Rouge-Midi, 28 août 1944

Légende :

Une du quotidien régional du PCF Rouge-Midi, annonçant la fin prochaine des combats à Marseille, 28 août 1944

Genre : Image

Type : Journal

Source : © Collection Robert Mencherini Droits réservés

Détails techniques :

Document imprimé sur papier journal.

Date document : 28 août 1944

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille

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Analyse média

Le 28 août 1944, la une du quotidien communiste Rouge-Midi annonce en manchette la reddition de la garnison du fort Saint-Nicolas, ainsi que la destruction des batteries de Malmousque. Ces événements militaires partagent la manchette du journal avec la photo de Jean Cristofol, dont le retour à Marseille est ainsi mis en valeur. Jean Cristofol, élu député en juin 1936 puis déchu de son mandat à la suite du Pacte germano-soviétique, revient avec l'armée du général de Lattre de Tassigny.

L'essentiel des articles concerne l'actualité locale, même si les tirs qui émaillent l'arrivée du général de Gaulle à Notre-Dame-de-Paris le  26 août 1944 font l'objet d'un article souligné par la typographie du titreLes cinq photos qui illustrent la une sont toutes liées à la vie marseillaise. Outre la photo de Jean Cristofol et une petite vue du fort Saint-Jean dont la garnison a été anéantie, une photo montre le curé d'Endoume, l'abbé Bonnnefoy, et un jeune FTP se féliciter de la qualité de leur travail en commun tandis que l'article reprend le thème de l'union de tous les patriotes : « Ils organisèrent en un élan commun, du curé au libre penseur, du communiste au modéré, la vie à Endoume. ».
Deux autres photos mettent en valeur le rôle des femmes dans l'aide à la population, et en particulier aux enfants. 

Sous le titre « Le fouet », l'incivisme des Marseillais ajoutant sans vergogne leurs détritus aux gravats causés par les combats est fustigé.
Dans « Une justice à rendre », Roger Lehardon appelle à épurer sans tarder le nom des rues et à redonner à Jean Jaurès, Jules Guesde et Gaston Crémieux leurs rues et places.

Deux articles sont plus politiques. Le communiqué du syndicat CGT des métaux appelle les métallos marseillais à reprendre le travail quand la situation militaire le permettra afin de gagner la bataille de la production et de contribuer à la reconstruction du pays.
« L'esprit et la volonté du peuple » signé par Paul Legrand pose le problème des relations entre commandement allié, armée régulière française et FFI. L'état-major allié a proclamé l'état de siège et entend procéder au désarmement des FFI. Une délégation représentant l'ensemble de la Résistance (CGT, Parti communiste, Parti socialiste, Front national, état-major des FFI, Mouvement de Libération nationale, Forces Unies de la Jeunesse patriotiques et Comité des Femmes de France) proteste auprès du CDL et du commissaire régional de la République. Cette démarche porte ses fruits. Une collaboration FFI-armée régulière est décidée pour effectuer les perquisitions. Par ailleurs, le représentant de l'autorité militaire invite « les soldats au brassard » (les FFI) à rejoindre l'armée régulière. La fin de l'article rappelle au CDL qu'il peut compter sur l'appui sans faille du peuple pour réaliser les réformes que la population attend, ce qui est aussi une forme de mise en garde à l'adresse du CDL.


Sylvie Orsoni

Contexte historique

Le 28 août, la bataille de Marseille est pratiquement achevée. Le 27, les garnisons du fort Saint-Nicolas et de la caserne Audéoud se sont rendues. Les batteries de Malmousque qui pilonnaient la ville ont été détruites. Le général Schaefer, commandant de la 244e division d'infanterie allemande, demande une suspension des combats et accepte le 28, après la parution du journal, l'intégralité des clauses de capitulation. Il faut attendre le 29 août pour que les dernières garnisons allemandes stationnées dans les îles de Pomègues et Ratonneau rendent les armes.

Rouge-Midi est l'organe départemental du Parti communiste français. Il paraît à partir de 1930 à un rythme mensuel, puis bi-hebdomadaire, avant de devenir un quotidien. Interdit à la suite du Pacte germano-soviétique, il est diffusé clandestinement pendant la guerre, ce qui explique que l'édition du 24 août 1944 porte dans le bandeau la mention « quinzième année ». Rouge-Midi est édité dans les locaux de La Marseillaise, cours-du-Vieux Port (aujourd'hui cours-d'Estienne-d'Orves). Le 23 août 1944, un groupe de militants du Front national et des FTPF avait investi les locaux du Petit Marseillais, grand quotidien d'avant-guerre, qui avait activement soutenu le régime de Vichy et la politique de collaboration. La rédaction de La Marseillaise, de sensibilité communiste dans sa majorité, propose de publier aussi Rouge-Midi.


Auteur : Sylvie Orsoni

Sources :

Robert Mencherini, Résistance et Occupation (1940-1944). Midi rouge, ombres et lumières, tome 3. Paris, Syllepse, 2011.

Robert Mencherini, La Libération et les années Tricolores (1944-47). Midi rouge, ombres et lumières, tome 4.Paris, Syllepse, 2014.

1944, La Libération, exposition du Musée d'Histoire de Marseille - 2013.

Sébastien Madau, 24 août 1944, le jour où la Marseillaise est sortie de l'ombre, La Marseillaise, 24 août 2014.