Contre le STO




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  • Introduction

ESPACE PEDAGOGIQUE

Objectif de cet espace : 
permettre aux enseignants d\'aborder plus aisément, avec leurs élèves, l\'exposition virtuelle sur la Résistance dans la Drôme en accompagnant leurs recherches et en proposant des outils d’analyse et de compréhension des contenus.

L'espace d'exposition s'articule autour d'une arborescence à quatre entrées :
- Zone libre et Occupation,
- Résistance,
- Libération et après-libération,
- Mémoire.

Chaque thème est introduit par un texte contextuel court. A partir de là, des documents de tous types (papier, carte, objet, son, film) sont présentés avec leur notice explicative.

La base média peut être aussi utilisée comme ressource pour les enseignants et leurs élèves dans le cadre de travaux collectifs ou individuels, en classe ou à la maison.

Pour l'exposition sur la Résistance dans la Drôme, sont proposés aux enseignants des parcours pédagogiques (collège et lycée), en lien avec les programmes scolaires, utilisant les ressources de l'exposition :

1/ Collège :

Note méthodologique
- Parcours pédagogiques composés de :
     . Fiche 1 : La France vaincue, occupée et libérée,
     . Fiche 2 : Le gouvernement de Vichy, la Révolution nationale et la Collaboration,
     . Fiche 3 : Vivre en France durant l'Occupation,
     . Fiche 4 : La Résistance.

2/ Lycée :

- Note méthodologique
- Parcours pédagogiques composés de :
     . Dossier 1 : L'Etat français (le régime de Vichy),
     . Dossier 2 : Les Juifs dans la Drôme (antisémitisme, persécution, arrestation, déportation, protection),
     . Dossier 3 : Les résistants,
     . Dossier 4 : La Résistance armée,
     . Dossier 5 : La Résistance non armée,
     . Dossier 6 : La vie quotidienne.

Si vous êtes intéressés par ces dossiers, contactez nous : [email protected]

Réalisation des dossiers pédagogiques : Patrick Dorme (CDDP Drôme), Lionel FERRIERE (enseignant Histoire en collège et correspondant du musée de Romans), Michel MAZET (enseignant en lycée et correspondant des archives départementales). 

1. De la déclaration de guerre à l’Armistice, le 22 juin 1940 : Un mois après le début de leur attaque en mai 1940, les Allemands atteignent le nord de la Drôme. L’Armistice arrête les combats sur la rivière Isère. Le nord du département est occupé par les troupes allemandes.
2. De l’Armistice à l’occupation allemande, le 11 novembre 1942 : La Drôme est située en zone non occupée.
3. Du 11 novembre 1942 au 9 septembre 1943 : La Drôme est placée sous administration et occupation italiennes.
4. Du 9 septembre 1943 au 31 août 1944 : l’armée allemande occupe la Drôme ; c’est la période la plus intense pour la lutte contre l’ennemi et le gouvernement de Vichy.


Il s'agit d'une sélection de cartes nationales et locales sur la Résistance. La plupart de ces cartes ont été réalisées par Christophe Clavel et Alain Coustaury. Il s'agit d'une co-édition AERI-AERD tous (droits réservés)


CARTE INTERACTIVE DROME ET VERCORS DROMOIS ET ISEROIS
(Suivez ce lien pour afficher la carte et sélectionnez les points du paysage souhaités pour afficher les fiches correspondantes)


  France de 1940 à 1944
  Départements français sous l’Occupation
  Régions militaires de la Résistance en 1943
  La Drôme, géographie physique
  Esquisse de découpage régional de la Drôme
  Les communes de la Drôme
  Carte des transports en 1939
  Le confluent de la Drôme et du Rhône
  Densité de la population de la Drôme en 1939
  Densité de la population de la Drôme en 1999
  Evolution de la densité de population de la Drôme entre 1939-1999
  L’aérodrome de Montélimar-Ancône
  Aérodrome de Valence - Chabeuil - La Trésorerie
  Les caches des armes et du matériel militaire
  Les terrains de parachutages dans la Drôme
  Bombardements alliés et allemands dans la Drôme
  Immeubles détruits par les Allemands et la Milice
  Emplacement de camps de maquis de 1943 au 5 juin 1944
  Localisation des groupes francs qui ont effectué des sabotages en 1943
  Implantation et actions de la compagnie Pons
  FFI morts au combat ou fusillés
  Plan-de-Baix, Anse, 16 avril 1944
  Géopolitique de la Résistance drômoise en juin-juillet 1944
  Dispositif des zones Nord, Centre, Sud vers le 10 juin 1944
  Combovin, 22 juin 1944
  Vassieux-en-Vercors 21, 22, 23 juillet 1944
  Combat de Gigors 27 juillet 1944
  Le sabotage du pont de Livron
  Carte simplifiée de la bataille de Montélimar du 21 au 24 août 1944
  Carte simplifiée de la bataille de Montélimar du 25 et 26 août 1944
  Carte simplifiée de la bataille de Montélimar du 27 au 29 août 1944
  Carte simplifiée de la bataille de Montélimar du 29 août à 12 heures le 30 août 1944
  Etrangers au département, non juifs, arrêtés dans la Drôme et déportés
  Déportation, arrestations dans la Drôme
  Déportation des Juifs dans la Drôme
  Lieu de naissance de Drômois déportés, arrêtés dans la Drôme et à l’extérieur du département
  Cartes des principaux lieux de mémoire dans la Drôme
  Perceptions de la Résistance drômoise

