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Attribution du Mérite indigène du Cameroun au colonel Leclerc, 24 avril 1941

Légende :

Lettre de Pierre Cournarie, gouverneur du Cameroun depuis novembre 1940, attribuant le mérité indigène de 1ère classe à titre exceptionnel au colonel Leclerc, signée à Douala le 24 avril 1941.

Au verso, vue de l'avers du Mérite indigène du Cameroun (source : La Phalère)

Genre : Image

Type : Lettre

Source : © Musée de la Libération de Paris – musée du général Leclerc – musée Jean Moulin Droits réservés

Détails techniques :

Document dactylographié sur papier à en-tête du Gouverneur du Cameroun

Date document : 24 avril 1941

Lieu : Cameroun

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Analyse média

Le 24 avril 1941, à Douala (Cameroun), Pierre Cournarie, gouverneur du Cameroun, décerne au nom du Cameroun, la médaille de 1ère classe du Mérite indigène au colonel Philippe Leclerc de Hauteclocque,  alors commandant militaire du Tchad basé à Fort-Lamy. 

En juin 1940, Pierre Cournarie est en résidence à Maroua, commandant la très importante région du Nord Cameroun, à la tête de laquelle il était placé depuis janvier 1939. Dès le premier jour, il refuse d'accepter une défaite qui pour lui, officier de 1914-1918, apparaît trop démesurée pour être acceptable et il se préoccupe, en liaison avec le Gouverneur Général Félix Eboué, alors gouverneur du territoire du Tchad, des moyens de continuer la lutte. Tout naturellement, le 27 août 1940, il rallie le général de Gaulle et la France Libre, entraînant derrière lui l'ensemble des Européens et des populations africaines du Nord du Cameroun. Mais, dès septembre 1940, le général de Gaulle l'appelle à Douala pour remplir, auprès du colonel Leclerc, les importantes fonctions de Secrétaire général du Territoire. Lorsque en novembre 1940 Leclerc quitte le Cameroun pour prendre le commandement des troupes du Tchad, il le remplace en qualité de Gouverneur et de Haut Commissaire. A ce haut poste il se préoccupe essentiellement de mettre le territoire du Cameroun totalement à la disposition de la guerre, jouant une action capitale sur les lignes arrières africaines, à l'appui des unités qui se forment peu à peu et qui montent aux combats.

La décoration est attribuée à Leclerc à titre exceptionnel "pour les immenses services depuis le 27 août 1940". En effet, le 6 août 1940, envoyé en Afrique équatoriale française (AEF), avec Claude Hettier de Boislambert et René Pleven, par le général de Gaulle, Leclerc quitte l'Angleterre pour le Cameroun. Il a pour mission de ramener le territoire dans la guerre et, le 27 août 1940, à Douala où il a débarqué la veille en pirogue avec 22 hommes, il reçoit le ralliement du territoire à la France libre et en est nommé ensuite Commissaire général.

La lettre comprend le texte de la citation attribuant le Mérite indigène et rappelle en guise de conclusion la valeur symbolique de cette décoration, marque du profond respect du peuple camerounais envers Leclerc : "APrès la Victoire, la Patrie reconnaissante vous décernera des marques de gratitude beaucoup plus grandes ; mais les Camerounais savent que celle-ci - malgré son peu d'importance - gardera à vos yeux toute la valeur que lui donnent les sentiments d'affectueux respect que la population toute entière du pays a voué à son ancien chef".


Fabrice Bourrée

Sources :
Musée du Général Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris - Musée Jean Moulin
Archives de l'Ordre de la Libération

Contexte historique

Le 24 avril 1924, par arrêté, le Commissaire de la République au Cameroun instituait dans les territoires placés sous sa direction un ordre, dit « Ordre pour le Mérite indigène », réservé aux originaires du Cameroun possédant le statut d'administré sous mandat de la France. L'ordre, géré par un conseil d'administration, comprenait trois classes, dont les insignes et le brevet étaient remis gratuitement aux titulaires. Cette distinction honorifique était uniquement destinée à récompenser les indigènes qui ont effectivement collaboré à la mise en valeur du territoire. Elle ne pouvait être considérée comme une récompense politique, mais comme une sorte de mérite agricole, et n'être que la consécration d'un effort producteur durable, révélant chez son auteur un sens économique à développer et à encourager. Cette distinction avait surtout pour but de créer au Cameroun, une sorte « d'élite terrienne » contribuant, par son activité, dans le domaine de la production vivrière ou dans celui de la cueillette, au développement du pays.

Selon l'arrêté du 20 juin 1928, "aucun européen ou européenne ne peut être admis dans l'ordre du Mérite Indigène autrement qu'à la troisième classe et s'il ne réunit, en outre de services exceptionnels rendus à la cause de la colonisation, un minimum de 2 années de séjour au Territoire. Nul ne peut être promu à la 2e classe s'il ne réunit trois années de séjour au Territoire dans la troisième classe. Nul ne peut être promu à la 1re classe s'il ne réunit trois années de séjour au Territoire dans la 2e classe". L'attribution de cette décoration au colonel Leclerc est donc tout à fait exceptionnelle. 

En 1946, il est transformé en "ordre pour le Mérite Camerounais" et conservé par la République du Cameroun après son accession à l'indépendance. Il est aujourd'hui divisé en trois classes, et occupe la deuxième place dans la hiérarchie des ordres nationaux.


Fabrice Bourrée

Sources :
Site de Marc Champenois - http://www.france-phaleristique.com
J.O. des Territoires du Cameroun du 15 juillet 1928 - N° 195 - Page 430