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Plaque en hommage aux agents des ateliers PLM et SNCF victimes des deux guerres, Arles

Légende :

Plaque en hommage aux agents cheminots des Ateliers d'Arles victimes des deux guerres mondiales, située à la gare voyageurs, avenue Paulin-Talabot, Arles (Bouches-du-Rhône)

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © Clichés R. Mencherini Droits réservés

Détails techniques :

Photographies numériques en couleur (voir recto-verso).

Date document : Mai 2017

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Arles

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Analyse média

Un mémorial s’élève sur le quai n° 2B (au niveau du repère W) de la gare voyageurs d’Arles, composé d’une pierre gravée et d’une plaque de bronze.  

La pierre en partie supérieure porte l’inscription « 50e anniversaire. Les cheminots arlésiens à Pierre Sémard, secrétaire général de la Fédération CGT des cheminots, fusillé par les nazis le 7 mars 1942 à Évreux ».

La plaque de bronze intitulée, « Ateliers d’Arles - agents victimes des deux guerres », comprend deux listes. La plus longue, qui occupe la partie basse de la plaque, est celle des victimes de la Première Guerre mondiale. Les vingt-six noms et prénoms sont disposés sur deux colonnes, dans l’ordre alphabétique.

Les dix noms « 1939-1945 », regroupés en fonction du lieu et de la cause du décès, sont également répartis sur deux colonnes. La première rassemble les « Morts en camps de concentration » et les « Déportés du travail », la deuxième, les « Fusillés par les Allemands » et les « Victimes de bombardements ».

Les première et dernière rubriques comportent chacune quatre noms. Mais, de fait, trois cheminots seulement sont morts en déportation : Louis Deguilhem, mort à Dachau en février 1945, Claude Pin à Gusen, en janvier 1945, et Pierre Souchon à Mauthausen en mars 1945. Fernand Fournier, incarcéré à Toulon, est mort dans cette ville, le 25 janvier 1944.

On trouve également quatre cheminots sous le titre « Victimes des bombardements », ce qui est effectivement le cas pour trois d’entre eux qui ont péri sous les bombes, en Arles : Jean Rasserie en août 1944, Marcel Teyssier en juillet 1944 et Léopold Trinquier en juin 1944. Joseph Souveton s’est tué, en service commandé, sur la route de Saint-Andiol, le 22 septembre 1944. Les deux autres rubriques ne comptent qu’un seul nom. Virgile Guise, « Déporté du travail », dans le cadre du Service du travail obligatoire, est décédé à Vienne, en Autriche, le 3 décembre 1944. François Benson a été pris en otage lors du retrait des troupes allemandes puis « Fusillé par les Allemands », le 23 août 1944.


Auteurs : Marion Jeux et Robert Mencherini

Contexte historique

La plaque de bronze, réalisée par les Ateliers SNCF d’Oullins (Rhône), était autrefois disposée à l’entrée des Ateliers ferroviaires d’Arles. Elle a été transférée des ateliers sur le quai de la gare d’Arles lors de la fermeture des ateliers en 1984.

Les Ateliers d’Arles, créés au milieu du XIXe siècle, sur le site de la nécropole romaine des Alyscamps, employaient, vers 1900, plus de mille deux cents personnes. Jusque dans les années 1930, ils construisaient et réparaient des machines à vapeur de la compagnie Paris-Lyon-Marseille (PLM). Leurs effectifs se réduisirent fortement après 1934 et la crise économique. Ils furent rattachés à la SNCF en 1938.

Pendant toute cette période, les cheminots constituaient un pôle syndical essentiel au sein de la cité arlésienne, avec une forte implantation de la CGT et du Parti communiste. Et, pendant la Seconde Guerre mondiale, les autorités de Vichy considéraient les ateliers ferroviaires comme un foyer d’agitation, à surveiller de près.

Le 6 juin 1941, huit cheminots des Ateliers d’Arles furent arrêtés pour menées antinationales et distribution de tracts communistes : Louis Deguilhem, Fernand Fournier, Charles Gardiol, Joseph Peloux, Adolphe Piche, Claude Pin, Charles Raymond, Pierre Souchon. Jugés en juillet 1941 par le tribunal correctionnel de Tarascon, puis traduits devant le tribunal militaire de la XVe région à Marseille, tous furent condamnés, le 6 septembre 1941, à des peines de travaux forcés (vingt ans pour Fernand Fournier, dix ans pour Louis Deguilhem, cinq ans pour Charles Gardiol) ou de prison (cinq ans pour les autres inculpés). Immédiatement révoqués de la SNCF, ils furent incarcérés à la prison Saint-Roch de Toulon ou à la centrale de Nîmes. Dans les ateliers SNCF, le relais militant fut assuré par un autre cheminot, Victorin Mourgues. Sept d’entre eux furent transférés à la centrale d’Eysses, près de Villeneuve-sur-Lot dans le Sud-Ouest. Le huitième, Fernand Fournier, maintenu à la prison Saint-Roch de Toulon, décéda à l’hôpital civil de la ville, le 25 janvier 1944. À Eysses, le 30 mai 1944, plus de mille deux cents détenus furent remis à la division SS Das Reich, emmenés à Compiègne et déportés. Parmi eux, cinq des huit cheminots arlésiens (Charles Gardiol et Joseph Peloux échappèrent à la déportation) partirent de Compiègne le 18 juin 1944 pour Dachau. Louis Deguilhem, Claude Pin et Pierre Souchon périrent en déportation. Charles Raymond et Adolphe Émile Piche en revinrent.

À la Libération, il fut décidé de rendre hommage aux cheminots des Ateliers « victimes des deux guerres » et de confectionner à cet effet une plaque de bronze. On décida d’y porter les noms des cheminots décédés en déportation ou en prison. On y joignit ceux des cheminots tués à la Libération par les Allemands, morts sous les bombardements ou au STO.  

Apposée sur une stèle de forme pyramidale, la plaque de bronze surmontait la volée de quelques marches d’un petit monument rectangulaire assez massif. Celui-ci fut inauguré en septembre 1947, en présence du directeur de région SNCF, des autorités civiles et militaires et des représentants du personnel des Ateliers. Après la cérémonie officielle, les participants visitèrent les ateliers où fonctionnaient quelques machines, conduites par des agents bénévoles : les cheminots, tout en honorant leurs camarades morts pour la France, participent activement à la reconstruction du pays.


Auteurs : Marion Jeux et Robert Mencherini

Sources :

Nicolas Koukas, « La Résistance à Arles, 1940-1944 », mémoire de maîtrise, dir. R. Mencherini, Université d’Avignon, 1997 ; 

Marion Jeux (coord.) Résister en pays d'Arles, 1944-2014, 70e anniversaire de la Libération, Arles, éditions Actes Sud, 2014 ;

Fondation pour la mémoire de la déportation, Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution 1940-1945, Paris, Éd. Tirésias, 2004 ;

Amicale des anciens d’Eysses, Eysses contre Vichy, 1940…, Paris, Ed. Tirésias - Michel Reynaud, 1992 ;

Robert MencherinI, Cheminots en Provence. Les années de guerre, 1939-1945, Marseille, éditions du CE cheminots, 2012 ;

Thomas Fontaine (dir.), Cheminots victimes de la répression, 1940-1945, Mémorial, Paris, Perrin/SNCF, 2017.