Publications locales :

Une bibliographie plus détaillée sera accessible dans l’espace « Salle de consultation » du Musée virtuel.

SAUGER Alain, La Drôme, les Drômois et leur département. 1790-1990. La Mirandole. 1995.
GIRAUDIER Vincent, MAURAN Hervé, SAUVAGEON Jean, SERRE Robert, Des Indésirables, les camps d’internement et de travail dans l’Ardèche et la Drôme durant la Seconde Guerre mondiale. Peuple Libre et Notre Temps, Valence, 1999.
FÉDÉRATION DES UNITÉS COMBATTANTES DE LA RÉSISTANCE ET DES FFI DE LA DRÔME, Pour l’amour de la France. Drôme-Vercors. 1940-1944. Peuple Libre, Valence, 1989.
DE LASSUS SAINT-GENIÈS (général), DE SAINT-PRIX, Combats pour le Vercors et la Liberté. Peuple Libre, Valence, 1982.
LA PICIRELLA Joseph. Témoignages sur le Vercors, 14e édition, Lyon, 1994
LADET René, Ils ont refusé de subir. La Résistance en Drôme. Auto-édition. Portes-lès-Valence, 1987.
DREYFUS Paul, Vercors, citadelle de Liberté, Arthaud, Grenoble, 1969.
MARTIN Patrick, La Résistance dans le département de la Drôme, Paris IV Sorbonne, 2002.
SERRE Robert, De la Drôme aux camps de la mort, Peuple Libre et Notre Temps, Valence, 2006.
SUCHON Sandrine, Résistance et Liberté. Dieulefit 1940-1944. Éditions A Die. 1994.
VERGNON Gilles, Le Vercors, histoire et mémoire d’un maquis, L’Atelier, Paris, 2002.

Dvd-rom La Résistance dans la Drôme et le Vercors, éditions AERD-AERI, 2007.

Ce travail n’aurait pu avoir lieu sans l’aide financière du Conseil général de la Drôme, du Conseil régional de Rhône-Alpes, du Groupe de Recherches, d’Études et de Publications sur l’Histoire de la Drôme (GRÉPHiD) et de l'AERD qui y a affecté une partie des recettes de la vente des dvd-roms, La Résistance dans la Drôme et le Vercors.

L’équipe de la Drôme tient à les remercier ainsi que :
- l’Office départemental des anciens combattants (ONAC),
- la Direction départementale de l’équipement de la Drôme (DDE),
- le Centre départemental de documentation pédagogique de la Drôme, (CDDP),
- le personnel et la direction des Archives départementales de la Drôme, de l’Isère, des Archives communales de Allan, de Crest, de Die, de Grâne, de Montélimar, de Romans-sur-Isère, de Triors, de Saint-Donat-sur-l’Herbasse, de Saint-Uze,
- les Archives fédérales allemandes (Bundesarchiv), le National Archives and Records Administration (NARA), The National Archives (les archives nationales britanniques), Yad Vashem,
- le Musée de la Résistance en Drôme et de la Déportation de Romans, le Musée de la Résistance de Vassieux-en-Vercors, le Mémorial de La Chau, le Musée de Die, le Musée Saint-Vallier, la Médiathèque de Montélimar, le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, le Mémorial Shoah, l’Association des Amis du Musée des blindés de Saumur, le Musée de la Division Texas (USA),
- l’Association Études drômoises, l’Association Mémoire d’Allex, l’Association Sauvegarde du Patrimoine romanais-péageois, l’Association Mémoire de la Drôme, l’Association des Amis d’Emmanuel Mounier, l’Association Patrimoine, Mémoire, Histoire du Pays de Dieulefit, l’Amicale maquis Morvan, la Fédération des Unités Combattantes et des FFI de la Drôme, l’Association nationale des Pionniers et Combattants Volontaires du Vercors.

