Persécutions antisémites

Après la prise de pouvoir d'Hitler, le peuple allemand est idéologiquement mis au pas. La doctrine raciale entre en application. L'antisémitisme le plus brutal, encouragé et banalisé, est légalisé par les textes officiels, amenant les Juifs au rang le plus bas que leur prévoyait Mein Kampf.
La France est à nouveau traversée par une vague d’antisémitisme reprenant vie dans les années 1930. Maurras et Xavier Vallat vitupèrent contre le « juif Blum ». Le régime de Vichy à peine installé s’engage de son propre chef dans une politique antisémite et veille à l’application de ses décisions en mobilisant ses services administratifs, policiers et judiciaires. Par sa connivence avec le Reich, l’État français se fait le complice de l’extermination.



                                                 Anti-Semitic Persecutions

After Hitler's takeover, the German people are ideologically called to order. The racial doctrine comes into effect. The most brutal anti-Semitism, encouraged and commonplace, is authenticated by official texts, bringing Jews to a lower rank than Mein Kampf predicted.

France is newly crossed by a wave of anti-semitism that is reborn in the 1930s. Maurras and Xavier Vallat revile against the "Jew Blum" The carefully installed Vichy regime undertakes its own anti-Semitic policies and enforces its decisions by mobilizing its administrative services, police, and judiciaries. By its acquiescence with the Third Reich, the French State becomes an accomplice in the extermination.


Traduction : Megan Berman

Auteur(s): Robert Serre
Source(s):

Marrus, Paxton, Vichy et les Juifs, Calmann-Lévy, 1981. Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, Valence, Peuple Libre/Notre Temps, 2006.

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Les Juifs installés, réfugiés ou incarcérés dans la Drôme haut ▲

 

L'antisémitisme hitlérien a conduit dans la Drôme de nombreux Juifs qui s'y croyaient à l'abri.
La Sarre, région limitrophe de la Lorraine, confiée à la Société des Nations après la Première Guerre mondiale, est rattachée au IIIe Reich par le plébiscite de 1935 et subit l'application des lois antisémites d'Hitler. Profitant de la possibilité qui leur était laissée pendant un an de quitter la Sarre en emportant leurs biens, beaucoup de Juifs du Land prirent donc la fuite.
C'est ainsi qu'en 1935, une cinquantaine de Juifs sarrois s'installèrent très légalement à Nyons, dans la Drôme. Un sénateur des Basses-Pyrénées qui y avait une demeure et l'ancien sénateur de la Drôme et ancien ministre, le Nyonsais Émile Joseph Lisbonne, auraient contribué à cet accueil de nombreuses familles sarroises.
Entre 1938 et 1941, de nouveaux Juifs rejoignent ces premiers arrivants, à la suite des regroupements familiaux, d'assignations à résidence de certains internés dans les camps français, ou de démobilisation d'engagés dans l'armée française. Le groupe nyonsais – qui approchait alors la centaine, soit environ 2 % des Juifs sarrois émigrés, ce qui est considérable –, était composé de gens jeunes, dynamiques et disposant de ressources qui leur avaient permis d'acheter des fermes aux environs ou des fonds de commerce. D'autres créent des commerces ou des ateliers artisanaux. Accueillis de manière favorable, ils s'intègrent rapidement à la vie nyonsaise malgré l'obstacle de la langue. Les enfants sont scolarisés sans problème grâce à l'ouverture de deux classes supplémentaires au collège. La communauté protestante leur prête un local où ils installent leur synagogue.
D'autres colonies juives se repèrent aussi à Saint-Rambert-d’Albon, au nord de la Drôme. Plusieurs familles juives se replieront du Vaucluse, d’Avignon le plus souvent, sur Buis-les-Baronnies, dans le sud de la Drôme. Mais l'installation de divers camps d’internement et de travail dans le département y conduit de force plusieurs dizaines de Juifs : le camp de Montélimar en héberge, sa dissolution est suivie d'une assignation à résidence dans cette ville. D'autres Juifs étrangers, des hommes jeunes pour la plupart, se retrouvent dans le Groupe de travailleurs étrangers de Crest. Ils constitueront des proies faciles lors des rafles et de la déportation.



