Robert Gamzon

Légende :

Fondateur puis commissaire national des Eclaireurs israélites de France depuis 1939, Robert Gamzon est à l'origine de la Sixième, nom donné à l'organisation clandestine des EIF puis des maquis installés dans la région de Vabre à la Malquière d'abord puis à Laroque et Lacado. En 1944, il commande la 2e compagnie du CFL 10, dit "compagnie Marc Haguenau" qui prend part à l'attaque d'un train allemand à Mazamet et à la reddition de la garnison allemande de Castres.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Mémorial de la Shoah / Coll. Jacques Lifchitz Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : Vers 1939

Lieu : France

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Contexte historique

Robert Gamzon est né le 30 juin 1905 à Lyon. Il est le petit-fils, du côté maternel, d’Alfred Lévy, grand rabbin de France. Son père, Lazare Gamzon, est ingénieur des mines. Sa mère, Noémie Lévy, est enseignante. En 1923, alors qu’il a dix-sept ans, Robert Gamzon fonde la branche juive du mouvement scout français, nommé les Eclaireurs Israélites de France (EIF). En 1925, Robert Gamzon obtient le diplôme d'ingénieur de l’Ecole supérieur d’électricité (Supélec). Il épouse Denise Lévy, qui appartient aux EIF, le 31 juillet 1930. Le couple a quatre enfants, les deux derniers, Elie et Myriam, naissent respectivement en juin 1943 et en novembre 1944. Spécialisé dans l’électro-acoustique, Gamzon est chargé en 1937 de la sonorisation de l’Exposition universelle de Paris.

Commissaire national des EIF en 1939, il est mobilisé au moment de l’entrée en guerre de la France et participe aux combats de mai-juin 1940 comme officier des transmissions (bataillon télégraphique 804 de la Ve armée). Il reçoit la croix de guerre pour avoir détruit la centrale téléphonique de Reims avant qu’elle ne tombe aux mains des Allemands. Démobilisé, révoqué de son grade parce qu’il est juif, il se rend en zone non-occupée, d’abord à Clermont-Ferrand puis à Moissac où les EIF protègent les enfants juifs rescapés de l’Exode. Robert Gamzon créé, à leur intention, des écoles rurales à Lautrec près d’Albi et à Charry, près de Moissac. Sa proposition pour l’obtention de la médaille de la Résistance mentionne que "dès les premières poursuites contre les Israélites", il créé des organismes pour défendre les jeunes juifs traqués. Lorsque les juifs commencent à être internés à Gurs, Robert Gamzon envoie dans le camp d’internement des jeunes femmes, cheftaines membres des EIF, comme assistantes sociales. Elles s’efforcent d’y organiser des évasions.

En 1942, Gamzon est nommé au conseil d’administration de l’Union générale des israélites de France (UGIF), organisme créé par le régime de Vichy le 29 novembre 1941 et dont le siège est installé à Paris. Il s’agit de servir d’interlocuteur, au nom des juifs en France tous tenus d’y adhérer, aux pouvoirs publics. Robert Gamzon, lui, profite de ce poste pour développer les organisations clandestines juives dans la capitale déchue. Au moment des grandes rafles de l’été 1942, il parvient à organiser la protection des jeunes juifs sous de fausses identités grâce au Service social des jeunes du mouvement des EIF formé en août 1942, connu pendant la clandestinité sous le nom de "Sixième" : 700 à 800 jeunes juifs ont ainsi été sauvés. Le Service social organise leur évasion vers la Suisse ou l’Espagne.

En décembre 1943, les EIF fondent le maquis de La Malquière, une vieille ferme dans un hameau de la commune de Viane dans les monts du Lacaune, à l’est de Vabre. Ses membres sont, pour la plupart, issus du chantier rural de Lautrec, dissout par Vichy en 1943. Le chef de ce petit groupe juif, Roger Cahen, dit lieutenant Roger, se charge d'accueillir les nouveaux venus. En mars 1944, La Malquière est abandonnée et une partie des EIF s'installe à La Roque dont la direction est confiée à Roger Cahen (lieutenant Roger) et à Gilbert Bloch (lieutenant Patrick). Une autre section prend place à Lacado (avril 1944) sous les ordres d’Adrien Gensburger (Sergent Adrien). L’ensemble est placé sous le commandement de Robert Gamzon dit capitaine Lagnès. Les groupes commandés par Gamzon sont rattachés aux maquis de Vabre dirigés par Guy de Rouville. Le 15 mai 1944, Robert Gamzon est nommé par de Rouville aux fonctions de commandant de la 2e compagnie des maquis de Vabre avec le grade de lieutenant. La Compagnie est intégrée au Corps franc de la Libération 10 du Tarn relevant de l’Armée Secrète. La zone A du Tarn dont ils dépendent est commandée par Pierre Dunoyer de Segonzac.

