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Organisation de la propagande par le gouvernement de Vichy.

Légende :

Le ministre de l'Intérieur donne instruction aux préfets pour l'organisation de la propagande gouvernementale. 6 septembre 1941

Genre : Image

Type : Note du gouvernement aux préfets

Producteur : MUREL PACA

Source : © © archives départementales des Bouches-du-Rhône, 72 W 3 Droits réservés

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Auvergne) - Allier - Vichy

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Analyse média

Pierre Pucheu, devient en juillet 1941 secrétaire d'Etat à l'Intérieur dans le gouvernement de l'amiral Darlan. Sa note du 6 septembre 1941 est adressée aux préfets de la zone libre. En effet, le gouvernement de Vichy n'a guère de marge de manœuvre en zone occupée. Dès le premier paragraphe, Pierre Pucheu pose l'importance politique de la propagande. Les corps intermédiaires (Parlement, syndicats, élus locaux)ont été interdits ou mis en sommeil par le gouvernement. La presse est soumise à la censure. La propagande doit remplir le vide ainsi créé etcontrercelle qui se manifeste déjà dans la presse clandestine de la Résistance.

            Le terme « propagande sociale du Maréchal » a pour but de légitimer une opération de contrôle obsessionnel de l'opinion publique au bénéfice du gouvernement. Les préfets et sous-préfets sont responsables de la mise en œuvre de la propagande. Il n'y a aucun frein à l'intervention de l'Etat qui doit enavoir le monopole auprès de l'opinion publique. On ne saurait être plus clair dans l'affirmation que la liberté d'informer n'existe plus.

            Les services de propagande se déclinent du département jusqu'à la commune à travers les organisations créées par le régime de Vichy. Les délégués sont directement soumis à la surveillance des préfets. Ils doivent s'en tenir aux éléments de langage fournis par le gouvernement : « Il vous appartient de veiller à ce que les divers organismes et leurs représentants s'en tiennent strictement à leur rôle. » La ligne politique est fixée à Vichy et ne souffre aucune divergence.

            Pierre Pucheu dans cette note introduit une nouvelle conception de la gestion des services de l'Etat : la logique du secteur privé est jugée plus efficace que celle de l'administration. Les délégués ne sont pas des fonctionnaires mais « des chargés de mission révocables à tout moment.La nouvelle organisation ne doit pas avoir le caractère d'un service administratif proprement dit : il convient de lui donner l'élasticité, la souplesse qu'exige la complexité de sa tâche et d'éviter qu'elle apparaisse comme une sorte d'émanation de l'Administration. » L'administration est jugée trop rigide et finalement inapte à cette nouvelle tâche qui consiste à endoctriner la population.

            L'importance politique de la propagande est réaffirmée à la fin de la note : le secrétaire général de l'Information, Paul Marion, est bien sûr concerné mais c'est le ministère de l'Intérieur qui prend en main l'organisation de la propagande et mobilise lespréfets,représentants de l'Etat dans les départements.

 https://museedelaresistanceenligne.org/musee/doc/pdf/492.pdf 

 


Sylvie Orsoni

Contexte historique

Le gouvernement de Vichy a très tôt créé les instruments de contrôle et de censure de toute information : un secrétariat à l'information(loi du 15 juillet 1940) puis l'Office français d'information (loi du 25 novembre 1940). L'étouffement de toute voix discordante ne suffit pas. Il faut enraciner le nouveau régime dans la population et pour cela développer la propagande. Elle se décline de deux façons : le culte du Maréchal qui est facilité par la popularité de Philippe Pétain et la mise en valeur des réalisations gouvernementales plus difficiles à valoriser dans un contexte de privations multiples et d'occupation d'une partie du pays. La propagande relève donc autant du ministère de l'Intérieur que de celui de l'Information.

            Pierre Pucheu (27 juin 1899-20 mars 1944) est reçu brillamment à l'Ecole normale supérieure mais rejoint rapidement les entreprises du groupe Worms. Membre du PPF après le 6 février 1934, il devient en février 1941 secrétaire d'Etat à la production industrielle dans le gouvernement de l'amiral Darlan. Partisan d'une collaboration active avec l'Allemagne, il est nommé ministre de l'Intérieur en juillet 1941. Il représente dans le gouvernement les technocrates liés aux milieux d'affaires et une conception du fonctionnement de l'administration qui consiste à introduire dans les services publics la logique du secteur privé jugé plus efficace, ce qui deviendra dans les années 1990 le New Public Management. Pierre Pucheu exprime cette conviction à plusieurs reprises dans la note qu'il envoie aux préfets.Il quitte le gouvernement en avril 1942 après le retour de Pierre Laval. Après le débarquement allié en Afrique du nord, il tente de changer de camp et se rend au Maroc. Son engagement anticommuniste et son rôle dans la désignation d'otages communistes fusillés par les Allemands à Chateaubriant en octobre 1942 fait échouer cette tentative.  Arrêté à Alger en mai 1943, il est jugé, condamné à mort et fusillé le 20 mars 1944.

             Paul Marion, membre du Parti populaire français(PPF) de Jacques Doriot depuis 1936 est le rédacteur en chef de l'Emancipation nationale, journal du PPF. Il dirige à partir de février 1941 l'Office français d'information. L’historienDenis Peschanski illustre la conception de l’information qu'a Paul Marion qui déclare « Personne n'aurait l'idée de discuter d'un problème de mathématique ou d'une formule de chimie.Or à certaines époques, les conclusions qu'imposent les événements forment une résultante tout aussi indiscutable. ». La presse écrite de la zone sud est pour lui l'instrument légitime de la Révolution nationale. Paul Marion qui demeure jusqu'à Sigmaringen aux côtés du maréchal Pétain est condamné en 1948 à 10 ans de prison mais gracié en 1953 pour raison médicale.

 


 

                                                                                                          Auteure : Sylvie Orsoni

 

Sources

Mencherini Robert, Vichy en Provence, Midi Rouge, ombres et lumières, tome 2,Paris, Syllepse, 2009.

Peschanski Denis, Une politique de la censure?Cahiers de l'Institut du Temps présent, n°8 juin 1988. Politiques et pratiques culturelles de la France de Vichy, pp. 41-53.