Marcel André

Légende :

Marcel André, Antoine, MUR-MLN, membre du CDL des Basses-Alpes, sans date

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © ANACR de Marseille Droits réservés

Détails techniques :

Scan de photographie analogique en noir et blanc. Voir aussi l'album photo lié.

Date document : Sans date

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Var - Signes

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Contexte historique

Marcel Joseph André naquit le 25 février 1900 au domicile familial du petit hameau de La Conche, commune d’Enchastrayes, dans le canton de Barcelonnette (Basses-Alpes, aujourd’hui Alpes-de-Haute-Provence), où son père était instituteur. Après une bonne scolarité dans le primaire, il fut pensionnaire au cours complémentaire de Seyne-les-Alpes (Basses-Alpes), puis se prépara au métier d’instituteur, à Digne, à l’école normale du département. Il effectua son service militaire du 7 octobre 1920 au 26 septembre 1922 et fut affecté au 23e bataillon de chasseurs à pied. Nommé caporal le 17 février 1921, il fut renvoyé dans ses foyers avec un certificat de « bonne conduite ».

Il commença sa carrière d’enseignant dans le Nord, à Fourmies, où il se maria le 6 septembre 1924. Il revint toutefois rapidement dans les Basses-Alpes, où il occupa divers postes dans des écoles rurales et habita le hameau de Beaudinard à Esparron-la-Bâtie, celui des Subies à Chateauneuf-les-Moustiers, puis à Vachères et à Villeneuve (commune de Forcalquier). Il fut ensuite directeur de l’école primaire de Sigonce.

Marcel André militait à la fédération socialiste SFIO des Basses-Alpes, dont la majorité, acquise aux positions de Paul Faure, était favorable aux accords de Munich. Il déclara lui-même, le 17 juin 1939, dans Le Travailleur des Alpes, « Paul Faure a vu juste ». Au congrès fédéral SFIO des Basses-Alpes de mai 1939, il fit preuve, comme son ami Louis Martin-Bret, de la plus grande méfiance par rapport aux communistes.

Le 25 août 1939, il rejoignit le centre mobilisateur d’infanterie 154 à Digne. Affecté à la 145e compagnie du 15e train, il partit aux armées le 30 août. Après la défaite, démobilisé par le centre de Digne le 18 juillet 1940, il fut renvoyé le jour même dans ses foyers et se retira à Villeneuve (Basses-Alpes).

Dès que Louis Martin-Bret commença à tisser une trame résistante dans les Basses-Alpes, Marcel André lui apporta immédiatement son concours. Il ne pouvait en être autrement, estime Jean Garcin dans son ouvrage sur la Résistance dans les Basses-Alpes, du fait de ses idées républicaines et de son amitié avec Martin-Bret. Marcel André, Antoine, contribua activement à la création de Combat puis des Mouvements unis de Résistance (MUR) dans le département. Il occupa rapidement des responsabilités et, en 1943, il fut en charge des effectifs de l’Armée secrète (AS), ainsi que l’indique le chef de celle-ci, Jean Vial. Marcel André participa aux rencontres organisées en 1944 entre l’AS et, d’une part, l’Organisation de Résistance de l’armée (ORA) et, d’autre part, les communistes (Front national et FTPF). Après la fusion AS-ORA, il reçut la responsabilité civile de l’un des cinq secteurs du département, celui de Manosque-Forcalquier. Avec l’accord du courant communiste, il représenta la CGT au Comité départemental de Libération (CDL).

En mai-juin 1944, les responsables du CDL et de l’AS, dont Martin-Bret et Marcel André, se réunirent à plusieurs reprises avec le chef de la mission interalliée, arrivé d’Alger, Henry Chanay, Grand Michel. On préparait les actions liées à un débarquement en Provence que l’on croyait tout proche. Le 6 juin, Marcel André annonça au sous-préfet de Forcalquier – sympathisant de la Résistance - que les opérations militaires prévues étaient imminentes. De fait, la Résistance s’empara de Forcalquier dans la nuit du 7 au 8 juin. Mais la répression allemande ne se fit pas attendre. Elle fut féroce à Forcalquier, où 11 résistants furent fusillés, mais aussi sur les autres lieux de l’insurrection (comme le plateau de Valensole) que Maurice André et Martin-Bret parcourent. Après que l’ordre de repli futdonné les 16-17 juin, une réunion entre le CDL et les chefs militaires mit en évidence, au début juillet 1944, les divergences entre les MUR (devenus Mouvement de Libération nationale, MLN) et l’ORA, au sujet de la stratégie militaire, et prit acte de leur rupture.