Mais nos remerciements s’adressent surtout à toutes celles et tous ceux, notamment résistantes, résistants et leurs familles, qui ont accepté de livrer leurs témoignages, de nous confier leurs documents et leurs photographies. Ils sont très nombreux et leurs noms figurent dans cette exposition. Ils s’apercevront au fil de la lecture que leur contribution a été essentielle pour l’équipe qui a travaillé à cette réalisation. Grâce à eux, une documentation inédite a pu être exploitée, permettant la mise en valeur de personnes, d’organisations et de faits jusqu’alors méconnus. Grâce à eux nous avons pu avancer dans la connaissance de la Résistance dans la Drôme et plus largement dans celle d’une histoire de la Drôme sous l’Occupation.
L’étude de cette période et des valeurs portées par la Résistance, liberté, solidarité, justice et progrès social…, nous semble plus que jamais d’actualité.

 

CONCEPTION, RÉALISATION

Maîtres d’ouvrage :
Association pour l’Élaboration d’un Cédérom sur la Résistance dans la Drôme (AERD), en lien avec l'Association pour des Études sur la Résistance intérieure (AERI) au niveau national. 

Maîtrise d’ouvrage : Carré multimédia. 

Gestion de projet AERI : Laurence Thibault (directrice) – Laure Bougon (chef de projet) assistée d’Aurélie Pol et de Fabrice Bourrée. 

Groupe de travail : Pierre Balliot, Alain Coustaury, Albert Fié, Jean Sauvageon, Robert Serre, Claude Seyve, Michel Seyve. Patrick Martin et Gilles Vergnon interviennent sur des notices spécifiques. 

Sont associés à ce travail tous ceux qui ont participé à la réalisation du Dvd-rom La Résistance dans la Drôme, et qui par la même, ont contribué à une meilleure connaissance de la Résistance dans le département. 

Groupe pédagogique : Patrick Dorme (CDDP Drôme), Lionel FERRIERE (enseignant Histoire en collège et correspondant du musée de Romans), Michel MAZET (enseignant en lycée et correspondant des archives départementales). 

Cartographie : Christophe Clavel et Alain Coustaury.




Le Service du Travail Obligatoire en Allemagne est instauré par la loi du 16 février 1943, il remplace le système de la Relève créé le 22 juin 1942 qui avait été un échec. L’Allemagne avait besoin de main-d’œuvre pour remplacer ses ouvriers mobilisés dans l’armée et faire fonctionner son industrie de guerre.

Les jeunes Français des classes 1940, 41 et 42 sont requis et transférés en Allemagne. Cette mesure suscite une forte émotion dans la population. Des jeunes, sans emploi, voient dans cette opportunité la possibilité de percevoir un salaire, mais, pour la plupart c’est une solution qu’ils repoussent. Certains ne peuvent s’y soustraire et sont contraints au départ. C’est, par exemple, des appelés aux Chantiers de Jeunesse qui sont embarqués par leur hiérarchie. Par contre, nombreux sont ceux qui recherchent les moyens d’y échapper. Beaucoup vont se cacher dans les exploitations agricoles ou forestières complices où ils constituent une main-d’œuvre appréciée. D’autres vont directement rejoindre les maquis mais, au début, ceux-ci ne sont pas équipés pour accueillir une telle masse de jeunes et le passage clandestin dans une ferme ou chez des amis est parfois nécessaire. Les filières résistantes leur procurent souvent des faux papiers. Ces « réfractaires » viennent ainsi gonfler les effectifs des maquis, dès 1943.

L’opposition au STO a pris parfois la forme de manifestations des habitants. Ce fut le cas à Valence, le 20 mars 1943, ou à Romans, le 10 mars 1943. Cette dernière est la plus connue parce qu’un photographe, Paul Deval, a pu fixer cet évènement sur sa pellicule. C’est peut-être la seule fois que cela a été possible, en France, c’est pourquoi cet évènement est cité dans de nombreux ouvrages.




