René Weyland, dit "Général" et "Weygand"

Légende :

René Weyland, dit "Général" ou "Weygand", sans date (probablement hiver 1943)

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Collection M. Serratrice Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc.

Date document : Sans date - hiver 1943 ?

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes)

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Contexte historique

René Weyland est né le 16 décembre 1921 à Esch-sur-Alzette (Grand-Duché du Luxembourg).    
(Etat civil : marié, deux enfants).                                                                                                                                                                                        

René Weyland, jeune Luxembourgeois, travaille au théâtre d’Esch-sur-Alzette comme électricien. Il assiste à l’annexion du Luxembourg par les troupes allemandes, en violation du traité de Londres, puis c’est la déclaration de l’enrôlement forcé dans la Wehrmacht.
Il est rapidement recherché pour activités antiallemandes, comme 531 autres jeunes Luxembourgeois (à cette époque, le Luxembourg compte environ 290 000 habitants). Il quitte le Luxembourg pour rejoindre les mouvements de Résistance de l’Europe occupée.

René Weyland, issu d’une famille francophone, choisit la France (au Luxembourg, l’allemand, le luxembourgeois et le français sont couramment parlés). Il espère rejoindre la frontière espagnole, mais n’y parvenant pas, il apprend qu’un grand maquis est en formation dans le Vercors. Il rejoint le Vercors le 12 mai 1943 et prend le pseudo de Général ou Weygand, en raison de l’analogie phonétique de son nom avec celui du général Weygand.

Il est incorporé au C3 à Gros-Martel, sous les ordres du chef Roméo Secchi, Robert. Le C3 se déplace au lieudit "Les Carteaux", devenu camp d’été du C3, puis à Gève, fin septembre 1943 pour l’hiver. Bricoleur dans l’âme, Weygand rend de multiples services à la communauté maquisarde de son camp : il confectionne des étuis de révolvers avec de vieilles guêtres de cuir et dessine des scènes de la vie quotidienne au camp.

À l’approche de Noël 1943, grâce à l’aide de Paul Collavet, résistant autranais et agent de « Force et Lumière Electriques », une ligne électrique clandestine fut « tirée » sur plus de trois kilomètres entre le C3 et le réseau. Le matériel, câbles et isolateurs, fut fourni par Paul Collavet. Le C3 participa activement à l’installation du câble dans des conditions souvent extrêmes, dues au terrain et aux premières neiges. Weygand, aidé de Ploc, assure la direction des travaux sous le contrôle de l’agent de « Force et Lumière ». Weygand réalisa, toujours avec l’aide de Ploc, l’installation électrique à l’intérieur du bâtiment, « Quand jaillit la lumière dans la maison de Gève, ce fut une véritable ovation qui salua le couronnement de l’ouvrage collectif… Grâce au courant, la magie de la radio fit son entrée dans l’univers confiné du camp, qui fut raccordé au tumulte du monde », rapporte Marc Serratrice dans son livre Avoir 20 ans au maquis du Vercors.

Après l’alerte générale sur le Vercors, déclenchée à la fin du mois de mars 1944, par mesure de sécurité, la plus grande partie des camps quittèrent le Vercors. Le C3 s’installa alors dans la vallée de l’Isère, à l’ouest du Vercors, près du village de La Forteresse. Le 1er mai, à l’aube, le camp de fortune (une ferme abandonnée) est attaqué par une importante colonne de la Milice venue de Voiron. Dès que les miliciens franchirent la butte dominant la baraque, ils ouvrirent le feu alors que la plupart des maquisards étaient en terrain découvert, et que d’autres étaient encore dans la ferme. Weygand, titulaire du fusil-mitrailleur, se replia, se retourna et ouvrit le feu sur les assaillants. Surpris par la riposte, les Miliciens céssèrent le feu un temps suffisant pour permettre aux plus exposés de ses camarades de se mettre à l’abri ; personne ne resta sur le terrain.
Son attitude courageuse lui vaudra cette citation du colonel Descour à l’ordre du bataillon : « Au cours d’une attaque de l’ennemi contre son groupe, le 1er mai 1944, a couvert avec son fusil mitrailleur le repli de ses camarades sous le feu de l’ennemi. La présente citation comporte l’attribution de la Croix de guerre avec étoile de bronze ».

Nommé sergent, Weygand participe avec le C3 incorporé au 6e Bataillon de Chasseurs Alpins (6e BCA), nouvellement reconstitué, au combat de Saint-Nizier-du-Moucherotte, où il est chargé de la garde des falaises du secteur nord, à l’embuscade au col de la Croix-Perrin le 21 juillet, à la Libération de Lyon et de Cervières sur la frontière italienne. Weygand semblait avoir supprimé de son vocabulaire le mot « allemand » qu’il nommait plus volontiers les « Teutons » et leur occupation « invasion teutonne ».

Rendu à la vie civile, René Weyland retrouve son poste au théâtre de Esch-sur-Alzette et adhère à l’Association des Combattants Volontaires Luxembourgeois de la Résistance Française et à l’Association Nationale des Pionniers et Combattants Volontaires du Vercors (ANPCVV). Il devient chef des services techniques du théâtre. Le dessin, passion révélée dans le maquis, devient son violon d’Ingres. Il peint des tableaux inspirés de son expérience dans le maquis du Vercors, puis s’essaye à la sculpture. Son grand projet était la réalisation d’une sculpture monumentale en bronze, haute de 1,90 mètre, qu’il nommera « Les Maquisards ». L’inauguration du monument se déroula à Esch-sur-Alzette, un samedi de juin 1999, place de la Résistance (ancienne place de Brill), en présence de S.A.R. le Grand-Duc Jean. L’emplacement avait été choisi par René Weyland lui-même, face au Musée de la Résistance. Le monument représente deux maquisards face à l’ennemi, l’un touché à mort, l’autre debout, une grenade à la main. Une plaque de bronze est apposée sur son socle avec un texte gravé : « Honneur aux maquisards luxembourgeois refusant la servitude. Ils ont combattu aux côtés des Alliés pour rendre à notre patrie sa liberté, sa dignité et son indépendance entre 1940-1945 ». Dans un courrier privé à l’un de ses anciens camarades du Vercors, il écrira que son monument « les Maquisards » n’était pas seulement dédié aux quelques maquisards luxembourgeois, mais à eux tous… ». [Voir l'album lié.]

René Weyland décède le 20 avril 2002 à Esch-sur-Alzette (Luxembourg).
Il ne verra pas son monument retiré suite au « réaménagement de la place de la Résistance et à la création d’un parking souterrain », dans les années 2012-2013.

Décorations :

Croix de guerre avec étoile de bronze ; Médaille de la France Libérée*, remise à l’Ambassade de France à Luxembourg. 

*La médaille de la France Libérée prit son nom définitif par le décret du 16 juin 1948. Elle fut créée pour récompenser les citoyens français ou étrangers ayant apporté une contribution notable à la Libération de la France.


Auteur : Alain Raffin

Sources :

Dossier individuel et archives de l'ANPCVV.

Archives Marc Serratrice.