Fanion du camp d'Autun

Légende :

Fanion du maquis "camp d'Autun" composé essentiellement d'enfants de troupes venant de l'Ecole militaire d'Autun repliée à Thol (Ain)

Genre : Image

Type : Fanion

Source : © Collection privée Raymond Peytavi Droits réservés

Détails techniques :

Fanion en tissu.
Photographie extraite du CD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, AERI (à paraître).

Date document : 1943-1944

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ain

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Analyse média

Sur fond blanc encadré par un liseré bleu, le fanion arbore une croix de Lorraine et l'inscription "Camp d'Autun".


Contexte historique

Fin juin 1943, les Allemands chassent l'école des enfants de troupe (EDT) d'Autun du quartier Charreton à Valence, où elle était repliée depuis octobre 1940 ; à la rentrée d'octobre 1943, l'école s'installe au camp de Thol, entre Pont-d'Ain et Neuville-sur-Ain. Le contact est inévitable entre l'école et la Résistance toute proche ; deux événements marquent les jeunes : le défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax et un coup de main du maquis sur le camp.

Les premiers contacts de l'école avec les résistants remontent à décembre 1943 : le cuisinier de l'école, Roger Bonnavent, résistant, favorise la rencontre du responsable des EDT Mazini, dit "Sioux", avec le résistant Gaston Gambier, dit "Augé", de Pont-d'Ain. Malgré l'hostilité de l'encadrement, des sizaines et trentaines sont formées avec les élèves les plus motivés. Des armes provenant d'un parachutage à Belley sont stockées à Neuville-sur-Ain. La date du départ des EDT est fixée au dimanche 6 février 1944, jour de sortie ; Gaston Gambier "Augé" a préparé avec dix hommes la Ferme de la montagne pour les accueillir, mais un contre-ordre arrive en raison de l'attaque allemande. En mars, une nouvelle tentative échoue et c'est au début d'avril, aux vacances de Pâques, qu'un groupe d'une vingtaine d'élèves rejoint Gaston Gambier au maquis.

Jean Signori, dit "Mazaud", ex-caporal du 10e BCP (Bataillon de chasseurs à pied) puis maquisard à Hotonnes et inactif depuis février, obtient sa réintégration comme adjoint de Gaston Gambier, lui-même sous les ordres d'Henri Girousse, dit "Chabot". Les enfants de troupe sont installés sur une colline au sud de Saint-Jérôme et, le 6 avril, un coup de main est réalisé sur le magasin de leur école à Thol. Le 11 avril, les Allemands et la Milice attaquent et tuent "Coco Juhem" ; aux Grangeons de Chiloup, le PC (Poste de commandement) de "Chabot" reçoit l'ordre de se replier en plaine dans les bois de Priay, à la Moutonnière, avec l'aide de Camille Trabbia de l'AS (Armée secrète) locale. Après les vacances de Pâques, six élèves EDT rejoignent leurs camarades au maquis. Puis, le 2 mai, à Thol, trente élèves désertent à 22 heures sous le commandement de Fernand Collignon, dit "Rapace".

La colonne contourne Oussiat, escalade le plateau de Thol et emprunte la vallée du Suran jusqu'au pont sous Varambon où les jeunes sont pris en charge par le maquis et conduits en camion au camp qui compte désormais cinquante-deux enfants de troupe et quatorze civils. Sous les ordres de Gaston Gambier et de son adjoint Jean Signori, six groupes de combat de huit hommes sont formés, chacun doté d'un fusil mitrailleur BREN, de quatre Sten, de trois fusils et de grenades et deux groupes de trois reçoivent un bazooka. Le gouvernement de Vichy décide la fermeture de l'école, les élèves présents sont renvoyés chez eux, et les déserteurs sont exclus.

La première quinzaine de mai est consacrée à l'instruction et à divers coups de main. Dans la nuit du 5 au 6 mai, un parachutage important d'armes se déroule avec succès sur le terrain "Cerf-volant", situé entre Thol et Saint-André, et livré en presque totalité aux enfants de troupe. Le 11 mai, après que le drapeau de l'école d'Autun eut été subtilisé à l'aumônier dans la cure de Pont-d'Ain, une prise d'armes a lieu dans les bois, en présence de Romans-Petit, Richard Heslop, alias "Xavier", Henri Girousse, ainsi que de "Michette" et "Adée", deux jeunes filles agents de liaison. Le lendemain, la compagnie décampe et va s'installer dans les bois à l'ouest de Rossettes.

La première grande mission pour les enfants de troupe est prévue pour la nuit du 6 au 7 juin, alors qu'on ignore que le Débarquement va avoir lieu à cette date : il s'agit de paralyser le trafic ferroviaire à Ambérieu-en-Bugey en plastiquant des locomotives et des installations au dépôt avec l'aide de dix cheminots résistants. Les résistants veulent réussir là où le bombardement allié de mai a échoué. Cette opération très bien préparée n'atteint pas la totalité de ses objectifs car la présence inattendue sur les lieux d'un train allemand en transit complique la tâche des saboteurs, et la grue est partie en dépannage, mais les résultats sont impressionnants et cette action a un retentissement national.

