Plaque en hommage aux FFI, anciens élèves de l'école des Richardets

Légende :

Plaque en hommage aux anciens élèves de l'école des Richardets, membres des FFI, tués lors des combats de la Libération le 26 août 1944

Genre : Image

Type : Plaque commémorative

Producteur : Frédéric Orvat

Source : © Collection Frédéric Orvat Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleurs

Lieu : France - Ile-de-France - Seine-Saint-Denis - Noisy-le-Grand

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Contexte historique

Si Noisy-le-Grand n'a pas connu de violent combat au cours de la Seconde Guerre mondiale, nombreux sont les Noiséens qui ont payé de leur vie le prix de la liberté. Parmi eux, dix jeunes qui ont été massacrés à Oissery-Forfry lors de sanglants affrontements les 26 et 27 août 1944. Amis de longue date pour avoir fréquenté ensemble l'école des Richardets, ils étaient membres du groupe de résistance de Charles Hildevert rattaché au réseau du SOE Armand-Spiritualist. Ce bataillon de 700 hommes était constitué d'éléments venant des villes voisines du Raincy ; il fût baptisé 1er Régiment Franc de Paris.

Les jeunes Noiséens tués le 26 août 1944 :
Gilbert Bataille, 19 ans, tué à Oissery (son frère, capturé, reviendra de déportation)
Maurice Darras, 19 ans, rescapé de la bataille, abattu à Saint-Mesmes
Paul Darras (frère du précédent), 20 ans, tué à Oissery
Raymond Déjardin, 19 ans, rescapé de la bataille, abattu à Monthyon
André Grelot, 18 ans, tué à Oissery
Jean-Jacques Harbulot, tué à Oissery
Maurice Schneiderlin, 19 ans, tué à Oissery


Le réseau Armand fut investi par Londres d'une mission d'envergure qui devait prendre place autour du 25 août 1944. Les compagnies du 1er régiment franc de Paris devaient se regrouper à Oissery, dans le Nord de la Seine-et-Marne, afin de réceptionner un important parachutage de matériel, et peut-être d'hommes. La stratégie exacte poursuivie par les Alliés n'est pas simple à établir. Meaux et le passage de la Marne semblent bien avoir été l'objectif final de l'opération.

Dans la perspective du regroupement à Oissery, quatre compagnies du 1er RFP se sont rassemblées en différents points de la banlieue Est (zone d'implantation du réseau Armand), attendant l'ordre de départ vers le Nord de la Seine-et-Marne. Il faut préciser que le 26 août, à l'aube, lorsque l'ordre fut donné de se mettre en marche, Londres n'avait pour sa part transmis aucune consigne. L'initiative du rassemblement avait été prise par René Dumont-Guillemet, chef du réseau. Il reçut par la suite un message de Londres lui demandant de ne pas donner d'ordre de départ avant le feu vert des services anglais. Pour éviter la confusion et considérant la distance qui existait entre la banlieue Est et Oissery, Armand ne revint pas sur le signal de mise en route qu'il avait donné.
Parties de leurs différents lieux de stationnement, les compagnies se rejoignirent. Des ordres stricts avaient été dispensées par la direction du réseau : on insistait sur le silence et la discipline au cours du déplacement. Par ailleurs, il ne fallait pas faire usage des armes, sauf en cas de légitime défense. Sur le terrain, d'après divers témoignages, il semble bien que la discrétion ne fut pas de mise.

Il est difficile de définir les responsabilités exactes du premier accrochage qui survint après Juilly, au carrefour de Vinantes avec un poste allemand situé dans la cabine de pesage d'un hangar à betteraves. Des coups de feu furent échangés et le bilan fut lourd : plusieurs Allemands avaient été tués ou blessés. Un homme de la compagnie de Talfumière, Albert Castelin, avait été tué net. Un autre, Pierre Bourgallé, était blessé. L'équipée poursuivit sa route en direction de Saint-Soupplets qu'elle évita pour se diriger vers Le Plessy-Belleville. A la sortie des bois, avant Saint-Soupplets, les hommes aperçurent des chars allemands qui, à leur grande surprise, les laissèrent passer. Il n'est pas impossible que l'uniforme dont étaient revêtu les membres de la troupe -ces uniformes provenaient du pillage d'un entrepôt de GMR à Bonneuil- y ait été pour quelque chose.

Sur la route de Plessy-Belleville, une voiture doubla la troupe, celle d'un général allemand. Celui-ci fut fait prisonnier, ainsi que son escorte. Les compagnies poursuivirent leur route jusqu'à Saint-Pathus. Leur arrivée sur place fut saluée par une ovation de la population. Une première halte s'effectua dans une annexe d'une râperie de betterave située à mi-chemin entre Saint-Pathus et Oissery. Aux alentours de 9h00-10h00, une prise d'armes a lieu en cet endroit pour rendre les honneurs au volontaire tué au carrefour de Vinantes. Un complément d'armes est distribué aux hommes : quelques colts 45, des grenades Gammon, des fusils-mitrailleurs et des mortiers. Un petit contingent d'une quinzaine d'hommes, principalement des hommes de Pierre Talfumière, fut laissé sur place. Deux infirmières, Jeannine Lefebvre (Jeannine Penette) et Micheline Vasseur, restèrent sur place et un poste d'infirmerie fut improvisé pour soigner les blessés tant français qu'allemands. Un Allemand, en particulier, avait une artère coupée : une ligature le sauva d'une mort certaine.

