Jacques Lazarus dit "Jaquel"

Légende :

Devenu une figure de la Résistance juive, Jacques Lazarus entre dans la Résistance à Lyon en 1942. En janvier 1943, il rejoint l'Armée juive dont il devient l'un des principaux responsables de l'instruction militaire des jeunes recrues. En novembre 1943, il est l'un des fondateurs des maquis de l'Armée juive dans le Tarn. Chargé d'une nouvelle mission par l'Armée juive, devenue entre temps l'Organisation juive de Combat, il se rend à Paris où il est arrêté le 17 juillet 1944. Déporté le 17 août 1944 par le dernier convoi à quitter la gare de Bobigny, Jacques Lazarus s'évade du train avec plusieurs de ses camarades.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Service historique de la Défense à Vincennes, GR 16P 345 139 Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Lieu : France

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Contexte historique

Fils de Maurice Lazarus, négociant en métaux, et de Marcelle née Dreyfus, Jacques Lazarus naît le 2 septembre 1916 à Payerne (Suisse). Il est l’aîné de cette famille juive alsacienne. Il apprend le métier de prothésiste dentaire à l’Ecole de travail israélite de Strasbourg où il rentre à l’âge de quinze ans. En février 1934, âgé de 19 ans, il devance l’appel sous les drapeaux en souscrivant un engagement volontaire au 152e régiment d’infanterie stationné à Colmar. En 1939, il se présente au concours d’entrée de l’Ecole militaire de Saint-Maixent mais la guerre interrompt ses ambitions. Sergent-chef en novembre 1939, breveté chef de section de mortier de 81 mm, il fait la campagne de 1940 au sein du 152e RI. Le statut des Juifs qui les exclut des fonctions civiles et militaires entraîne en août 1941 son éviction de l'armée qu'il servait depuis six années.

Entre septembre 1941 et mai 1943, il est inspecteur d’assurances à Saint-Étienne (Loire) puis employé au bureau de Lyon du Comptoir national d’escompte de Paris.

En 1942, il entre dans la Résistance à Lyon et commence à diffuser tracts et journaux clandestins dont Combat. En janvier 1943, après avoir tenté, sans succès, de rejoindre les Forces françaises libres, il entre dans l’Armée juive (AJ) par l’entremise d’un ancien camarade de l’école de travail de Strasbourg, Ernest Lambert, qu’il rencontre fortuitement dans le train qui le ramène de Toulouse à Lyon. Quelques semaines après cette rencontre, il prête serment à l’Armée juive. La première mission qui lui est confiée par le comité directeur de l’AJ est la mise en place de groupes francs dans la zone d’occupation italienne et l’instruction militaire de ces jeunes recrues pour la plupart issues du Mouvement de jeunesse sioniste (MJS). Jacques Lazarus s’installe alors à Grenoble.

En octobre 1943, suite à l’invasion de la zone italienne par les Allemands, le comité directeur de l’AJ décide de mettre en place des maquis en vue d’une instruction militaire plus approfondie. En novembre, Lazarus conduit le premier groupe de jeunes de l'Armée Juive au maquis du Rec (Tarn), placé sous l’autorité de l’Armée secrète. Quelques temps plus tard, la décision est prise de créer un maquis juif autonome à Biques, placé sous le commandement de Sal Meyer puis de Pierre Loeb. Jacques Lazarus, quant à lui, est chargé de l'inspection régulière du maquis de l’Armée Juive (AJ) qui se déplace au gré des circonstances. C'est au cours d'une de ses visites, en mars 1944, qu'il récupère, aidé de quelques paysans, un parachutage allié lâché par erreur dans la région de Paulinet (Tarn). Cette action figure parmi celles qui lui valent après-guerre une citation à l’ordre de la brigade.

