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Eugène Vandervynckt

Légende :

Portrait d'Eugène Vandervynckt, directeur de l’Ecole nationale d’agriculture de Grignon ; agent du réseau Prosper (Buckmaster, SOE) ; contribue à l'installation d’une antenne du réseau à Grignon avec la complicité du personnel ; arrêté le 10 juillet 1943 par la Gestapo ; déporté à Buchenwald début 1944, puis transféré à Dachau où il meurt.
Au verso, attestation d'appartenance au réseau Prosper. 

Genre : Image

Type : Portrait

Source : © Collection famille Vandervynckt Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en couleur

Lieu : France - Ile-de-France - Yvelines - Grignon

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Contexte historique

Eugène Vandervynckt  est né le 20 juin 1888 d'une mère paysanne et d'un père entrepreneur. Bachelier à seize ans, il entre à l'Ecole d'agriculture de Grignon en 1905. En 1908, diplômé ingénieur agricole, il s'oriente vers l'Ecole du Génie rural qu'il quitte en 1910. Peu de temps avant la Première Guerre mondiale, il est nommé au Service du génie rural à Clermont-Ferrand, puis, par passion de la géologie, il entre au Muséum d'Histoire naturelle de Paris en qualité d'assistant du Professeur Stanislas Meunier. Enfin, il est envoyé à Chaumont en qualité d'ingénieur du Génie rural.

Après la Grande Guerre, il part dans le Nord. Successivement ingénieur puis ingénieur en chef du service rural, il prend une part active à la reconstruction des régions libérées. Il préside à la réalisation des grands travaux d'électrification, d'adduction d'eau et de remembrement du département du Nord. En même temps, il assure un enseignement à l'Ecole nationale des industries agricoles de Douai.

Ayant commencé des études de droit alors qu'il était à Grignon, il cumule le diplôme de Docteur en droit avec celui de licencié ès sciences mathématiques. Sa thèse de doctorat en droit, publiée en 1937, constitue l'un des ouvrages les mieux documentés sur la question du remembrement agricole et de ses conséquences sociales. Ses préoccupations sociales expliquent peut-être le jugement du sous-Préfet de Seine-et-Oise qui voit en lui un " adepte fervent des théories du Front Populaire " (Lettre du sous-préfet à M. le secrétaire général pour la police, 26 juillet 1941, ADY 1W161).

Il accède en octobre 1937 à la Direction de l'Ecole nationale d'agriculture de Grignon après un brillant concours où il avait exposé le difficile problème de l'enseignement agricole en France. Il reste titulaire de ce poste pendant huit ans. Cette fonction de directeur s'interrompt à plusieurs reprises. Tout d'abord, il est rappelé à l'armée en 1938 comme chef d'escadron au moment de l'affaire des Sudètes, puis en 1939 au moment de la mobilisation générale. Fait prisonnier le 13 juin 1940, il est interné à l'Oflag VIII G jusqu'au 1er mai 1941.

De retour à Grignon le 3 mai 1941, il reprend la direction de l'école. En temps que directeur, il réalise une véritable rénovation de l'école. Il réorganise l'enseignement en créant des chaires nouvelles (microbiologie, génie rural…), réaménage les locaux existants (le laboratoire de chimie devient l'un des plus modernes de France), met en place une infirmerie modèle et des cuisines perfectionnées. Il accroît également le domaine d'application de l'Ecole en obtenant la location des terres de la ferme de Frileuse appartenant à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr. D'esprit progressiste, il fait également de Grignon un établissement mixte, ce qui provoque quelques remous.

En qualité de directeur, il s'attache à sauvegarder les récoltes, les troupeaux et les biens de l'Ecole, menacés par l'occupant. Pour les élèves, il se dépense sans compter afin d'éviter leur départ au STO : il multiplie les démarches auprès des autorités départementales et nationales, en organisant leur placement dans des fermes.

Dans le courant de l'année 1943, Eugène Vandervynckt rejoint le réseau Prosper du SOE. En effet, le major Suttil, chef du réseau, décentralisant son réseau, cherche à s'assurer la coopération de nombreux industriels et fonctionnaires. L'Ecole nationale d'agriculture devient donc un second quartier général pour Suttil et ses adjoints qui s'y rendent fréquemment pour y organiser des réunions. Les deux opérateurs radios, Gilbert Norman et Noor Inayat Khan, émettent souvent depuis les serres de Grignon. Un des professeurs de l'Ecole, Alfred Balachowski, devient rapidement le responsable du secteur de Versailles pour ce réseau. Le groupe local de l'Ecole de Grignon organise des réceptions de parachutages d'armes à Bazemont.

Au lendemain de la découverte d'armes le 1er juillet 1943 dans cette localité, la Gestapo effectue une descente à l'Ecole de Grignon. Après avoir fouillé les locaux, les Allemands ont recours à un simulacre de fusillade, mettant en joue le directeur de l'Ecole et une partie du personnel. Au moment où le feu est commandé, Eugène Vandervynckt crie "Vive la France". La salve est tirée en l'air. Les Allemands finissent par se retirer sans avoir rien obtenu. De retour le 10 juillet, la Gestapo découvre dans les dépendances de l'établissement un poste émetteur de TSF et huit parachutes, ce qui provoque l'arrestation du Directeur, du professeur Balachowski, ainsi que de Désiré Maillard, jardinier, et Robert Douilhet, ingénieur agricole et gendre d'Eugène Vanderwynckt.

Après une incarcération à Fresnes, ils sont déportés à Buchenwald au début de l'année 1944. Dans ce camp, Eugène Vandervynckt participe à la constitution du comité clandestin des déportés résistants avec Eugène Thomas, député du Nord, futur ministre des PTT, et Julien Caïn, directeur de la Bibliothèque nationale. Transféré à Dachau, il y décède le 1er mai 1945.

Le 8 novembre 1952, un médaillon à sa mémoire a été inauguré dans le hall de l'Ecole d'agriculture de Grignon.

Décorations :
Officier de la Légion d'Honneur, Croix de guerre 1914-1918 avec palme


Fabrice Bourrée in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.

Sources et bibliographie :
Archives nationales, F1CIII (rapport du Préfet de Seine-et-Oise, juin-juillet 1943).
Archives personnelles de la famille Vandervynckt.
Archives départementales des Yvelines, 1 W 161.
Allocution prononcée par M. Pansiot lors de l'inauguration du médaillon érigé à la mémoire du Directeur Vandervynckt le 8 novembre 1952 (archives famille Vandervynckt).
E.H. Cookridge, Mettez l'Europe à feu, Paris, Fayard, 1968.