Henri Krasucki

Légende :

Photographie anthropométrique d'Henri Krasucki - Vue de face (24 mars 1943).

Si Henri Krasucki a accédé à une certaine notoriété du fait de ses fonctions de secrétaire général de la CGT, sa jeunesse résistante reste plus mal connue. Issu d’une famille juive polonaise réfugiée en France, il exerça des fonctions importantes au sein des Jeunesses communistes lors de la période clandestine du parti, jusqu’à son arrestation en 1943.

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Archives de la Préfecture de Police de Paris Droits réservés

Détails techniques :

Photographie noir et blanc

Date document : 24 mars 1943

Lieu : France - Ile-de-France - Paris

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Si Henri Krasucki a accédé à une certaine notoriété du fait de ses fonctions de secrétaire général de la CGT, sa jeunesse résistante reste plus mal connue. Issu d’une famille juive polonaise réfugiée en France, il exerça des fonctions importantes au sein des Jeunesses communistes lors de la période clandestine du parti, jusqu’à son arrestation en 1943.

Né en 1924, Henri est le fils d’un couple de militants communistes polonais travaillant tous deux comme ouvriers dans le textile, Isaac Krasucki et Léa Borszczewska. Isaac fuit en 1926 la Pologne du maréchal Pilsudski et s’installe à Paris, dans le quartier de Belleville, qui compte une importante communauté yiddish. Son épouse le rejoint avec leur jeune enfant en 1928. Henri participe en 1934, à l’âge de 10 ans, à sa première grande mobilisation lors de la manifestation "antifasciste" organisée par les forces de gauche en réaction au 6 février 1934. En 1938, contraint de stopper des études trop onéreuses, il obtient un CAP d’ajusteur et est embauché chez Renault. Il adhère à la section des Jeunesses communistes de Belleville, l’une des plus actives de Paris, où il fait la connaissance de Pierre Georges, le futur colonel Fabien.

Lorsque le PC est interdit par le gouvernement Daladier pour ses positions jugées antipatriotiques du fait du pacte germano-soviétique, les Krasucki restent fidèles à l’appareil. En juin 1940, à l’arrivée des Allemands, ils envisagent de quitter Paris. Mais en l’absence de contacts pour aller en zone sud, ils finissent par rester dans la capitale. Henri devient responsable de la section juive de la Main-d’œuvre immigrée (MOI) du XXe arrondissement. Il s’occupe du recrutement et organise avec les jeunes de son quartier des distributions de tracts, dans un contexte difficile puisque la répression initiée par le gouvernement Daladier contre les "menées communistes" est intensifiée après la défaite par le régime de Vichy. En mai 1941, Isaac et Henri Krasucki jugent plus prudent du fait de leurs activités clandestines de quitter leur domicile pour s’installer dans une chambre Porte des Lilas. Henri est également membre de "l’Organisation spéciale" (OS) chargée des opérations de maintien de l’ordre au sein du PC. Il participe à ce titre à la manifestation du 13 août 1941 organisée à Paris pour dénoncer l’attaque de l’URSS par les forces du Reich.

L’opération Barbarossa met fin aux ambiguïtés de la stratégie communiste depuis septembre 1939. Le PC renoue avec la ligne antifasciste et bascule dans la Résistance. Il est également la première organisation à prôner la lutte armée contre l’occupant à la suite de directives reçues de Moscou. S’il ne fait pas partie des Bataillons de la jeunesse mis en place dès l’été 1941, Henri Krasucki intègre les Francs-tireurs et partisans, la branche armée du PC, au début 1942. Il reçoit pour mission de recruter les jeunes de la section juive de la MOI qu’il juge les plus aptes à rejoindre les FTP-MOI. Il intègre en août 1942 en tant que "commissaire aux effectifs" le triangle de direction de l’organisation communiste de la jeunesse juive (OCJJ).

En janvier 1943, Isaac Krasucki, qui participait à des actions de sabotages contre les entrepreneurs travaillant pour le Reich, est arrêté et envoyé à Birkenau, où il meurt. Les brigades spéciales (BS) entament leur filature contre les organisations de la MOI parisienne. Henri Krasucki et sa compagne Paulette Sliwka sont pistés. Les policiers découvrent leur planque située au 8 rue Stanislas-Meunier. Les BS effectuent une surveillance de l’immeuble pour repérer les activités et les contacts du couple. Le 23 mars 1943, Henri Krasucki, Paulette Sliwka et 57 autres jeunes juifs sont arrêtés. Après une série d’interrogatoires particulièrement violents, ils sont mis au secret à la prison de Fresnes. Le 21 juin 1943, Henri Krasucki et Paulette Sliwka sont transférés à Drancy. Ils sont déportés comme juifs et non comme résistants vers Auschwitz par le convoi 55 du 23 juin 1943.

A Auschwitz, Henri Krasucki est affecté dans un camp annexe, la mine de Jawischowitz. Il noue des contacts avec des militants communistes et participe aux activités du Comité international qui développe au sein du camp des activités de solidarité. Transféré en janvier 1945 à Buchenwald après une "marche de la mort", il est libéré en avril 1945. A son retour de déportation, il passe un CAP d’ajusteur et obtient la nationalité française en 1947. Il mène une carrière syndicale qui l’amène jusqu’à la tête de la CGT dont il devient le secrétaire général en 1982. 


Auteur : Fabrice Grenard

Sources et bibliographie
Service historique de la Défense, Vincennes, GR 16 P 323368 (dossier individuel d’Henri Krasucki).
Archives de la Préfecture de Police de Paris, GB 125 (affaire de la MOI) et GB 181 (Henri Krasucki).
Stéphane Courtois, Denis Peschanski, Adam Rayski, Le Sang de l'étranger. Les immigrés de la MOI dans la Résistance, Fayard, 1994.
Annette Wieviorka, Ils étaient juifs, résistants, communistes, Perrin, 2018.