Lucien Barthélémy

Légende :

Lucien Barthélémy, Berthon, membre du réseau Brutus et chef régional de l'organisation La France au Combat, sans date

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © ANACR de Marseille Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc. Voir aussi l'album photo lié.

Date document : Sans date

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Var - Signes

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Contexte historique

Lucien Louis Alphonse Barthélémy naquit le 8 octobre 1903 à Castelnau-de-Guers (Hérault) et fut l’aîné d’une fratrie qui comptait deux autres garçons : Georges, né en 1906 et Louis, né en 1912. Divorcé, puis remarié, il exerçait la profession d’agent commercial. Engagé politiquement, il était vice-président du Parti radical-socialiste des Bouches-du-Rhône.

Lucien Barthélémy entra en Résistance en février 1941 et, sous le pseudonyme de Berthon, fut membre du réseau Brutus, dont les responsables à Marseille étaient les avocats André Boyer et Gaston Defferre. L’organisation était à fort recrutement socialiste, tout comme La France au Combat, mouvement dont il fut chef régional. Il s’occupait en particulier de recueillir des renseignements qu’il faisait parvenir à Londres. Se sentant menacé par les services allemands, il se replia quelque temps hors de Marseille, avec ses frères, puis regagna la cité phocéenne en juin 1944.

Lucien Barthélémy fut arrêté, ainsi que son père, le 12 juillet, dans la boutique de Charles Boyer, à Marseille, rue de La Palud, transformée en souricière. Charles Boyer lui avait écrit, sous la contrainte, une lettre lui fixant rendez-vous dans celle-ci. Frappé et menotté, Lucien Bartélémy fut immobilisé. Son père qui tentait de le secourir fut arrêté à son tour. Une voiture vint les chercher pour les emmener rue-Paradis, au siège du SIPO-SD. Mais une alerte aérienne contraignit le chauffeur à se réfugier dans un abri souterrain sur la Corniche. Là, Lucien Barthélémy fut battu très durement. Il fut ensuite conduit avec son père au siège du SIPO-SD, 425 rue-Paradis, et tous deux furent incarcérés dans deux cellules différentes. Lucien Barthélémy en fut extrait, emmené en salle d’interrogatoire et malmené de nouveau. Dans la soirée, menottés deux par deux, ils furent transférés à la prison des Baumettes où le père et ses deux fils, Lucien et Georges, partagèrent la même cellule.

Lucien Barthélémy apparaît sous le numéro 5 dans le « rapport Antoine », où Ernst Dunker-Delage, homme clé de la section IV du SIPO-SD (la Gestapo), établit le bilan des arrestations qui conduisirent aux exécutions de Signes. Dans le registre de saisies de la police de sécurité allemande (SD) de Marseille – où le jour d’inscription ne correspond pas nécessairement à la date d’entrée - il figure, ainsi que son frère Georges, page 124 sous le numéro 904, à la date du 10 août 1944, comme Widerstand Chef (chef de la Résistance). Il était en possession lors de son arrestation de 163 295 francs qui furent saisis.

Son père demeura aux Baumettes jusqu’au 31 juillet 1944, puis fut relâché, mais Lucien Barthélémy fut fusillé à Signes avec son frère le 18 juillet et enterré, de manière sommaire, avec 28 autres victimes dans la « première fosse ». Sa dépouille, transportée le 17 septembre à la morgue du cimetière Saint-Pierre à Marseille (cercueil 721), fut parmi les 32 premières identifiées. Le médecin légiste constata qu’un projectile, pénétrant au niveau du nez, avait provoqué l’éclatement de l’occipital. Son corps fut reconnu par son père et Édouard Lieutier, président du Parti radical-socialiste dans les Bouches-du-Rhône.

Le conseil municipal de Marseille décida, dans sa séance du 19 juillet 1945, de donner le nom des « Trois frères Barthélémy » au boulevard-des-Minimes, dans le 6e arrondissement de Marseille. Une plaque rappela qu’ils avaient été « lâchement assassinés par la Gestapo, les 11 et 18 juillet 1944 ». Les frères Barthélémy ont été reconnus internés résistants et Morts pour la France.


Auteur : Robert Mencherini

Sources : Actes de décès ; DAVCC Caen, dossier de mort pour la France, Lucien Barthélémy, 21P 421 690 ; DAVCC Caen, 27 P 244, « Bouches-du-Rhône, charnier de Signes, Procès-verbaux d’enquête, exhumations » ; DAVCC Caen, 27 P 45, registre de saisies de la police de sécurité (SD), Marseille, commencé le 14 juin 1943 (avec jour d’inscription : Tag der Eintragung) ; archives nationales 72 AJ 104, AIII, le Kommandeur de la SIPO et du SD de Marseille, « Rapport final sur l’identification d’un groupe de Résistance de Marseille par le Kommandeur de Lyon dans l’affaire “industriel”. L’affaire Antoine », Marseille, 11 août 1944 ; archives départementales des Bouches-du-Rhône, 58 W 20, Interrogatoire de Dunker par le principal chef de la BST, à propos du rapport Antoine, 9 juillet 1945 ; archives de la ville de Marseille, extrait des registres de délibérations du conseil municipal, séance du 19 juillet 1945 (dossier 44U) ; presse quotidienne régionale, septembre 1944 ; Vérité, organe du mouvement de libération nationale, 1944-1945, en particulier, les numéros 1, 21, 42 ; Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille, Marseille, Éd. Jeanne Laffitte, rééd. 2001, p. 49-50 ; Madeleine Baudoin, Témoins de la Résistance en R2, intérêt du témoignage en histoire contemporaine, thèse de doctorat d’État, Université de Provence, 1977 ; Madeleine Baudoin, Histoire des groupes francs (MUR) des Bouches-du-Rhône, de septembre 1943 à la Libération, Paris, PUF, 1962 ; Jean-Marc Binot et Bernard Boyer, Nom de code : Brutus. Histoire d’un réseau de la France Libre, Paris, Fayard, 2007 ; Simone et Jean-Paul Chiny, La Résistance et l’occupation nazie à Marseille, Marseille, comité de l’ANACR, 2014, p. 294 ; Jean-Marie Guillon, notice in Maitron-en-ligne ; Robert Mencherini, Midi rouge, Ombres et lumières. Histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône, 1930 - 1950, tome 3, Résistance et Occupation, 1940-1944, p. 487, tome 4, La Libération et les années tricolores, Paris, Syllepse, 2014, pp. 58-60.