Note manuscrite de F. Huet au sujet de l'ordre de dispersion, 23 juillet 1944

Légende :

Note manuscrite de François Huet, Hervieux, rappelant les points essentiels de l'ordre de dispersion du Vercors, donné le 23 juillet 1944 - la présente note date des années 1950

Genre : Image

Type : Document

Producteur : François Huet

Source : © Archives Famille Huet Droits réservés

Détails techniques :

Note manuscrite.

Date document : Années 1950

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Saint-Martin-en-Vercors

Ajouter au bloc-notes

Analyse média

Voici la transcription de l’essentiel du texte :

« Les unités rompront le combat et s’évanouiront dans les zones difficiles et boisées du Massif [où, si l’opération est bien faite l’Ennemi s’efforçera mais en vain de les trouver, ce qui l’amènera à disperser ses forces, à perdre du temps et sans doute à se lasser, alors que l’Isère et la Drôme intensifieront la guérilla sur le pourtour]…

Vous disparaîtrez dans les Coulmes, la Forêt Domaniale, la Forêt de Lente.

Vous vous organiserez par groupes de sections dans les endroits les plus denses et difficiles en dehors des axes. Vous laisserez passer le ratissage ennemi sans vous laisser accrocher – Au cas où vous ne réussissiez pas à l’éviter, vous vous battrez et vous percerez de nuit, soit en masse, soit par petits groupes, vers Chambaran, le Diois, le Trièves. Dès que l’étreinte allemande sera desserrée, vous reprendrez la guérilla à votre initiative dans les Régions (Rencurel, la Balme, Autrans, …, Villard, St Martin, la Chapelle, Royans, loin des villages). Vous vous tiendrez prêt à réoccuper conformément à la mission la Balme, Ecouges, Montaud, St Nizier, Echarasson, Rousset, les Pas.

Vous avez toute initiative et toute ma confiance.

Boîte aux lettres : Pétouze, Sarna, Rimet, où j’irai dès que je pourrai. Vous me laisserez ce que vous avez décidé et fait.

Mon PC = avec Thivollet – 23 juillet 44 – 16h.

L’intérêt de ce document est de bien préciser l’intention du commandement local pour la dispersion et la suite : rompre le combat et « s’évanouir » dans les zones boisées par groupes de sections, « laisser passer le ratissage ennemi », « sans se laisser accrocher », « reprendre la guérilla » ensuite dans le massif et le Royans et « se tenir prêt » à « réoccuper » les lieux « conformément à la mission ».

« L’Isère et la Drôme intensifieront la guérilla sur le pourtour ». L’idée est donc bien de laisser passer l’orage, en vue de reprendre le combat sous forme de guérilla – et si nécessaire d’être prêt à reprendre la mission.

Ce texte résume bien le dilemme auquel ont eu à faire face les chefs locaux : se comporter comme une troupe en combat classique pour tenir le terrain, en attendant un débarquement allié aéroporté sur le plateau, conformément au plan Montagnards, se comporter comme un groupe de maquisards en guérilla, comme la situation l’impose.

Incidemment, on notera les boîtes aux lettres citées (quelle est leur matérialité ?) concernant le secteur-nord (Costa de Beauregard, Philippe, Dufour…), le secteur-centre (Goderville) et le secteur-sud (Narcisse Geyer, Thivollet, et Marcel Descour).


Philippe Huet

Contexte historique

Le débat sur l’inadaptation du dispositif militaire du Vercors à une tactique de « faible au fort » qui semblait s’imposer trouve ici un éclairage : les militaires s’estimaient véritablement liés par la mission « Plan Montagnards ». Lorsqu’ils se sont sentis « abandonnés », au moins provisoirement, ils ont opté pour le retour au maquis, ce qui - malgré de trop nombreuses tragédies - a sauvé le plus grand nombre d’entre eux. Il y a eu à ce sujet d’ailleurs, fin juillet, une divergence d’appréciation entre Descour, qui souhaitait une rapide reconquête des lieux, et Huet, qui l’estimait prématurée et qui eut gain de cause.

Il faudrait à cet égard comprendre pourquoi Descour, chef de toute la Région R1, n’imposait qu’en Vercors une telle attitude. La seule explication semble être qu’il était absolument convaincu de la réalité de l'application du plan Montagnards. 

 

Pour en savoir plus :

La dispersion - essai de synthèse (P. Huet)


Auteur : Philippe Huet

Sources :
 

Note dactylographiée du Général Le Ray "Le Vercors est une grande page d’histoire" (1972-1994).

Archives Famille Huet - Journal de marche du 11e régiment de Cuirassiers, juillet 1944 - 1951.