La 35e Brigade FTP-MOI : organisation et combats

Légende :

Camion incendié, place du Capitole à Toulouse

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Lieu : France - Occitanie (Midi-Pyrénées) - Haute-Garonne - Toulouse

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Contexte historique

Sous le commandement de Marcel Langer et de Jacob Insel, tous deux anciens membres des Brigades Internationales en Espagne, les premières opérations (sabotages d’installations électriques, incendies de camions allemands) ont lieu à l’automne 1942, en coopération avec la 2e Brigade de Guérilleros Espagnols (Haute-Garonne) dirigée par José Linares Díaz, ancien commandant de l’armée républicaine espagnole.

Après l’arrestation de Marcel Langer, le 5 février 1943, les départements qui dépendent de la 35e Brigade forment une inter-région FTP-MOI, dont Victor Bardach (dit Jan Gerhard) est le commandant militaire, Jacob Insel le responsable politique et Sewek Michalak le responsable technique.

Jan Gerhard, ancien officier polonais, impulse un nouveau souffle : il s’agit de frapper durement l’occupant allemand, mais aussi les représentants de Vichy. Très présent sur le terrain, proche des combattants, préparant minutieusement les opérations, il forge l’unité et la force de la 35e Brigade. Après que Marcel Langer ait été guillotiné, le 23 juillet 1943 à Toulouse, Jan Gerhard organise les représailles. L’avocat général qui avait requis la mort contre Marcel Langer est exécuté le 10 octobre 1943. L’unité prend alors le nom de 35e Brigade FTP-MOI Marcel Langer.

A la fin de 1943, le rapprochement entre le XIVe Corps de Guérilleros espagnols en France et les FTP-MOI de la Zone Sud est à son maximum. Le 26 février 1944, Jan Gerhard, en qualité de "Commandant Militaire, Camarade Jean" fait ses adieux à la "35e Brigade des FTP ″LANGER″" via l’ "Ordre du jour spécial n° 7". Ce document est cosigné par le "Camarade Serge (commissaire aux effectifs)" qui n’est autre que Luis Fernández Juan, l’un des dirigeants du XIVe Corps de Guérilleros espagnols en France, qui devient en mai 1944 le commandant en chef de la Agrupación de Guerrilleros Españoles.

Une large part des actions militaires de la 35e Brigade ont lieu à l’intérieur des villes de Toulouse, Agen et Montauban. Face à un ennemi surpuissant et supérieur en nombre, il faut attaquer l’ennemi, se retirer et recommencer plus loin. Un service de renseignement est créé, composé essentiellement de femmes. Il est chargé avant chaque opération de collecter toutes les informations utiles. Le haut niveau de risque réclame l’observation de règles de sécurité strictes.

Chaque opération est préparée après des filatures poussées. Une fois un plan défini, l’exécution est réalisée par un groupe de trois combattants : un tireur et deux protections.

Les combattants recherchés par la police deviennent des clandestins bénéficiant d’une fausse carte d’identité et d’un appointement pour survivre. Logés dans des chambres louées par la Brigade, ils doivent rendre compte de leurs actions avant de recevoir de nouvelles instructions. Etant peu nombreux, ils sont souvent déplacés dans les départements du midi toulousain. En Lot-et-Garonne et en Tarn-et-Garonne, la 35e Brigade établit de petits maquis servant de caches pour le matériel et pour les militants en réserve.

Les actions menées visent trois sortes d’objectifs.

En premier lieu, il s’agit de saboter les voies ferrées afin de gêner l’approvisionnement de la Wehrmacht en vivres et munitions. Ainsi les déraillements se multiplient sur les principaux axes : Toulouse-Bordeaux, Toulouse-Montpellier, Toulouse-Paris…

En second lieu, il s’agit de frapper des militaires allemands, des responsables de la Milice et des partis collaborationnistes. La liste des personnes visées est impressionnante tant par le nombre que par la qualité. Mentionnons : Costes, secrétaire général des Francs-gardes de la Milice à Toulouse ; Mas, chef milicien à Toulouse ; Lespinasse, avocat général qui avait requis la peine de mort contre Marcel Langer ; le général Philippon, chef milicien ; l’abbé Sorel, membre du Conseil national, organe consultatif de Vichy. Parmi les opérations à grand retentissement, citons deux attentats à la bombe : au cinéma Les Variétés qui diffusait un film antisémite, à Toulouse le 1er mars 1944 ; contre un tramway transportant des soldats allemands, à Toulouse le 1er avril 1944 ; lors de cette dernière opération, organisée en collaboration avec la 2e Brigade de Guérilleros Espagnols, 17 Allemands sont tués et une cinquantaine blessés.

En troisième lieu, il s’agit de priver l’ennemi de récoltes prêtes à être engrangées. Au cours de l’été 1943, plusieurs dizaines de gerbières partent en fumée et parfois avec elle, du bétail et du matériel, dans différentes communes autour d’Agen et de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne) où la brigade a formé un groupe composé de jeunes Italiens antifascistes refusant le départ pour le Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne. Ces actions, quoiqu’elles visaient des paysans maréchalistes, furent abandonnées car impopulaires en milieu rural.

Le nombre et l’impact des opérations de la 35e Brigade conduit la Direction centrale de la Police de sureté à envoyer une équipe spéciale à Toulouse pour la traquer, en mars 1944. Une longue enquête aboutit à une quinzaine d’arrestations en avril 1944, dont celles de Marc Brafman, Odette Dopaso, Sewek Michalak, Damira Titonel. La direction de la Brigade est démantelée.

Zeef Gottesman prend le commandement des rescapés. Certains sont dirigés vers le Lot-et-Garonne. Le 21 juin 1944, une partie d’entre eux, rassemblés par Enzo Lorenzi (principal auteur de l’exécution de l’avocat général Lespinasse) participe à la bataille de Castelnau-sur-l’Auvignon aux côtés de la 35e Brigade de Guérilleros Espagnols du Gers. Zeef Gottesman (commandant Philippe) est tué lors de la libération de Toulouse le 19 août 1944.


Auteur : André Magne

Sources et bibliographie
Service Historique de la Défense (Vincennes) : GR 19 P 31-24, dossier 35e Brigade.
Archives de Rolande Trempé.
Archives d’André Magne.
Jean-Yves Boursier, La guerre de partisans dans le sud-ouest de la France 1942-1944 - La 35e Brigade FTP-MOI, Paris, L’Harmattan, 1992.
Miguel Ángel Sanz, Luchando en tierras de Francia, Prólogo de Jean Cassou, Ediciones de la Torre, 1981.
Hommage à la 35e brigade FTP-MOI Marcel Langer, ouvrage collectif édité par le Comité de quartier Saint-Michel, Tisséo, Juillet 2008.