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Julien Lafaye

Légende :

Au recto, Julien Lafaye en 1915-1916. Au verso, Georges Holsetin et Julien Lafaye, vétérinaires à Versailles.

Genre : Image

Source : © Collection famille Latapie-Lafaye Droits réservés

Détails techniques :

Photographies analogiques

Lieu : France - Ile-de-France - Yvelines - Versailles

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Contexte historique

Julien Lafaye est né le 16 février 1880 à Saint-Etienne-de-Fursac (Creuse). En 1899, il entre à l'Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort. De novembre 1901 à septembre 1902, il effectue son service militaire au 21e régiment d'artillerie. Il est promu vétérinaire auxiliaire le 12 janvier 1904. Cette même année, dès l'obtention de son diplôme de vétérinaire, il rentre dans sa région natale et y mène la vie active et rude du vétérinaire rural.  Au cours de la guerre 1914-1918, il est affecté comme vétérinaire aide major au 20e régiment d'artillerie de campagne puis au 264e régiment d'artillerie. Durant ce conflit, il obtient deux citations.

A la démobilisation, un de ses condisciples, le Dr Cheneau, lui propose de reprendre son établissement vétérinaire de Versailles situé rue du Parc de Glagny. Lafaye accepte et vient diriger cette maison renommée. Il réalise un important travail sur la mesure de la pression artérielle qu'on appliquait alors pour la première fois en médecine vétérinaire et il crée de toutes pièces l'instrument nécessaire à ces mesures, le zoo tensiomètre qui porte encore son nom. Traité dans une thèse doctorale, ce sujet est officiellement consacré par l'attribution du prix Weber de l'Académie vétérinaire de France. Parallèlement à ses activités professionnelles, il est placé comme réserviste au 5e groupe d'artillerie à cheval puis au 12e régiment de cuirassiers. Le 24 décembre 1926, il est promu vétérinaire major.
Dans les années Trente, Julien Lafaye est nommé sous-directeur du lotissement, alors insalubre, de la Côte de Picardie à Versailles, à l'aménagement duquel il se dévoue entièrement, venant en aide à de très nombreuses familles déshéritées. Il est également vice-président de la section syndicale des vétérinaires de Seine-et-Oise, vétérinaire inspecteur des viandes de Versailles et des communes avoisinantes, membre rapporteur du comité départemental d'hygiène de Seine-et-Oise, secrétaire du comité sanitaire de la région parisienne. En dehors des travaux multiples que lui procurent ces différentes fonctions, il attire à lui par sa renommée une importante clientèle comme la reine Amélie du Portugal. Enfin, il est chargé par la municipalité de Versailles de l'étude d'un projet de reconstruction entière des abattoirs de cette ville. Le 7 décembre 1935, il est promu vétérinaire capitaine de réserve. C'est à peu près à cette époque qu'il prend pour adjoint le docteur Georges Holstein.

Au moment de  l'exode, le docteur Lafaye se réfugie dans la Nièvre puis revient à Versailles en juillet 1940. Il commence par rédiger des réponses aux articles qu'un de ses confrères versaillais fait paraître dans les Nouvelles de Versailles ainsi qu'aux propos d'un ancien secrétaire de Henri Haye, ancien maire de Versailles et à cette époque ambassadeur de France à Washington. En septembre 1940, après une retraite chez les Dominicains de la rue de la Glacière où il fréquente particulièrement le révérend père Guihaire, le docteur Lafaye fonde avec Jehan de Launoy un mouvement clandestin qui prend la nom de Vérité Française et qui se rattachera au réseau du Musée de l'Homme. Ensemble, ils créent un journal clandestin. La première publication de ce journal remonte à octobre 1940. Jusqu'au 25 novembre 1941, date de l'anéantissement du réseau, 32 numéros paraissent, reflet d'une foi et d'un courage sans faille. Ce bulletin d'abord dactylographié est ensuite ronéoté sur une machine hébergée chez Roland Langlois, le garçon de chenil du Dr Lafaye, puis chez la mère de son adjoint le Dr Holstein sur le plateau Montbauron. Lafaye est l'un des principaux rédacteurs du journal sous le pseudonyme de FT Nel.

Par suite de l'infiltration d'un agent double au sein du réseau, Julien Lafaye est arrêté à Versailles le 25 novembre 1941. A l'issue du procès qui se déroule rue Boissy d'Anglas du 15 avril au 30 mai 1942, il est condamné à mort pour intelligence avec l'ennemi. Lorsque sa condamnation est connue dans la ville de Versailles, elle provoque un véritable état de stupeur. Une pétition circula dans son entourage. L'émotion est grande à l'idée qu'un homme aussi estimé puisse mourir bientôt sous les balles allemandes.

Julien Lafaye émet alors un recours en grâce. Les démarches en sa faveur s'intensifient. De hautes personnalités interviennent comme le maréchal Pétain, Otto Abetz, Pierre Laval, Pierre Taittinger (président du Conseil municipal de Paris), Fernand de Brinon (délégué du gouvernement français dans les territoires occupés), le Préfet de Seine-et-Oise, Sa Majesté la reine du Portugal et bien d'autres encore. Ces différentes interventions, et principalement celles de Laval et d'Abetz, permettent une commutation de la peine capitale en une peine de réclusion en Allemagne.

Julien Lafaye est d'abord déporté à Karlsruhe en septembre 1942 puis quelques jours plus tard à Rheinbach dans le cadre du décret "Nuit et Brouillard". Transféré à Sonnenburg vers la fin octobre 1942, il est placé dans une cellule individuelle totalement coupée du monde extérieur. Julien Lafaye décède à Sonnenburg le 15 mai 1944 à la suite de multiples mauvais traitements.
Le 1er décembre 1946, une plaque commémorative a été apposée sur la façade de la clinique vétérinaire de la rue du Parc de Glagny à Versailles.


Auteur : Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie :
Archives nationales, F60 1573 (Archives de la DGTO, dossiers d'interventions en faveur des condamnés à mort, "Affaire de Soissons"), 41 AJ 248 (Direction des services de l'armistice, service contentieux, dossier "Descamps"), 72 AJ 66 (Musée de l'Homme)  et 1911 (archives privées Yvette Gouineau), Z6 818 et 819 (archives de la cour de justice de la Seine).
Service historique de la Défense, dossier individuel d'officier de Julien Lafaye.
Archives municipales de Versailles (inauguration de la plaque à la mémoire de vétérinaires de Seine-et-Oise morts pour la France).
Archives famille Lafaye-Latapie.
Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon (fonds Abbé de la Martinière).
Bibliothèque municipale de Versailles (fonds Couderc).
Colette Couvreur et Pierre Descamps, Vie et mort du chef d'escadron Descamps, Paris, Privat, 1968.