le village : c’étaient les maquisards qui commençaient à fêter la Libération. Au même moment, sont descendus, au galop, une centaine de Mongols, arrivés prisonniers avec des Allemands. Ces Mongols se sont arrêtés net au niveau de notre maison ; ils sont remontés aussitôt jusqu’à la maison Luc où ils ont stationné quelques jours. Le 2 septembre, ils sont repartis avec les Américains pensons-nous : ces derniers sont en effet arrivés ce jour-là… distribuant des chocolats aux habitants !"

 L’action allemande, tant au sud de la Valloire, du Creux-de-la-Thine à Saint-Sorlin, qu’au nord de la vallée, de Chanas à Beaurepaire, les 29 et 30 août 1944, s’inscrit dans une stratégie de repli qui permet de mieux comprendre certains aspects du récit qu’on vient de lire.


Claude et Michel Seyve