                                   Against the STO


The STO (Service du travail obligatoire) in Germany is introduced by law on February 16, 1943, and replaces the failed Relève system created June 22, 1942. Germany needs manpower to replace workers mobilised in the army as well as to operate its war industry.

Young French people of the classes 1940, 41, and 42 are required, and transferred to Germany. This measure illicits a strong emotion from the French population. Some unemployed young people see it as an opportunity to earn a living, but the majority is repelled by the solution. Some can not escape and are forced to leave. For example in the Chantiers de Jeunesse, in which the hierarchy is embedded by superiors. By contrast, many seek ways to escape. Many hide in places of agriculture or forests, where accomplice work forces appreciate them. Others go directly to join the maquis movement, which is at first not equipped to accommodate this large group of young people, so it is sometimes necessary for them to live on farms or with friends. Chains of resistants often provide false papers. These "refractaires" thus come and swell the number and effectiveness of the maquis, beginning in 1943.

Opposition to the STO (Service du travail obligatoire) sometimes takes the form of protests by residents. This is the case in Valencia on March 20, 1943, or at Romans on March 10, 1943. The latter is more well-known because photographer Paul Deval is able to capture the event on film, one of the only times such is possible in France, so the event is often cited in books.


Traduction : Grace Hoffman

Auteur : Jean Sauvageon
Source : Dvd-rom La Résistance dans la Drôme-Vercors, éditions AERI-AERD, février 2007.


 

Manifestation de Romans contre le STO (10 mars 1943)



  • Contexte historique
  • Analyse média

En mars 1943, même en difficulté, Vichy ne vacille pas encore. Devant la montée d'une Résistance, le régime se crispe. La Milice est créée le 31 janvier 1943, le STO (Service du travail obligatoire) le 16 février 1943. Dans la Drôme, à Valence, défilent des sections de la Franc-garde, organe militarisé de la Milice, constituée le 28 février 1943. Le 14 mars, à Romans-sur-Isère, se tient l'assemblée constitutive de la Milice dans le département. Le journal de Valence, Le Petit Valentinois publie à plusieurs reprises des publicités incitant les jeunes à entrer dans la Légion des volontaires français. Mais il est vrai que ni la Milice, ni la LVF (Légion des volontaires français contre le bolchevisme) ne remportent un grand succès de recrutement. Cependant, leur existence montre dans quelle ambiance les manifestants romanais se trouvent. On peut ajouter qu'une partie du clergé, surtout dans le haut clergé, soutient encore le régime de Pétain. L'évêque de Valence, Camille Pic, écrit, à l'occasion des vœux du Nouvel An 1943, dans La semaine religieuse du diocèse de Valence du 9 janvier 1943 : "Je mettrais quelque temps à pardonner aux Français égarés qui en appelant les Américains et les Anglais dans notre empire, nous ont rejetés dans la guerre, alors que tout l'effort de ce grand sage [Pétain] que le monde entier admirait, était de nous en tenir éloignés jusqu'à la fin". Aussi, l'acte de refus du 10 mars 1943, à Romans, marque une rupture avec l'attitude de ceux qu'on pourrait déjà qualifier de majorité silencieuse. À Romans, le témoignage de l'abbé Michel Lémonon, un des manifestants, est net sur cet aspect. En retracer avec précision le déroulement ne peut que contribuer à rendre un hommage aux manifestants.

