Pierre-Jean Lafforgue

Légende :

Pierre-Jean Lafforgue, dit Philippe et Lafargue, services spéciaux

Genre : Image

Source :

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Var - Signes

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Contexte historique

Pierre-Jean Lafforgue naquit le 8 mai 1915 à Bergerac (Dordogne). Fils du général Jules Lafforgue, il s’orienta vers une carrière militaire et fut admis à Saint-Cyr le 1er octobre 1936. Il en sortit sous-lieutenant deux ans plus tard, affecté au 151e Régiment d’infanterie à Metz. Blessé pendant la guerre de 1939-1940, il fut hospitalisé à Toulouse en juin 1940, puis en convalescence jusqu’en août. Le 22 janvier 1941, il s’embarqua de Marseille pour Oran et gagna le Maroc pour rejoindre le 7e Régiment de tirailleurs marocains.

En 1943, démobilisé en France et devenu officier des Eaux et Forêts, il participa, dans les Alpes-Maritimes, au réseau de renseignement clandestin monté par les services spéciaux d’Alger – à partir de cadres de l’armée, de sensibilité giraudiste - dont il prit en charge, à Nice, le poste radio. Suspecté par les autorités d’occupation, il passa dans la clandestinité en 1944, sous le pseudonyme de Philippe, et remplaça à Marseille le responsable du poste Glaïeul, Roger Morange, qui venait d’être arrêté. Le 22 avril, il fut interpellé dans un café proche de la place-Castellane, lors d’un rendez-vous avec deux radios et un inspecteur de la Sûreté nationale, Léon Loiseau, membre du réseau Ajax. Ils furent conduits au siège du SIPO-SD (la Gestapo), 425 rue-Paradis et interrogés. Le nom de Pierre-Jean Lafforgue figure sur le registre de saisies du SD, à la date du 26 avril 1944, page 100, sous le numéro 723, comme coupable de Spionage (Espionnage). Il était en possession de 4 920  francs.

Le cas de Pierre-Jean Lafforgue intéressait particulièrement l’homme clé de la Gestapo à Marseille, Enrst Dunker-Delage, qui avait procédé à son arrestation. Il lui consacra un paragraphe, sous le numéro 25 dans le rapport dit « Catilina » qu’il rédigea le 6 juillet 1944. Désigné par son nom véritable, Lafforgue y est qualifié de « chef régional de l’espionnage giraudiste ». Il fut transmis au BdS (direction centrale des polices allemandes en France) à Paris, ainsi que l’indique le registre du SD de Marseille. Pierre-Jean Lafforgue fut ensuite transféré à Compiègne, d’où un convoi partit le 4 juin vers l’Allemagne. Mais les détenus, dont Roger Morange faisait partie, réussirent à percer la paroi du wagon, à en ouvrir la porte et, dans la Marne, à la hauteur de Vitry-le-François, à sauter du train en marche.

Évadé, Pierre-Jean Lafforgue regagna le Sud-Est et se dissimula sous le nom de Lafargue. Mais, le 19 juin, il fut arrêté de nouveau à Aix-en-Provence. Il fut détenu et interrogé de nouveau au 425 rue-Paradis et inscrit une seconde fois dans le registre du SD de Marseille, page 122 au numéro 885, à la date du 3 juillet 1944, toujours accusé d’espionnage. Il fut ensuite transféré aux Baumettes où il partagea la cellule de François Pelletier.

Le 12 août 1944, Pierre-Jean Lafforgue fut fusillé dans le vallon de Signes avec huit de ses camarades et enterré, de manière sommaire, dans la « deuxième fosse ». Son corps, qui occupa le cercueil 693 lorsque les dépouilles exhumées furent déposées le 17 septembre 1944 à la morgue du cimetière Saint-Pierre de Marseille, a été parmi les premiers identifiés.

Il fut reconnu Mort pour la France et décoré à titre posthume de la Légion d’honneur, de la Croix de guerre avec palme et de la Médaille de la Résistance. Son nom est gravé sur le mémorial des services spéciaux à Ramatuelle.


Auteur : Robert Mencherini

Sources :  Actes de décès et naissance ; DAVCC Caen, dossier de mort pour la France, Pierre-Jean Lafforgue ; DAVCC Caen, 27 P 244, « Bouches-du-Rhône, charnier de Signes, Procès-verbaux d’enquête, exhumations » ; 27 P 45 Livre de saisies de la police de sécurité (SD), Marseille, commencé le 14 juin 1943 (avec jour d’inscription : Tag der Eintragung) ; archives nationales 72 AJ 104, AIII 7 bis, le Kommandeur de la SIPO et du SD de Marseille, « Rapport final (…) Affaire Catilina », Marseille, 6 juillet 1944, signé Dunker, SS Scharführer ; archives départementales des Bouches-du-Rhône, 58 W 56, affaire Loiseau, copie de l’interrogatoire et des révélations de Léon Loiseau à la Gestapo, 23 avril 1944 ; archives départementales des Bouches-du-Rhône, 58 W 20, interrogatoire de Dunker par le principal chef de la BST, à propos du rapport Catilina, 8 juillet 1945 ; journal Vérité, organe du mouvement de libération nationale, 1944-1945, en particulier les numéros 1 et 42 ; presse quotidienne régionale, septembre 1944 ; Madeleine Baudoin, Témoins de la Résistance en R2, intérêt du témoignage en histoire contemporaine, thèse de doctorat d’État, Université de Provence, 1977 ; Madeleine Baudoin, Histoire des groupes francs (MUR) des Bouches-du-Rhône, de septembre 1943 à la Libération, Paris, PUF, 1962 ; Simone et Jean-Paul Chiny, La Résistance et l’occupation nazie à Marseille, Marseille, comité de l’ANACR, 2014, p. 311 ; Jean-Marie Guillon, notice in Maitron-en-ligne ; Site des Anciens des Services Spéciaux de la Défense nationale (AASSDN; « Un héros du CE français raconte… Le capitaine Morange du TR 115 », Bulletin de l’Amicale des Services Spéciaux de la défense nationale (AASSDN), n° 135-137 ; Robert Mencherini, Midi rouge, Ombres et lumières. Histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône, 1930 - 1950, tome 3, Résistance et Occupation, 1940-1944, Paris, Syllepse, 2011, p. 489, tome 4.