Le gros du bataillon poursuivit sa route et gagna l'étang de Rougemont en emmenant les prisonniers. Cet étang était la destination finale de l'expédition. Il était le lieu de camouflage prévu, reconnu quelques jours auparavant par Leuridan et Carré, du groupe Flô, pour attendre le parachutage. L'emplacement formait une cuvette boisée de peupliers. La pièce d'eau alimentée par le cours de la Thérouanne se trouvait à mi-distance des villages de Oissery et de Forfry. Sur place se trouvait le chef du réseau Armand, René Dumont-Guillemet, en uniforme anglais, accompagné de quelques hommes dont ceux de la Team Aubrey qui avaient été parachutés le 11 août. Les troupes prirent position sur les berges de l'étang et des fusils-mitrailleurs furent mis en batterie. Les choses se précipitèrent alors. Les hommes s'étaient à peine installés que les Allemands survinrent. Un avant-poste de sécurité à Oissery avait été anéanti. Un homme avait cependant pu filer en direction de Rougemont afin de prévenir le groupe.

Il est n'est pas simple de comprendre la raison exacte de l'intervention des Allemands. Ont-ils été prévenus par un motocycliste ayant réussi à s'échapper lors du premier accrochage au carrefour de Vinantes comme a pu le soutenir un témoin ? Est-ce le fait du hasard dans un zone infestée de troupes ennemies en retraite ? Les hommes du réseau ont-ils manqué de discrétion ? Il est certain qu'une telle équipée, composée de camions et d'hommes en uniforme, pouvait difficilement passer inaperçue. Adrien Chaigneau, parachuté de Londres quelques semaines auparavant, et qui était un des principaux responsables de l'opération avait confié ses doutes dès le 24 août au soir, à un médecin du réseau, le docteur Warter. Il avait notamment remarqué "l'insuffisance de discipline des volontaires civils, et les pertes qui risquaient d'en résulter" (cf. Jacques Cumont). Le passage du travail de la clandestinité à des opérations militaires en plein jour s'avérait en effet douloureux...

L'apparition de la première automitrailleuse allemande entraîna un feu nourri contre elle en dépit de la volonté du commandement : René Dumont-Guillemet hurlait en vain de faire cesser le feu. Dans le rapport qu'il établit par la suite pour le SOE, il expliqua qu'il avait deviné que la tactique des Allemands consistait à les faire rester sur place en attendant des renforts. L'ordre de repli qu'il avait donné ne fut pas écouté.
Le rapport de force fut rapidement très inégal : les Français furent attaqués par des automitrailleuses et des tanks, à la mitraillette et à la grenade. Le peu d'expérience des volontaires ne les empêcha pas d'affronter l'ennemi avec beaucoup de courage mais, devant le carnage, René Dumont-Guillement dut ordonner le "sauve-qui-peut". Dès lors, chacun s'efforça de s'éloigner des lieux du combat et de se cacher. Leuridan, Charpaux, Hildevert et ses deux fils ainsi que de nombreux hommes furent abattus. Toute résistance brisée, les Allemands menèrent la chasse aux rescapés. Jusque tard dans l'après-midi, l'ennemi poursuivit l'élimination du groupe, achevant même les blessés. Des granges furent incendiées dans les environs. Ce sont en fait tous les alentours qui furent quadrillés par les Allemands, jusqu'à Saint-Mesmes. Des fuyards furent partout interceptés et exécutés. Au Plessis-l'Evêque, trois habitants d'Iverny qui revenaient de Monthyon furent arrêtés et fusillés sur le bord de la route. Pierre Talfumière a raconté comment il trouva refuge, avec un camarade, chez un fermier qui s'empressa de leur fournir des vêtements civils : ils passèrent la nuit dans un hangar tout en haut d'un amas de balles de paille.
Entre-temps, la râperie avait été, elle aussi, attaquée. Ceux qui y étaient stationnés avaient entendu les coups de feu au loin. Ils virent les Allemands s'approcher en tirant. L'un des Allemands blessés proposa d'agiter un linge sur lequel Jeannine Lefebvre avait tracé une croix rouge au mercurochrome. Certains hommes furent épargnés -ils seront déportés-, dont les deux infirmières qui s'étaient occupées des blessés. Les autres furent sauvagement exécutés et placés dans la râperie qui fut incendiée. On y retrouvera 26 corps carbonisés.
A 22 heures, il n'y avait plus un Allemand dans Oissery. 105 personnes étaient mortes (ou 120 selon les plaques des monuments). On comptait par ailleurs 65 prisonniers et disparus.


Emmanuel Debono in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Noisy le Journal - N°76 - juillet/août 1994