Ferme d’Ambel dans le Vercors

Légende :

C’est dans la ferme d’Ambel que se sont cachés les premiers réfractaires et que s'est formé ensuite le camp 1.

Genre : Image

Type : Carte postale

Producteur : Inconnu

Source : © AERD, collection Robert Serre Droits réservés

Détails techniques :

Carte postale en noir et blanc.

Date document : 1908

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Omblèze

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Analyse média

La ferme d’Ambel où a été reconstruit un refuge pour randonneurs est à 1 222 mètres d’altitude. Elle est très isolée.

À l’arrière du bâtiment, on voit la forêt qui était exploitée par les réfractaires-bûcherons. La maison forestière est assez vaste pour accueillir plusieurs dizaines de personnes, elle comporte des bâtiments annexes pour l’exploitation. L’été, les prairies qui s’étalent devant la maison sont occupées par des troupeaux en estive.


Auteurs : Jean Sauvageon

Contexte historique

Dans cette ferme près du col de la Bataille (1 313 m), s’implante début 1943 le premier camp de réfractaires du Vercors, le C1. S’il n’est peut-être pas « le premier maquis de France » comme on l’a dit par la suite, le C1 est sans doute l’un des tout premiers.

Fin décembre 1942, un groupe de 31 réfugiés polonais se cache quelques jours dans la ferme d'une clairière du plateau d'Ambel, au centre d'une vaste exploitation forestière. Ils sont relayés le 6 janvier 1943 par un groupe de huit cheminots de Fontaine, réfractaires au STO (Service du travail obligatoire).
Le site a été reconnu le 17 décembre 1942 par deux résistants, Simon Samuel (frère du docteur Eugène Samuel), de Villard-de-Lans et Louis Brun (1900-1974), cafetier et tourneur sur bois, adjoint au maire de Pont-en-Royans, en quête d'un lieu pour héberger des réfractaires. Difficile d‘accès, aucune route n'atteignant directement le site, la maison forestière a quatre co-propriétaires : Victor Huillier, transporteur, et André Glaudas, marchand de vin, résistants de Villard-de-Lans qui ont eu l'idée d'utiliser ce bâtiment, Gravier (de Briançon) et Guillet (de Grenoble), qui ignorent totalement ce projet. Le résistant Pierre Brunet, garagiste de Pont-en-Royans, embauché comme sous-directeur de l'exploitation, s'occupe des faux papiers et du ravitaillement, en liaison avec Benjamin Malossane, de Saint-Jean-en-Royans. Quant au directeur, Louis Bourdeaux, ancien officier de chasseurs alpins, d'abord à l'écart du projet, il est vite mis dans la confidence et participera activement, sous le nom de "Fayard", à la Résistance locale. Il recrute en février 1943 un jeune ingénieur forestier André Valot ("Stephen") qui participe à l'encadrement du camp.

Les réfractaires qui viennent de Grenoble transitent par Villard-de-Lans et Pont-en-Royans d'où ils sont acheminés à Ambel par Louis Brun, après avoir traversé la Bourne en barque.

D’autres viennent de la Drôme, comme René Robert, de Romans-sur-Isère. Arrêté le 14 janvier 1941, il est interné au camp de Loriol d’où il est libéré le 4 mars suivant. Arrêté une seconde fois, le 10 octobre 1941, et envoyé au camp de Saint-Paul-d'Eyjaux, en Haute-Vienne, d'octobre 1941 au 18 mai 1942. Il peut s'échapper au moment où on venait l'arrêter pour la troisième fois. Il part alors, en octobre 1942, à la ferme d'Ambel.

Un système d‘alerte installé à Bouvante permet de couper l'électricité alimentant la ferme et de provoquer, après trois interruptions successives, la dispersion immédiate de ses habitants. Début 1943, Ambel abrite 85 hommes, mais des raisons de sécurité conduisent à ne garder au "C1" qu'un nombre plus réduit qui travaille à l'exploitation du bois. Quelques armes parviennent au printemps mais seul le parachutage de Darbounouze, dans la nuit du 13 novembre 1943, permet de commencer un véritable entraînement militaire. Début 1944, les Allemands, qui ont besoin de bois pour leurs chantiers, achètent l'exploitation. Cela n'empêche pas la cache et l'entraînement des maquisards de se poursuivre, aux frais de l'occupant qui les paye comme forestiers ! Le 16 avril 1944, la Milice découvre les caches d'armes et brûle la ferme. En juin et juillet 1944, la compagnie "Fayard" participe à la défense et aux combats du Vercors, mais peu de ses combattants ont connu l'époque des débuts du C1. Après la Libération, le domaine d'Ambel est acheté par le conseil général de la Drôme. Un monument commémoratif est inauguré le 23 août 1964 par Benjamin Malossane.

La ferme d’Ambel, isolée dans le Vercors, est devenue un camp de résistants, mais de nombreuses fermes de la Drôme ont accueilli des réfractaires au STO. Ils servaient de main-d’œuvre relativement bon marché, en échange du gîte et du couvert. Encore fallait-il que ces agriculteurs acceptent cette responsabilité d’héberger clandestinement ces jeunes refusant la réquisition et le risque d’être dénoncés. Souvent, après le 6 juin 1944, ces jeunes ont rejoint les maquis.


Auteurs : Gilles Vergnon et Jean Sauvageon
Sources : Dvd-rom La Résistance dans la Drôme-Vercors, éditions AERI-AERD, février 2007.