Les bundistes dans la libération de Lyon et de sa banlieue

Légende :

Le Réveil. Journal de la jeunesse socialiste juive de France. Juillet 1944.

Type : Presse clandestine

Source : © YIVO, RG 1400, B 3 F 17. Droits réservés

Date document : Juillet 1944

Lieu : France

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Contexte historique

Les plus anciens du mouvement bundiste ont certes favorisé des activités sociales de résistance les plus urgentes, dans lesquelles ils ont estimé être plus efficaces. Toutefois, dans plusieurs de leurs publications clandestines qui ont été conservées, même si leurs propos sont essentiellement d’ordre politique et idéologique, ces derniers mentionnent aussi le combat armé. Le journal clandestin Undzer shtime [Notre voix] de mai 1944 présente ainsi la lutte armée comme la suite nécessaire de l’activité sociale de résistance :
En premier lieu, il fallut maintenir en vie, au sens littéral du terme, la masse juive condamnée à être réduite à la famine. […] Mais les institutions représentatives des associations juives de France auraient commis une erreur si elles s'étaient limitées à ce travail de défense et de résistance. Il fallait alors et il faut aujourd'hui encore et plus que jamais que les masses juives, de façon organisée et en tant que juives, prennent part aux combats pour la liberté et la résistance du pays tout entier".

Selon des témoignages, beaucoup d’anciens skifistes ainsi que d’autres jeunes nouvellement recrutés dans leurs rangs se trouvent animés du désir de venger leurs proches qui ont été arrêtés et déportés et aspirent à se battre les armes à la main. A partir de 1943, cette dimension combattante s’ajoute à la résistance sociale dans laquelle s’implique également la jeunesse socialiste juive en France. Un numéro de son journal clandestin Le Réveil de juillet 1944 (donc publiée après le débarquement allié du 6 juin 1944) insiste en effet à plusieurs reprises sur la nécessité de la lutte armée, et appelle en ce sens à la mobilisation :
"Dans tous les pays dans toutes les armées libératrices nos frères juifs participent énergiquement à la lutte. En France le peuple juif a donnent [sic] ses meilleurs fils dans ce combat. Et ce n’est pas un hasard. Notre sort, le sort du peuple juif de France est étroitement lié avec le sort de nos frères français opprimés. Resseront [sic] encore nos liens. Sabotons encore plus énergiquement la machine de guerre allemande. Par notre lutte incessante aidons les armées de la libération à finir plus rapidement la guerre".

Pas un jeune ne doit rester à l’écart il existe des groupes de combat au sein de la jeunesse socialiste juive française joignez-vous sans délai à nous. Plus nous aurons d’effectifs, plus nous serons forts et plus la lutte sera efficace".

C’est au sein des FTPF qu’une quinzaine de jeunes bundistes (quatorze hommes et une femme) issus du groupe formé à Saint-Didier-au-Mont-d’Or participe à la libération de Villeurbanne (au cours de laquelle périt au combat Charles Szulc en août 1944 à l’âge de 21 ans) puis de Venissieux. D’autres membres du groupe bundiste de la région lyonnaise, tel Maurice Kahn, meurent à la fin de la guerre, sans que nous soyons en mesure de connaître le contexte précis de leur mort ni de certifier qu’ils sont morts les armes à la main. Si leurs faits d’armes restent modestes, Nicole Mandelmileck-Zoberman, Maurice Rothnemer et Samuel Zoberman estiment néanmoins dans leurs souvenirs consignés en 1977 que "malgré l’échec relatif et ponctuel", les jeunes bundistes ont eu "la sensation enivrante de [s’]être un peu libérés [eux]-mêmes".


Auteur : Constance Pâris de Bollardière

Sources et bibliographie (sélection) :
Catherine CollompRésister au nazisme. Le Jewish Labor Committee, New York, 1934-1945, Paris, Editions du CNRS, 2016.
Nicole Mandiolinier, Maurice Rothnemer, et Raoul Rouan, "Les jeunesses du BUND dans la résistance", Combat pour la diaspora, 23-24, 1977, p. 25-34.

Henri Minczeles, "La résistance du Bund en France pendant l’Occupation", Le Monde juif. Revue d’Histoire de la Shoah, 154 (1) 1995, p. 138-153.
Henri Minczeles, "Témoignage : l’aventure du Réveil des jeunes", Archives Juives. Revue d’histoire des Juifs de France, 28 (1), 1995, p. 60-67.
Pinkhes Mints [Aleksander], In di yorn fun yidishn umkum un vidershtand in Frankraykh: perzenlekhe zikhroynes [Dans les années de résistance en France : souvenirs personnels], Buenos Aires, Yidbukh, 1956.
Renée PoznanskiPropagandes et persécutions. La Résistance et le "problème juif", 1940- 1944, Paris, Fayard, 2008.
Renée PoznanskiLes Juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale, Paris, Hachette Littératures, 1997 [1994].
Fajwel SchragerUn militant juif, trad. du yiddish [Oyfn rand fun tsvey tkufes (zikhroynes)] par Henry Bulawko, Paris, Les Editions Polyglottes, 1979.
Interview de Cécile Steingart par Marsha Rozenblit le 6 novembre 1975, William E. Wiener Oral History Library of The American Jewish Committee, Holocaust Survivors Project, New York Public Library.
Interview de Henry Steingart par Marsha Rozenblit le 30novembre 1975, William E. Wiener Oral History Library of The American Jewish Committee, Holocaust Survivors Project, New York Public Library.