Le samedi 15 juillet 1944, une réunion du CDL des Basses-Alpes se tint à Oraison avec, entre autres, Marcel André, François Cuzin, Maurice Favier, Émile Latil, Louis Martin-Bret, Jean Piquemal. Certains d’entre eux, dont Marcel André, passèrent la nuit sur place. La réunion du CDL continua le lendemain, dans une salle au-dessus du café de France, géré par Léon Gaubert.

Mais les Allemands, informés de cette rencontre, étaient aussi au rendez-vous. En 1945, lors de l’instruction de son procès, l’homme clé à Marseille du SIPO-SD (la Gestapo), Ernst Dunker-Delage, déclara en avoir appris la tenue grâce aux papiers saisis sur un résistant – Georges Cisson en l’occurrence, arrêté à Marseille le 12 juillet - et déchiffrés. Le SD de Marseille fut donc à l’origine de l’intervention à laquelle il participa et qui fut soigneusement préparée. Les occupants utilisèrent, pour arriver à leurs fins, une unité de Brandebourgeois. Déguisés en maquisards, comme ils avaient coutume de le faire, ils simulèrent dans la matinée du 16 juillet des combats avec des soldats allemands – arrivés dans la localité quelques jours auparavant - et firent accroire à la population une libération du village. L’objectif était, évidemment, d’identifier le maximum de dirigeants de la Résistance. Dans l’après-midi, mettant fin à cette mauvaise comédie, ils arrêtèrent plusieurs membres du CDL et d’autres résistants.

Comme ses camarades du comité départemental de Libération, Marcel André fut transféré à Marseille, puis fusillé à Signes le 18 juillet et enterré, de manière sommaire, avec 28 autres victimes dans la « première fosse ». Sa dépouille, transportée le 17 septembre à la morgue du cimetière Saint-Pierre à Marseille (cercueil 422), fut parmi les 32 premières identifiées. Le médecin légiste constata l’éclatement de l’occipital, des pariétaux et du maxillaire supérieur.

Après les obsèques nationales célébrées pour l’ensemble des martyrs de Signes au cimetière Saint-Pierre, le 21 septembre 1944, Marcel André fut inhumé à Sigonce. Le nom de Marcel André figure sur une stèle, avec celui des dix autres résistants arrêtés le 16 juillet, à la sortie nord d’Oraison et, à Manosque, sur le monument « Aux martyrs de la Résistance dans les Basses-Alpes », dans la longue liste des victimes de la répression classées par villes et villages (emplacement dédié aux résistants de Sigonce). Une plaque a été apposée dans la salle de cours de l’école primaire de cette localité dont Marcel André avait été directeur. Son nom a également été donné au collège de Seyne-les-Alpes, ainsi qu’à une avenue à Forcalquier. Marcel André fut reconnu Mort pour la France.


Auteur : Robert Mencherini

Sources : Actes de naissance et de décès ; DAVCC Caen, 27 P 244, «Bouches-du-Rhône, charnier de Signes, Procès-verbaux d’enquête, exhumations » Vérité, organe du mouvement de libération nationale, 1944-1945, en particulier, les numéros 1 et 42 ; La Liberté des Basses-Alpes, organe du CDL des Basses-Alpes,   n° 5, 30 septembre 1944 ; Jean Garcin, De l’armistice à la Libération dans les Alpes-de-Haute-Provence, 17 juin 1940-20 août 1944, Digne, Imprimerie Vial, 1983, rééd. 1990, p. 351 et sq. ; Jean Vial, Un de l’AS bas-alpine. Souvenirs d’un résistant, Marseille, Chez l’auteur, imprimerie Villard, 1947, 3e rééd., Imprimerie Villard, 1990, p. 214-218 ; Thérèse Dumont, Jean-Marie Guillon, Gilles Morin, notice in Maitron-en-Ligne ; Jean-Christophe Labadie, La répression allemande. Basses-Alpes 1943-1944, Digne, archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, 2014, pp. 121-125 et recueil documentaire, pp. 20-21 ; Simone et Jean-Paul Chiny, La Résistance et l’occupation nazie à Marseille, Marseille, comité de l’ANACR, 2014 ; Commission départementale de l’information historique pour la paix, Le Mémorial de la Résistance et des combats de la Seconde Guerre mondiale dans les Basses-Alpes, Digne, 1992 ; Hélène Vésian, Claude Gouron, Les chemins de la liberté, sur les pas des résistants de Haute-Provence, ADRI/AMRID, 2004.