En juin 1944, l’AJ charge Jacques Lazarus de se rendre à Paris pour mettre au point les modalités d'un accord avec un agent de l’Intelligence Service, Charles Porel, en réalité un agent de l’Abwher. L’objectif de cet accord est de créer une Légion juive qui irait combattre avec les Alliés comme cela avait été le cas pendant la Première Guerre mondiale. Lazarus est arrêté le 17 juillet 1944 avec son camarade le rabbin René Kapel dans une voiture censée les conduire à un terrain d'envol pour l'Angleterre. Ils sont emmenés au siège de la Gestapo au 180, rue de la Pompe. Plusieurs dirigeants de la section parisienne de l'Armée Juive (AJ) tombent dans le guet-apens tendu par Charles Porel. Emprisonnés à Fresnes, ils sont transférés le 11 août 1944 au camp de Drancy d’où ils sont déportés le 17 août 1944 par le dernier convoi à quitter la gare de Bobigny. Jacques Lazarus s'évade du train avec plusieurs de ses camarades quatre jours plus tard et rejoint Paris libéré.

Démobilisé le 31 décembre 1944, il est nommé sous-lieutenant de réserve par décret du 26 juillet 1945. Après la Libération, Jacques Lazarus milite pour la reconnaissance officielle de l’Organisation juive de combat (nouvelle appellation de l’Armée juive depuis juin 1944) par les autorités de la Résistance. Il participe à de nombreux meetings de soutien à la cause de la Palestine juive et fait partie de la délégation des combattants et résistants juifs qui remet à David Ben Gourion, alors président de l’exécutif de l’Agence juive, le drapeau bleu-blanc qui, dans le maquis AJ, avait flotté à côté du drapeau tricolore.

Secrétaire général du service central des déportés israélites (SCDI), installé boulevard Haussmann, dans des bureaux mis à la disposition du service par un camarade de résistance également évadé du convoi du 17 août, André Amar, il se consacre avec d’autres résistants à l’accueil et à la réinsertion des rares rescapés rentrant de l’enfer nazi.

En mai 1946, mandaté par l'ORT- France (Organisation-Reconstruction-Travail) pour se rendre en Algérie, il y fonde l’ORT Alger. Il est également chargé de recruter pour l'école de marine de la Ligue maritime juive, dans les trois pays du Maghreb, des jeunes volontaires qui seront formés comme matelots dans la perspective de la création d'une marine juive palestinienne. Tour à tour secrétaire général du Comité Juif Algérien d'Études Sociales, organe de défense des intérêts moraux du judaïsme algérien, représentant de l'Afrique du Nord au Congrès Juif Mondial, il crée et anime le mensuel Information Juive dont il assure la direction jusqu'en 1998.

Titulaire d’une citation à l’ordre de la brigade avec attribution de la croix de guerre avec étoile de bronze le 4 juillet 1945, Jacques Lazarus est décoré de la médaille de la Résistance française par décret du 22 septembre 1945 (transformée en médaille de la Résistance avec rosette par décret du 24 avril 1946). Le titre d’interné résistant lui est accordé le 28 décembre 1954, converti en celui de déporté résistant le 22 décembre 1988.

Officier de la Légion d’honneur, Jacques Lazarus décède le 7 janvier 2014 l’âge de 98 ans. Il a retracé son action dans le cadre de l'Armée juive dans un livre témoignage, Juifs au combat, publié en 1947 par les éditions du Centre de documentation juive contemporaine.


Auteur : Fabice Bourrée

Sources et bibliographie
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16P 345 139
Ordre de la Libération, archives de la commission nationale de la médaille de la Résistance française
Mémorial de la Shoah, Paris :
- CMXX-2, fonds Lublin
- DLXI-56, témoignage de Jacques Lazarus

Juifs au Combat, témoignage sur l’activité d’un mouvement de résistance, par Jacques Lazarus (Capitaine Jacquel) chef du groupe parisien de l’Organisation Juive de Combat, Centre de Documentation Juive Contemporaine, Série « Etudes et monographies » n°9, Editions du Centre, 1947.
Jacques Bernard Sadon, Jacques Lazarus : Itinéraire d'un juif de France dans le siècle (1943-1962), Conform édition, 2011.
Georges Brandstatter, Combattants juifs dans les Armées de Libération, Rennes, Ouest France, 2015.