Après le succès du sabotage au dépôt d'Ambérieu-en-Bugey, le groupe est envoyé dans le secteur de Pont-d'Ain pour paralyser le trafic routier. Cantonné à Chenavel, au-dessus de Jujurieux, il attaque des véhicules allemands sur les routes nationales 75 et 84, en compagnie de l'AS (Armée secrète) de Neuville-sur-Ain et d'un groupe d'Espagnols. Etablie à Corlier, l'unité reçoit la mission d'occuper la ligne de défense de Poncin à Jujurieux et d'entraver la circulation par des fossés creusés sur les routes. Le 15 juin, les Allemands attaquant le Valromey, la compagnie Mazaud est envoyée au col de la Lèbe et à Ponthieu pour épauler la compagnie Louison et tenter de reprendre l'entrée du tunnel de Virieu. Les combats font rage, mais Jean Signori doit se replier vers Thézillieu, puis rejoindre Poncin pour reprendre la surveillance des routes.

Le 24 juin, les enfants de troupe repartent pour attaquer les postes allemands du tunnel de Virieu-le-Grand avec la compagnie Lorraine et le groupe franc de "Paul" Bastia (rebaptisé GF "Benoît" depuis la mort de Jean Decomble, alias "Benoît) : à 5 h du matin, l'effet de surprise joue à plein, le tunnel est repris mais on ignore les pertes de l'ennemi. Les 28 et 29 juin, la compagnie "Mazaud" monte des embuscades sur la route Virieu-le-Grand - Hauteville-Lompnès, attaque un poste allemand à Ponthieu puis rejoint le secteur de Corlier. Dès le début de juillet, des concentrations de troupes allemandes font craindre une attaque imminente.

Le 11 juillet, vers 7 heures, une forte colonne allemande arrive par la RN 84 de Pont-d'Ain vers Neuville-sur-Ain, voulant franchir la rivière d'Ain pour gagner Nantua, point de ralliement des unités ennemies. Aussitôt, la compagnie Mazaud, postée sur les hauteurs, ouvre le feu, soutenue par les compagnies Sidi Brahim, Nicole, Girod, Mermoz, le groupe Godard et l'AS de Poncin. Les Allemands utilisant leur artillerie et appuyés par leur aviation sont ralentis dans leur progression jusqu'à midi, puis forcent le passage, obligeant les maquisards à décrocher vers Poncin et Pont-de-Préau, où ils reprennent des positions pour harceler l'occupant. Les enfants de troupe sont durement éprouvés mais se battent héroïquement : René Baril et René Chauchon sont tués, Bernard Gangloff, alias "Popeye" et Yves Mercier, alias "Muchman", blessés et camouflés à la hâte faute de pouvoir être évacués, vont connaître le même sort.

Le 12 juillet, la compagnie Mazaud, qui reçoit l'ordre de se replier sur Mérignat, Monratier puis Corlier, compte cinq morts, trois disparus et quatre blessés. Henri Girousse, dit "Chabot" ayant reçu de "Romans" l'ordre de gagner Arandas, la compagnie Mazaud s'y rend aussitôt ; deux événements heureux se produisent : le 15 juillet, le parachutage de la Chartreuse-de-Portes fournit les premières mitrailleuses et, le 19, les trois disparus rejoignent le camp. Pendant plusieurs semaines, les enfants de troupe restent dans le secteur, se déplaçant à Blanaz, Indrieux, Charvieux, Arandas. Avec l'afflux de volontaires, la compagnie compte alors 110 hommes et deux nouveaux groupes sont créés, dont un PIAT (Projectil Infantry Anti-Tank), nouvelle arme mi-mortier, mi-bazooka. Après le débarquement de Provence, "Romans" ordonne le 25 août à la compagnie de descendre dans la plaine avec pour mission de garder les ponts de Port-Galland et Loyettes et d'occuper Saint-Vulbas. Après l'arrivée des premiers Américains à Loyettes le 29 août, alors que de fortes unités allemandes en retraite pénètrent dans l'Ain, les enfants de troupe sont envoyés à Meximieux sous les ordres du lieutenant Colin pour occuper le séminaire.

Le 1er septembre, ils sont emmenés en camions au camp de la Valbonne où ils doivent relever la compagnie Girod, aidés par la 5e compagnie FUJP (Forces unies de la jeunesse patriotique) de Gérard Sotton, alias "Philippe", et les Américains. Là, la situation se dégrade très vite : l'artillerie allemande pilonne les positions des maquisards qui tentent vainement de riposter avec leurs mitrailleuses. Alors que le repli commence, un obus explose sur un hangar où les enfants de troupe récupèrent leurs sacs : la compagnie compte onze morts et quinze blessés qu'il faut évacuer dans des conditions difficiles. Jean Signori et vingt hommes foncent vers Meximieux, "Rapace" et trente autres vers Port-Galland. Avec d'autres maquisards, la compagnie "Mazaud" termine la bataille de Meximieux,  assiégée dans le séminaire, sous les ordres du lieutenant Colin qui refuse de se rendre. L'arrivée de renforts américains dans la nuit du 1er au 2 septembre permet la cessation des hostilités : les blessés sont évacués vers l'hôpital américain de Rives (Isère), alors que les rescapés se replient sur Vaux.

Après avoir gardé les ponts de Loyettes et de Port-Galland jusqu'au 16 septembre, la compagnie Mazaud est intégrée au 1er bataillon de l'Ain qui, commandé par le capitaine Colin, se rend via Aiguebelle vers le front des Alpes. Le 20 novembre, les plus jeunes des enfants de troupe reçoivent l'ordre de regagner Autun pour y terminer leurs études.

L'Ecole reçoit plusieurs distinctions : Croix de guerre avec palme, Médaille de la Résistance avec rosette.


Auteur : Claude Morel, in CD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, AERI (à paraître).