Veste de déporté de Maurice Bochaton

Genre : Image

Type : Vêtement

Producteur : Cliché Robert Serre

Source : © Collection Robert Serre Droits réservés

Détails techniques :

Veste en tissus. 

Date document : 2005

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Montélimar

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Analyse média

La plupart des déportés, surtout vers la fin de la guerre, ne recevaient que des vêtements dépareillés et sales provenant de déportés précédents exécutés. Veste et pantalon rayés leur étaient cependant attribués lorsqu’ils quittaient le camp central pour un kommando extérieur. Chacun devait y fixer selon les normes imposées un triangle de couleur (rouge pour les « politiques », jaune pour les Juifs, vert pour les « droit commun », etc.) et une bande de tissu portant leur numéro matricule. Ce numéro devenait leur unique identité.

Il s’agit ici de la veste de déporté de Maurice Bochaton, avec son matricule à Dachau (77 692) et le triangle rouge des « politiques ».


Auteurs : Robert Serre

Contexte historique

René Bochaton, né en 1907 à Lyon, habite Montélimar avec sa femme et ses trois enfants, Maurice, 17 ans, Raymond, 14 ans, et Simone, 10 ans. Il exerce la profession de cordonnier sur la route de Valence.
Il appartient au Front national (FN), alliance d’organisations de résistance créée par les communistes. Il a commencé à résister au début de septembre 1941 et a été rapidement désigné comme chef d’un groupe comprenant entre autres Robert Belot, replié du Nord chez sa mère à Montélimar à partir de l’exode de 1940, employé au bac à traille du pont du Teil, qui sera pris à Lyon et déporté. Dans ces premiers pas de la Résistance, les actions sont limitées à des distributions de tracts et de journaux. On passe rapidement aux sabotages, en particulier contre les trains et voies ferrées, dont le jeune Maurice a vite appris les procédures.

Le 26 janvier 1944, les Allemands lancent une de leurs opérations de ratissage sur Montélimar. Les services de police capturent d’abord René Brun, 17 ans. À 20 h 15, alors qu’il distribuait des tracts rue du général Charreton à Montélimar, il est surpris par une patrouille de feldgendarmes allemands. Pendant ce temps, Reichert, l’interprète et chef de la Gestapo, appréhende à son domicile Henri Chapus, 17 ans lui aussi. Peu avant minuit alors que toute la famille est au lit, Reichert, se présente au domicile des Bochaton, quartier de la Rochelle à Montélimar, accompagné d’une dizaine de gendarmes allemands. Le jeune Raymond parvient à s’échapper, sa petite taille lui permettant de plonger à travers les jambes d’un soldat. La petite Simone s’est réfugiée dans les bras de sa mère. Mais les Allemands emmènent le père, René, et son fils aîné, Maurice. Les quatre hommes se retrouvent au siège de la Feldgendarmerie, à l’hôtel du Parc où Reichert leur fait subir plusieurs interrogatoires durant toute la nuit et la matinée du lendemain. Un Allemand l’assiste, le cuisinier du Feldpost semble-t-il, qui leur assène de violents coups de poing et de nerfs de bœuf. Maurice s’évanouit, ce qui lui procure un petit répit. Mais ce n’est que le début du calvaire. Le père Bochaton sera déporté à Mauthausen dès le début avril.
Les trois jeunes gens, jugés le 15 mai par la Cour spéciale de Lyon et condamnés à trois mois de prison et à 300 francs d’amende pour diffusion de tracts anti-allemands, devaient être libérés le 17 juin. Mais, le 16 juin, ils sont envoyés au camp de Compiègne par ordre des autorités allemandes et seront déportés. Henri Chapus, René Brun, Maurice Bochaton, expédiés à Dachau, survivront et seront libérés à la fin avril 1945, René Bochaton est envoyé à Mauthausen où il mourra en septembre 1944.

Le 29 février 1944, c’est Joseph Bolla, 40 ans, cultivateur à Savasse, qui se fait prendre. Le 8 mars 1944, Charles Reboul, 38 ans, né à Marsanne, cantonnier à Montélimar, et Augustine Duc, 37 ans, mariée 3 enfants, remailleuse à Montélimar, sont arrêtés par les Allemands et dirigés sur Montluc. Madame Duc est inculpée de propagande anti-allemande, de détention d’armes, ainsi que de recevoir les responsables et les gars du maquis FTPF (Francs-tireurs et partisans français) du Nyonsais.

Le 17 mars 1944, Antonia Blancard, 42 ans, est prise dans la rue des Quatre Alliances.

Le 28 mars 1944, Marie Giganti est arrêtée à son domicile par des Waffen SS de Viviers (Ardèche). On lui reproche d’avoir ravitaillé les maquis, hébergé des réfractaires, fabriqué de fausses cartes d’identité Elle est conduite dans leur local, emprisonnée, privée de nourriture, menacée d’être pendue ou fusillée, et torturée pendant huit jours. Puis elle est transférée le 4 avril à la Gestapo de Nîmes, ensuite, à la prison des Grandes Beaumettes à Marseille. Le 30 avril, après un dernier interrogatoire à la rue Paradis, elle est relâchée et regagne Montélimar. Le 26 juillet, elle est de nouveau arrêtée par la Milice et la Gestapo, conduite à la Feldgendarmerie de Montélimar, transférée le 28 juillet au siège de la Milice à Valence puis dirigée sur Montluc à Lyon où la libération de la ville lui évitera la déportation. Par contre, son fils, l’ébéniste Roger Giganti, 22 ans, marié 1 enfant, est arrêté le même jour, ainsi que Gaston Sallier.

Le 6 avril 1944, Oscar San Fiori et Mario Baroni, deux Italiens de 25 ans, sous-officiers déserteurs du 5e régiment italien d’Artillerie Alpine, dont on ignore le sort, le 7, Simone Cogne, coiffeuse, résistante de 18 ans, sont, à leur tour, arrêtés par les troupes d’occupation et déportés. Gaston Sallier, 43 ans, sous-chef de secteur aux garde-voies à Savasse, entré en Résistance vers la mi-mars, pris par la Gestapo deux semaines plus tard en gare de Montélimar, était un « garçon animé de toutes les plus belles qualités […] son courage était à toute épreuve. Toujours à l’affût, agent de renseignements précieux, il a participé aux coups de main, sabotages,…», écrit le capitaine d’aviation Vernier, organisateur des groupes de Résistance sur la région montilienne. De Neuengamme, trop affaibli pour être utile, il sera envoyé mourir à Bergen-Belsen.


Auteurs : Robert Serre
Sources : SHGN, rapports R4 Cie Drôme. AD Rhône, 3808 W 313, déclaration de Julia Chapus, mère d’Henri, le 7 février 1945 devant le commissaire de police. AD Rhône, 3808 W 318, dépositions de Brun René et Bochaton Maurice. AD Rhône, 323, 325 (déposition de Giganti Marie). ADD, 132 J 59, 255 W 89, 1920 W. Archives AERD, témoignage du capitaine Vernier. Martin Patrick, La Résistance dans le département de la Drôme, op. cit. Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, les déportés politiques, résistants, otages, nés, résidant ou arrêtés dans la Drôme, éd. Peuple Libre / Notre Temps, avril 2006. Fondation pour la mémoire de la déportation, le Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution 1940-1945, Paris, éditions Tirésias, 2004. tome I, 1 446 pages, tome II, 1 406 pages, tome III, 1 406 pages, tome IV, 1 282 pages. Archives et témoignage de Zina Bochaton. La Picirella, Témoignages…, op. cit. PAF, Pons, Ladet, JO.