Départ de maquisards pour un coup de main

Légende :

Photo probablement prise en janvier 1944.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Collection privée Pierre Marcault Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique noir et blanc

Date document : Janvier 1944

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ain

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Analyse média

Les 13 septembre et 31 octobre 1943, des directives émanant du Commandement régional Maquis sont données aux Etats-majors départementaux de la R1 pour occuper et motiver les jeunes des camps : les chefs doivent les préparer aux combats à venir. Après une période de mise en condition physique par des marches répétées, on recommande l'entraînement des maquisards aux coups de main. Ces opérations sont indispensables car les jeunes manquent de vêtements, de vivres, de matériel, alors que l'hiver approche. D'autre part on constate que l'action est le meilleur moyen d'aguerrir les hommes et de maintenir leur moral élevé.    Le coup de main a un but précis : il s'agit de se procurer des biens de première urgence au détriment de l'occupant, du gouvernement de Vichy, des GMR (Groupes mobiles de réserve) ou de collaborateurs notoires. En 1943, le manque d'armes ne représente pas un handicap ; il suffit que la protection du groupe soit assurée par le ou les chefs. Il est absolument interdit de dévaliser des gens pris au hasard comme, hélas, certains éléments incontrôlés l'ont parfois fait. Le coup de main est exécuté au bénéfice de la collectivité résistante, et il appartient aux chefs d'établir un inventaire et d'assurer une répartition équitable des biens saisis.    Un coup de main se prépare méthodiquement en rapport avecl'Armée secrète locale. Une reconnaissance préalable des lieux est indispensable, puis le groupe d'intervention étudie un plan du site ; il est préférable d'agir de nuit pour l'effet de surprise. Il importe que les rôles des hommes soient bien définis pour que l'exécution de l'action soit rapide et se déroule si possible sans brutalité ni coup de feu.   De nombreux coups de main ont eu pour cibles les chantiers de jeunesse de septembre à décembre 1943.


 Equipe Ain-Haut-Jura, "Les coups de main des groupes francs et maquis:buts", La Résistance dans l'Ain et dans le Haut-Jura, AERI, à paraître.

Contexte historique

Pierre Marcault explique pourquoi il est indispensable d'instruire les jeunes maquisards pour les combats à venir lors du débarquement allié mais avec le choix de la guérilla, seule tactique envisageable en raison d'effectifs et d'armements très inférieurs à ceux de l'ennemi : "Dès l'implantation des premiers camps-refuges, le problème crucial, après l'hébergement, est d'occuper les jeunes et d'employer utilement le temps dont on dispose avant les combats à venir. A ce propos, le commandement régional Maquis envoie le 13 septembre et le 31 octobre 1943 des instructions qui sont transmises aux officiers et sous-officiers chargés de l'encadrement. Il s'agit de préparer les jeunes physiquement et psychologiquement à la guérilla qu'ils vont pratiquer. Pour aguerrir les corps, on pratique la gymnastique et la marche en terrain accidenté, sur des distances de plus en plus longues, de nuit comme de jour. Les hommes apprennent à se déplacer en silence, à voir sans être vus, à porter des charges. Pour forger et maintenir un moral solide, les chefs doivent entretenir dans les groupes un esprit d'équipe, une cohésion, aussi bien dans les moments de détente que dans l'action. Quant à l'apprentissage proprement dit des actions de guérilla, il est indispensable d'inculquer aux jeunes des techniques et un esprit. Le combat lui-même suppose que le maquisard connaisse à fond son arme et les munitions et qu'il soit entraîné au tir ; mais le tir réel n'est pratiqué qu'avec parcimonie pour une raison d'économie. Aussi a-t-on recours à des simulations de tir sur cibles qui permettent de corriger et d'améliorer les visées, suivies d'un tir réel avec peu de cartouches. Le démontage et le remontage d'armes les yeux bandés est minuté et donne lieu à des compétitions entre les exécutants. Le maniement des grenades et des explosifs fait l'objet de cours spéciaux, aboutissant souvent à la spécialisation de certains maquisards. Les groupes de combat apprennent à se déployer sur le terrain, à utiliser le relief, à placer judicieusement un FM (fusil mitrailleur) avec tireur et pourvoyeur, enfin à connaître et exécuter rapidement le repli qui va suivre. Chacun apprend à ramper, à se jeter souplement à terre avec son arme prête à tirer, à se déplacer par bonds rapides d'un abri à un autre. Avant les combats réels, les premières actions effectuées par les maquisards sont les coups de main. Ces opérations ont pour but de se procurer des équipements, des vivres, de l'armement ou des véhicules chez l'ennemi, quel qu'il soit. Il s'agit d'une action concertée au profit de la collectivité et non d'un pillage à des fins individuelles. La pratique des coups de main nécessite également une formation qui apprend aux exécutants à travailler sur un plan, à minuter les actions, à acquérir des techniques. Il faut parvenir à enrayer ou briser rapidement des mécanismes ou à détruire des locaux en prenant un minimum de risques, tout en occasionnant un maximum de dégâts."


Témoignage oral de Pierre Marcault, in Claude Morel, "Formation au combat", La Résistance dans l'Ain et dans le Haut-Jura, AERI, à paraître.