Le 1er juin 1944, un accord intervient entre les EIF et l’Armée juive (AJ), en vertu duquel l’autorité militaire est confiée à l’AJ devenue OJC, Organisation juive de combat. Après le débarquement, la 2e compagnie prend le nom de "Compagnie Marc Haguenau" en souvenir d'un chef EIF arrêté à Grenoble par la Gestapo et qui se défenestra le 18 février 1944 pour ne pas parler.

Robert Gamzon et ses hommes, reçoivent plusieurs parachutages sur le terrain Virgule dont ils ont la responsabilité. Ils sont attaqués par l’armée allemande les 7 et 8 août 1944 : les combats font sept morts dans les rangs des maquisards. Brièvement dispersés, ils se regroupent dix jours plus tard et lancent une attaque sur un train allemand transportant des canons et des munitions entre Mazamet et Castres le 19 août 1944. Le maquis reçoit la reddition du commandant allemand et de ses soixante hommes de troupe ce qui permet la libération des deux villes.
Pour l’attaque du train de Mazamet, Gamzon reçoit une lettre de félicitations du commandant Dunoyer de Segonzac : "Je vous confirme ce que je vous ai dit trop rapidement hier : votre unité s’est battue comme se battent depuis toujours les meilleurs soldats français; leur attitude au feu a été belle, les résultats qu’ils ont obtenus ont dépassé mon attente. […] Je vous demande de bien vouloir transmettre mon admiration à votre escadron, très simplement. Permettez-moi enfin de vous dire que cet escadron doit infiniment à l’apôtre magnifiquement dévoué que vous êtes. Au dévouement, vous ajoutez un courage peu banal. J’ai demandé pour vous une citation à l’Ordre de l’Armée."

Début septembre 1944 est formé à Castres sous le commandement de Dunoyer de Segonzac un régiment de cavalerie qui par la suite s'intitula 12e Régiment de Dragons de Reconnaissance (12e RDR). Un certain nombre d'anciens de la Compagnie Marc Haguenau s'y engagèrent pour la durée de la guerre. Grièvement blessé le 21 juillet 1944, le capitaine Robert Gamzon, ne peut suivre son unité qui, après un passage par le Centre, rejoint la 1ère Armée française à Dijon et est engagée dans la campagne des Vosges et d’Alsace.

Titulaire de la croix de guerre 1939-1945, Robert Gamzon est décoré de la médaille de la Résistance française par décret du 15 octobre 1945, transformée en médaille de la Résistance avec rosette le 24 avril 1946.

Après la guerre, Robert Gamzon fonde l’école Gilbert-Bloch d’Orsay pour reconstituer une équipe de cadres pour la communauté juive décimée par la Shoah. Il part, en 1949, s’établir en Israël. Il est nommé en 1959 comme maître de recherche du département électronique de l’Institut Weizmann tout en continuant à s’impliquer au sein des Eclaireurs israélites. Il se noie sur la plage de Palmachim le 1er septembre 1961.


Auteurs : Guillaume Pollack et Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : GR 16P 241 431.
Ordre de la Libération, archives de la commission nationale de la médaille de la Résistance française.
Isaac Pougatch, Un bâtisseur : Robert Gamzon, Édition Service Technique pour l'Éducation, Paris, 1972.
Valérie Ermosilla (Pietravalle), La Résistance juive dans le Tarn 1939-1944, réalités et représentations, mémoire de maîtrise sous la direction de Pierre Laborie et Jean Estèbe, Université Toulouse Le Mirail, 1987.
Adrien Gensburger, "Les EI au maquis", Revue d’Histoire de la Shoah, Centre de Documentation Juive Contemporaine, 1997/3 n° 161, pages 74 à 79.