Cette manifestation est préparée le 9 mars. Jean Chapus, chef de gare, informe le capitaine Vincent Beaume, des MUR, du passage en gare de Romans, le 10 mars, d'un train spécial, en provenance de Grenoble, devant convoyer environ 300 requis du STO. Les MUR de Romans et de Bourg-de-Péage (rive gauche de l'Isère) se réunissent pour organiser une manifestation. Deux organisations sont particulièrement actives : la Jeunesse communiste et la Jeunesse ouvrière chrétienne. Le Comité de Résistance, la JC, la JOC et la CGT clandestine décident de se réunir et d'appeler les ouvriers à une manifestation la veille du départ, le 9 mars, à 18 heures, devant la Bourse du Travail. Une cinquantaine de tracts sont rédigés à la main. Ils appellent à protester contre les départs en Allemagne, contre la faiblesse des salaires, pour un meilleur ravitaillement. Les tracts sont distribués par les délégués syndicaux dans les usines, passent de main en main.
Le 9 mars, à 18 heures, à la sortie des usines, les manifestants se dirigent vers la Bourse du Travail. La police, les gardes mobiles avertis cernent le bâtiment. Deux à trois mille personnes se regroupent alors place du maréchal Pétain. Les élèves de l'école de gendarmerie de Romans tentent de les faire circuler ; pour beaucoup, engagés pour échapper au STO, ils sont plutôt passifs. Les manifestants prennent pour cible des lieux de réunion de collaborateurs. Le café de Valence, siège du PPF (Parti populaire français) est mis à sac. Le calme revient vers 20 heures.
Le point fort de ces événements se déroule le 10 mars à la gare de Romans. L'étude chronologique de la manifestation a été décrite dans de nombreux ouvrages. On peut regretter que des auteurs aient repris une source sans en vérifier la véracité. S'est ainsi créé un consensus sur le déroulement de la manifestation. Il semblerait pourtant qu'un document indiscutable n'ait pas été suffisamment utilisé. Il s'agit du rapport de Jean Chapus, à l'époque chef de la gare de Romans-sur-Isère, à ses supérieurs. Sa précision remet en cause le déroulement communément admis : un train de requis arrivé vers 12 heures serait reparti avec quatre ou cinq heures de retard, ne transportant que quelques dizaines de requis alors qu'il serait arrivé avec plus de 300.

Le compte rendu de Jean Chapus, chef de gare

Il est intitulé : Région sud-est, exploitation 7e arrondissement , Romans ; n° 46 cq : incidents suite départ des ouvriers pour l'Allemagne.
On peut le résumer ainsi :
- Premier train : arrivée du train N° 1610 en provenance de Grenoble et à destination de Valence ; départ prévu à 12 h 40 ; manifestation l'empêchant de repartir ; police impuissante à dégager les voies ; les manifestants ont placé des obstacles sur les voies : pierres de taille, madriers.
- Deuxième train : train N° 6095, provenant de Valence, arrêté au sémaphore, ne pouvant entrer en gare ; les manifestants font dérailler le dernier wagon (N° Fa 37194) qui engage les deux voies. Utilisation de la locomotive du 1610 pour tirer le wagon, le remettre sur les rails et dégager les voies. Le train 1610 redémarre avec 2 h 05 de retard (et non avec 4 ou 5 heures comme il est communément admis). Cette valeur du retard est confirmée par un rapport de la Gendarmerie du 24 mars.
-Troisième train : 15 h 30. Arrivée d'un train de secours désormais inutile puisque le wagon avait été remis sur la voie ; retour de ce train à son dépôt à 17 h 30.
- Quatrième train : le n° 4170, achemine "une trentaine de travailleurs, sur les 300 qui devaient partir". Il y a eu donc quatre convois : deux en direction de Valence le 1610 et le 4170, le 6095 en direction de Grenoble et le train de secours. Il y a omission dans la version traditionnelle de deux ou trois de ces trains. On a regroupé deux trains en un seul, le 1610 et le 4170. Pourquoi ? Si le 4170 n'a transporté qu'une "trentaine de requis ", où sont passés les autres ? Ont-ils emprunté le 1610 ? Se sont-ils enfuis, récupérés par les organisations de la Résistance ? Où ont-ils été dirigés ? Qui les a hébergés ? Nous n'avons trouvé aucune réponse précise à ce sujet. Le retard du 1610, exagéré dans les publications, explique la confusion trop souvent faite avec le 4170.
Cela amène à préciser les conditions du départ du 1610. Combien de requis emmène-t-il à Valence ? Difficile de le dire. Un témoin se souvient que des requis sont remontés dans le train, d'autant plus facilement que ce dernier devait, sur ordre du chef de gare, rouler à vue jusqu'à Alixan, des manifestants risquant de déboulonner les rails. Une photo montre cette escorte du train par les gendarmes mobiles. D'autres auraient rejoint le train à Valence. Un témoin oculaire se souvient même avoir vu, juché sur la guérite du serre-frein, un requis éméché, chantant L'Internationale.

