René Neyrand

Légende :

René Neyrand, ici en uniforme des Chantiers de Jeunesse, vers 1943

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Collection Gaston Rey Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc.

Date document : Circa 1943

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Saint-Rémy-de-Provence

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Né le 15 octobre 1923, à l’hôpital de la Charité, dans le 2e arrondissement de Lyon (Rhône), au numéro 1 de la rue du même nom, René Neyrand est le fils d’Ismaël, Henri, Alfred Neyrand, employé, né le 28 octobre 1895, dans la commune de Rocher, canton de Largentière (Ardèche) et de Françoise Genevrier, née à Lyon (1er arr.), le 3 mai 1906. Ses parents, mariés le 8 septembre 1923 à la mairie du 1er arrondissement de cette ville, habitent Caluire-et-Cuire (Rhône), 2, montée des Forts. 

Employé de banque, René Neyrand est mobilisé en 1943, aux Chantiers de jeunesse, à Villard-de-Lans (Isère) où est établi le groupement 11, « Vercors », qui dépend de Lyon. Mais ce dernier est dissous fin septembre 1943, du fait de la restructuration des Chantiers de la zone Sud. René Neyrand et un certain nombre de ses compagnons sont mutés en Vaucluse, dans le groupement 150. Celui-ci avait été créé en octobre 1943, après la dissolution du groupement 13, « Bonaparte », qui rayonnait autour de l’important dépôt régional de Cavaillon et sur une partie du Luberon.

Affecté au service transports du groupement 150, René Neyrand y fait la connaissance de Gaston Rey, démobilisé de la Marine nationale et employé civil des Chantiers de jeunesse comme comptable. Membre du groupe de l’Armée secrète (AS) de Gordes (Vaucluse), il lui propose de rejoindre la Résistance et lui fait rencontrer, dans un café de Cavaillon, le responsable AS de Gordes, Paul Nouveau.

René Neyrand utilise sa fonction au sein des Chantiers pour établir des certificats de démobilisation en faveur de nombreux réfractaires au STO. Il organise également, avec Gaston Rey, des opérations de « récupération » de matériel par la Résistance. En février 1944, plusieurs véhicules, chargés d’outillage, de pneus, et de bidons d’essence, sont ainsi dérobés avec la complicité de Christian Bringay, transféré lui aussi de Villard-de-Lans, et mécanicien au garage des Chantiers de Cavaillon.

En juin 1944, au moment du débarquement en Normandie, les deux jeunes hommes doivent rejoindre le maquis. Mais René Neyrand, arrêté, fait défaut. Une croix de Lorraine miniature accrochée à son bracelet-montre l’aurait trahi alors qu’il consommait au Grand café d’Orient à Cavaillon. Son arrestation est le fait de légionnaires de la 8e compagnie Brandebourg, spécialisée dans la chasse aux groupes armés, dont un groupe, installé à Cavaillon est sur le pied de guerre depuis le 6 juin. René Neyrand est emprisonné et torturé dans le garage de l’hôtel Splendid qui sert de prison aux brandebourgeois. Selon plusieurs courriers de son père, envoyés à la justice en 1945, et un témoignage de Gaston Rey, René Neyrand aurait été arrêté le dimanche 11 juin 1944 vers 19 heures. Mais, selon le Saint-Rémois Marcel Bonnet, c’est au cours de la nuit du 9 au 10 juin 1944, que les résistants retenus dans la boulangerie de La Galine, découvrent le jeune homme – qu’ils ne connaissaient pas – au fond du fourgon qui les conduit vers leur lieu d’exécution. Reproduisant un modus operandi qui leur est familier, les légionnaires Brandebourg auraient emmené René Neyrand de Cavaillon à Saint-Rémy, lors de leur raid contre les résistants du quartier de La Galine, le 9 juin 1944. L’hypothèse d’une arrestation de René Neyrand le 11 juin 1944 implique, en revanche, un transfert postérieur à cette opération et à l’exécution des six résistants saint-rémois, soit entre le 11 et le 13 juin, date à laquelle leurs dépouilles (et celle du jeune homme) sont découvertes. Ce qui est possible, mais nullement attesté.

