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La villa Lambert - Chatou


Auteur: Ulysse Darpas - Lina Zermani - 1ère ES2 - Lycée Saint-Erembert

Pendant la 2ème guerre mondiale les résistants FFI de Chatou s’installèrent dans le château de la pièce d’eau, la Villa Lambert. Ils installèrent sous bonne garde dans le garage de la propriété une quarantaine de prisonniers [23 Allemands, dont deux grièvement blessés, ainsi qu’une vingtaine de miliciens et de femmes] mais ils furent très vite dénoncés par des collaborateurs auprès des Allemands fugitifs. Le 25 août 1944 les Allemands arrivent sur Chatou bien décidés à s’occuper des FFI…

SON HISTOIRE : En 1873, Louis-Etienne Lambert acquiert le parc de la pièce d’eau lors du morcellement, par la famille Lacroix, de l’ancien domaine du Seigneur de Bertin. Le nouveau propriétaire réalise un lotissement partiel, simultanément à la construction de sa propre demeure ; une voie privée bordée de murs de clôture sépare alors les maisons du parc du « château ». L’ensemble porte le nom de son promoteur, Villa Lambert. Le château de la Villa Lambert est conçu à partir d’un projet de l’architecte Alfred Gaultier en 1883.

LES FAITS EN RAPPORT AVEC LA RESISTANCE : Le 25 août 1944, des prisonniers allemands et des collaborateurs sont gardés par les FFI de Chatou à la villa Lambert, voisine du château de la Pièce d'Eau. Ce jour-là, les Allemands font un retour en force qui s’achève par les exécutions de 27 FFI. Depuis le 18 août 1944, date de leur entrée en action, les FFI de Chatou ont fait une quarantaine de prisonniers allemands et des civils (collaborateurs, agents de la Gestapo, interprètes...). Le 25 août, les prisonniers sont transférés à la villa Lambert, propriété voisine du Château de la Pièce d'Eau. Les Allemands étant revenus en force dans les environs de Chatou, le commandant Torset, chef des FFI de Chatou, donne l'ordre de dissimuler les armes et les brassards. Des volontaires se présentent pour garder les prisonniers sous le commandement de René Robert. Vers dix heures, les Allemands, sur l'indication d'un collaborateur, attaquent le château avec grenades et mitraillettes, appuyés par deux chars et deux autos-mitrailleuses. Une soixantaine de FFI est faite prisonnière.
Les Allemands réclament que leur soit indiqué le lieu de détention de leurs compatriotes. Pour éviter un inutile massacre, le commandant Torset prend la décision de rendre les prisonniers. Il conduit les Allemands à la villa Lambert. Il demande alors à ses camarades de libérer les prisonniers et conclut son ordre d'un "Vive la France ! Vive de Gaulle !". Les gardiens comprennent alors le sens du cri de ralliement de leur chef et ouvrent le feu. Le commandant Torset est immédiatement abattu d'une balle dans la nuque. Mais devant un ennemi supérieur en nombre, René Robert donne l'ordre de repli. Seul Henri Fisseux, grièvement blessé, reste sur place pour couvrir leur fuite. A court de munitions et ne voulant pas tomber entre les mains des Allemands, il se tire une balle de revolver dans la tête. Les Allemands furieux lui écraseront la tête à coups de crosse.
Les soldats et les civils allemands et français qui viennent d'être libérés désignent une douzaine de FFI qui sont frappés violemment avant d'être fusillés devant le château. Les Allemands n'en restent pas là, ils veulent se venger des "terroristes". Les SS désignent douze nouvelles victimes qui sont frappés violemment avec des tessons de bouteilles et la crosse des fusils. Les Allemands vont jusqu'à leur arracher les yeux. Ils sont ensuite abattus à bout portant. Trois FFI, Martial Fleury, Jean Legarou et André Couespel, sont obligés de creuser une tombe pour les fusillés puis une pour eux avant d'être exécutés à leur tour. Une Allemande, qui vient d'être libérée, désigne Lucien Gauthier, un chef de section. Celui-ci est frappé puis emmené au lieu de l'exécution. A ce moment on intervient auprès du commandant SS en invoquant les bons soins prodigués par Lucien Gauthier aux prisonniers. Au même instant, un motocycliste allemand se présente à l'officier SS et l'informe que les Américains sont signalés de l'autre côté de la Seine. Cette nouvelle sauva la vie de Gauthier. La troupe SS décide donc de quitter rapidement le château et y met le feu.
Le lendemain, 26 août, les corps sont exhumés. Leur identification est très difficile en raison des mutilations qu'ils ont subies. Le même jour, l'armée Leclerc entre à Chatou. Le 27 août, après une cérémonie à laquelle assistent près de 20.000 personnes, les 27 cercueils sont enterrés dans le cimetière de Chatou. Roger Deberdt faisait partie des FFI de Chatou. Son récit explique comment il a pu échapper de justesse au massacre. Le 23 août, il s'est porté volontaire, à la demande de son chef de section, René Robert, pour monter la garde au Château : "Le vendredi 25, la relève est arrivée. J'ai remis mon fusil au jeune Henri Richaume. Il avait seize ans comme moi. Il m'a même demandé ma veste car il avait froid. La nuit avait été calme, on pensait donc qu'ils étaient partis. Les premiers sont partis à 7 heures, ils devaient revenir à midi. Comme nous on était jeunes et qu'on n'avait pas de fiancée, on s'est dit qu'on allait rester là avec nos camarades. Au bout d'un moment, mon copain m'a dit qu'il voulait rentrer chez sa sœur car il avait faim et était fatigué. En cours de route, j'ai décidé de rentrer chez moi pour dormir un peu. J'étais à peine endormi que j'entendais la mitraillette. Ma mère me dit : "Ecoutes. Tu entends tirer. Cela vient du château." Effectivement, ils étaient en train de fusiller 27 personnes. Tout ça c'est le hasard parce qu'on aurait très bien pu rester là-bas. Personnellement, j'avais aucune raison de partir, c'est mon copain qui m'a poussé en me disant qu'il avait faim, soif et qu'il était fatigué". En entendant les coups de feu, Roger Deberdt décide d'aller voir ce qui se passe mais lorsqu'il s'aperçoit que le coin fourmille d'Allemands, il se cache dans un poulailler. "Le lendemain, quand on est revenu au château, on a vu tous les fusillés, dont le petit gars qui m'avait relevé la veille ! C'étaient mes copains d'école. J'avais seize ans et demi à l'époque. Le petit gars qui m'a relevé avait mon âge. Il était de Montesson. Le pauvre gosse, je ne l'ai jamais revu, il a été fusillé."

Un monument élevé dans le parc de la Mairie de Chatou perpétue le souvenir de ces 27 martyrs de la Résistance.

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