Un autre document confirme un départ important de requis pour le STO. Les archives communales de Romans possèdent une liste nominative des Romanais et Romanaises qui sont partis au titre de la Relève (précédant le STO) ou du STO entre octobre 1942 et juillet 1943. Le 10 mars 1943, 52 Romanais ont rejoint l'Allemagne ou l'organisation Todt (construction du mur de l'Atlantique, par exemple), plus de 40 le 20 mars 1943. Donc on peut penser qu'un nombre très supérieur est parti le 10 mars car le train devait emmener des requis d'autres communes voisines. Cela signifie que la plupart des requis ne se sont pas enfuis. L'auteur n'a trouvé aucun document attestant leur récupération par la Résistance. La chronologie traditionnelle doit donc être revue. L'acte d'opposition au départ de requis prend encore plus de valeur. Il est le fait d'une partie de la population romanaise et péageoise. Il faut, en 1943, du courage et beaucoup de perspicacité pour prendre conscience de ce que représentait le STO et braver les menaces de représailles qui pèsent sur les familles. Même si les manifestations contre le STO se multiplient rapidement (à Valence, le 9 mars), traduisant une Résistance de plus en plus présente, les départs sont nombreux. Au début, soudain et sévère, le STO réussit là où la Relève avait échoué. Fin mars la demande allemande de 250 000 requis est largement satisfaite. Les Allemands félicitent la France d'avoir été le seul État en Europe occupée à remplir son objectif à 100 %. Très vite la situation change. C'est à partir du STO que commence à s'effondrer Vichy. Car envoyer des jeunes en Allemagne ou travailler en France pour l'Allemagne est en contradiction avec la formule "Travail, Famille, Patrie". Il touche toutes les classes sociales, notamment celles des paysans et des classes moyennes, soutiens jusqu'alors du gouvernement de Vichy. Même si l'opposition au STO n'est pas unanime, ce dernier révèle l'ampleur du pillage économique et surtout humain provoqué par l'Occupation. Tout ceci montre l'importance de l‘acte d'hommes et de femmes de Romans et de Bourg-de-Péage le 10 mars 1943. L'événement est aussi devenu symbolique grâce aux photos qui ont été prises par Paul Deval et que l'on retrouve dans de nombreux livres d'histoire et manuels scolaires. Manifester en mars 1943, c'était prendre de grands risques : risques d'arrestation par des forces de répression française et allemande de plus en plus féroces, risque d'être mis à l'écart par une partie de la population, par une hiérarchie religieuse vis-à-vis de trublions, au nom d'un soutien à Vichy. C'est ce qui arrive à Romans où une vingtaine de manifestants sont arrêtés le 10 mars, une quarantaine d'arrestations préventives dans la nuit du 10 au 11 mars. On peut citer celles de Victor Boiron, Gilbert Chapelle, Michel Combe (ce dernier a permis à l’auteur de préciser les circonstances de l’événement).

Pour cela, ceux qui ont manifesté ont eu le courage de le faire dans un contexte extrêmement dangereux. Aussi, seule une minorité de Romanais et de Péageois s'est retrouvée devant la gare et non la population romano-péageoise. Le contexte local de mars 1943 augmente ainsi la grandeur du geste. C'est ce courage, cette clairvoyance face à un régime qui collabore de plus en plus avec les occupants qu'on a voulu commémorer en faisant de cette manifestation un acte symbolique. La photographie apposée sur le mur de la gare de Romans veut en immortaliser le souvenir.


Auteur : Alain Coustaury
Sources : Rapport manuscrit du chef de gare Jean Chapus, archives communales de Romans-sur-Isère.

La scène se déroule sur le passage à niveau de la route qui conduit de Romans-sur-Isère à Mours-Saint-Eusèbe. Ce passage à niveau n’existe plus, remplacé par un passage souterrain. La photo a été prise par Paul Deval, journaliste, depuis un bâtiment dominant la voie ferrée. Alors qu’il opérait, Paul Deval a été pris à partie par des personnes qui avaient peur d’être reconnues et poursuivies. Paul Deval prend plusieurs photos dont celles, très célèbres, du passage à niveau de la route de Mours-Saint-Eusèbe. Juché sur un toit dominant les voies, il photographie les manifestants, les forces de l'ordre et la locomotive du train 1610. Interpellé, le lendemain, par des inspecteurs de Vichy, il répond qu'il a détruit les négatifs. Il a, en réalité, selon la version traditionnelle, caché ces documents sous un plancher de la Maison des jeunes de Romans-sur-Isère. Récupérées à la Libération, ces photos deviennent célèbres dans la mesure où des scènes de manifestations ont rarement été photographiées.


Auteur : Alain Coustaury

Titre : Manifestation de Romans contre le STO (10 mars 1943)

Légende :

C'est une manifestation parmi les plus célèbres de la Résistance car photographiée.

Genre : Image     Type : Photo

Source : © CHRDD - Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique noir et blanc.


Date document : 10 mars 1943

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Romans-sur-Isère