Bilan partiel de l'épuration financière, mars 1946

Légende :

État des travaux du Comité de confiscation des profits illicites des Bouches-du-Rhône au 28 février 1946 - 18e page du rapport du préfet des Bouches-du-Rhône au ministre de l’Intérieur

Genre : Image

Type : Tableau

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Détails techniques :

Document dactylographié.

Date document : 14 mars 1946

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille

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Analyse média

L'ordonnance du 18 octobre 1944 crée les Comités départementaux de confiscation des profits illicites. Il s'agit de sanctionner tous les profits illicites réalisés avec l'ennemi ou en infraction de la législation, en particulier le marché noir. Le comité départemental est composé du trésorier-payeur-général, du directeur des contributions directes et indirectes, du directeur de l'enregistrement, des domaines et du timbre, du directeur du contrôle des prix et de celui des douanes, ainsi que de trois représentants du Comité départemental de Libération. Le comité départemental des Bouches-du-Rhône commence ses travaux en novembre 1944 et les poursuit jusqu'en 1948. Le document montre le bilan de ses travaux au 28 février 1946.

En un peu plus d'un an, 1 463 personnes ont comparu. Le comité n'est cependant qu'à mi-parcours de son activité puisque les affaires réglées et celles encore en cours sont pratiquement en nombre égal : 565 contre 450. Les sommes à recouvrer se partagent entre amendes (842, 908 millions de francs) et confiscations (740,174 millions de francs). Le total des sommes à recouvrer atteint les 1 583 082 millions de francs. Le contraste avec les sommes effectivement perçues n'en est que plus saisissant : 283 793 millions, soit environ un sixième des pénalités. Le conseil supérieur de confiscation des profits illicites statue en appel dans un sens souvent favorable au demandeur.


Sylvie Orsoni

Contexte historique

La sanction des profiteurs de guerre était approuvée par la grande majorité de la population. Le gouvernement provisoire prend très rapidement deux ordonnances, l'une, le 16 octobre 1944, frappe la collaboration économique, l'autre, en date du 18 octobre, va au-delà et sanctionne tous les profits réalisés « en violation de la réglementation des prix, des changes, du commerce de l'or, du rationnement, du ravitaillement, de la collecte et de la répartition des produits », ce qui englobe le marché noir. Le Comité départemental des Bouches-du-Rhône réalise un travail considérable. 

Robert Mencherini montre qu'entre avril 1945 et février 1946, le nombre des enquêtes triple et les confiscations prononcées sont multipliées par huit. Le bilan réel est cependant plus modeste. Les personnes sanctionnées font appel au Conseil supérieur de confiscation des profits illicites, qui se montre beaucoup plus conciliant. L'opinion publique est sensible à cette réalité, comme l'indique le préfet des Bouches-du-Rhône dans son rapport au ministre de l'Intérieur : « Dans le domaine de la répression économique, on relève des critiques plus vives de la part de l'opinion, même modérée, qui la juge insuffisante... Le public n'ignore pas que si des amendes et des confiscations considérables sont infligées par le Comité de confiscation des produits [sic.] illicites, une très petite partie de ces sommes ont été effectivement versées à l'heure actuelle par les intéressés. »


Auteur : Sylvie Orsoni

Sources :

Marc Bergère, L'épuration économique en France à la Libération, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008.

Robert Mencherini, La Libération et les années tricolores (1944-1947). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 4. Paris, Syllepse, 2014.

Henry Rousso, « L'épuration en France, une histoire inachevée », in Vingtième siècle, PFNSP, n° 33, 1992, pp. 78-105.