Le corps de René Neyrand est découvert, avec les cadavres de Pierre Barriol*, Charles Gras*, et Delfo Novi*, le 13 juin 1944, à Lamanon, quartier de la Baptistine, entre la voie ferrée Miramas-Cavaillon et le canal des Alpines. Dépourvu de tout papier, abattu d’une balle dans la nuque, il est vêtu d’une veste marron, d’une chemise à rayures fines bleu et rouge, d’un pantalon de golf gris, chaussé d’un seul soulier et porteur d’une chevalière avec les initiales NR. Un officier allemand se présente dans la soirée à la mairie de Lamanon et exige l’inhumation immédiate des quatre dépouilles, sans attendre l’arrivée du procureur de la République. René Neyrand, inhumé à Lamanon, est d’abord porté comme inconnu sur l’acte de décès. Il ne tarde pas toutefois à être identifié, et, le 5 juillet 1944, une assistante des Chantiers prévient ses parents de son décès. Ces derniers effectuent, avant et après la Libération, plusieurs voyages à Lamanon, Gordes et Cavaillon. Finalement, le corps de René Neyrand est transféré dans le carré militaire du cimetière de Caluire.

Son nom est gravé sur le monument aux morts de cette commune et sur la stèle érigée entre Sénas et Lamanon, le long du canal des Alpines. René Neyrand obtient la mention « Mort pour la France ». Paul Nouveau, dans une attestation du 1er octobre 1944, rend hommage à René Neyrand  qui « a toujours donné un exemple de sang-froid et d’audace, toujours prêt à servir et il est mort en brave, digne de son pays et de son idéal, pour lesquels il a donné ses vingt ans ».


Auteur : Robert Mencherini

Sources :

Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 76 W 129, rapport du sous-préfet des Bouches-du-Rhône au préfet, 14 juin 1944 ; 76 W 129, rapport du commandant de la section de gendarmerie d’Arles,16 juin 1944 ; 

Archives départementales du Gard, 3U7, article 252, dossier Paolino Honoré ; Entretien avec Gaston Rey et documents mis à disposition par ce résistant ;

Louis Coste, La Résistance en pays d’Apt, Cavaillon, Imprimerie Mistral, 1971, réed. 1982 et 2001 ;

Casimir-Pierre Mathieu, La résistance à l’oppression, la première et deuxième guerre mondiale, La Résistance, Chez l’auteur, Cavaillon, Imprimerie Mistral, 1978 ;

Marcel Bonnet, « Le massacre de “La Galine”, 9-10 juin 1944 », Revue de l’Amicale laïque de Saint-Rémy-de-Provence, 1984, reproduit (avec des documents) in Marcel Bonnet, Le massacre de “La Galine”, 9-10 juin 1944, présenté par André Bonafos et par Rémy Bonein (chef de groupe du quartier de la Galine 1940-1943), Eyrargues, Édition espace culturel Eyrarguais, 1991 ;

Jean Giroud, Cavaillon se souvient, 1939-1945, Cavaillon, Imprimerie Rimbaud, 2008 ;

Gaston Rey, Souvenirs des années noires de la guerre à Gordes, village martyr. Les femmes de Gordes dans la bataille : réflexions, Chez l’auteur, Cavaillon, Imprimerie Rimbaud, 2009 ;

Robert Mencherini, Résistance et Occupation (1940-1944), Midi rouge, Ombres et lumières. Histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône, 1930 - 1950, tome 3, Paris, Syllepse, 2011 ;

Robert Mencherini, notices de La Galine, lieu d’exécution, et biographies des victimes, Dictionnaire Maitron des Fusillés (et site Internet du Maitron en ligne) ;

État-civil.