        Jews Settled, Taking Refuge or Incarcerated in Drôme

Hitlerian antisemitism drove many Jews in Drôme, believing it to be protected. Saarland, adjacent to Lorraine, entrusted to lead the League of Nations after World War I, is linked to the Third Reich by the plebiscite of 1935, and the sudden enforcement of anti-Semitic laws under Hitler. Taking advantage of the opportunity they had left for a year in order to leave Saarland, many Saarland Jews took flight. It is thus that in 1935, about fifty Saarland Jews settled, quite legally, in Nylons, Drôme. A senator from the Lower Pyrenees who had a residence there, former senator of Drôme, and former Nyonsais minister Emile Joseph Lisbonne, have contributed to this welcome to numerous Saar families.

Between 1938 and 1941, new Jews rejoined the first arrivals, following family reunions, residency of some interned in French camps, or demobilization of those in the French army. The Nyonsais group—which was now approaching a hundred, or about 2% of the Saarland Jewish immigrants, which is considerable—was composed of dynamic young people, with resources that allowed them to buy nearby farms or trade funds. Others create businesses or artisanal workshops. Received favorably, they are quickly becoming a part of Nyonsaise life, despite the language barrier. Their children safely attend school through the opening of two additional classes. The Protestant community gives them a place to install their synagogue. Other settlements are also located in Saint-Rambert-d'Albon, north of Drôme. Several Jewish families will withdraw from Vaucluse, mostly from Avignon, and from Buis-les-Baronnies in the south of Drôme. But the installation of various internment camps and working in the county leads dozens of Jews there by force: the dissolution of the housing camp in Montélimar is followed by a residency in that city. Other foreign Jews, mostly young men, find themselves in the Foreign Worker's Group in Crest. They will be easy prey during raids and deportation.


Traduction : Megan Berman

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, Valence, Peuple Libre/Notre Temps, 2006.
AN, F1a/3901, Drôme.

Législation antijuive haut ▲

 

La déportation de persécution depuis la France, contre les Juifs essentiellement, a concerné 76 000 personnes, dont 11 000 enfants : 3 % sont revenus.
La Drôme se trouve dans la zone non occupée (ZNO), jusqu’à son envahissement le 11 novembre 1942. À ce moment et jusqu’en septembre 1943, ce sont les Italiens alliés des Allemands qui l’occupent. Les Italiens, soucieux de rester maîtres dans le territoire sous leur domination, s’opposent à toutes les mesures antisémites touchant les Juifs étrangers, laissant seulement les autorités françaises libres d’agir à l’égard des Juifs français. Ils empêchent ainsi – mais pas toujours – les déportations, les carabinieri s’opposant même aux policiers. Cela dure moins d’un an : le 8 septembre 1943 intervient l’armistice entre les Alliés et l’Italie, les Allemands occupent la Drôme…
Pétain et le gouvernement de Vichy sont globalement d’accord sur l’objectif des nazis d’arrêter et de déporter tous les Juifs de France, avec une exception sur les Juifs anciens combattants et des réserves sur le prélèvement des Juifs de nationalité française. En ZNO, et jusqu’à l’occupation par les Allemands, toutes les mesures antisémites, certes inspirées et stimulées par les nazis, sont décidées par le gouvernement de Vichy et mises en application par son administration.
La « solution finale du problème juif », définie en janvier 1942 lors de la conférence de Wansee, constitue un arrêt de mort pour les Juifs, y compris ceux vivant en France : concentration, déportation, extermination sont les trois étapes d’un parcours obligé. Au début, les Allemands « ménagent » Vichy, l’amadouent habilement, évitent de heurter trop l’opinion en déportant d’abord les Juifs étrangers. Laval est tout à fait d’accord ; comme d’habitude, il essaie de « marchander » : pour obtenir des concessions en faveur des Français, il offre généreusement les Juifs étrangers, il prête sa police pour les arrêter, il propose de déporter les enfants. Ce qui lui permet d’affirmer la réalité de son pouvoir et réjouit les Allemands qui économisent leurs moyens.


             Anti-Semitic Legislation

The deportation and persecution of Jews in France has affected 76,000 people, including 11,000 children: of whom 3% have returned.

Drôme is an unoccupied zone (UZ) up until the overgrowth of November 11th, 1942. At this time, until September 1943, Italian allies of the Germans occupy it. The Italians, eager to keep control of the territory, oppose all anti-Semitic measures affecting foreign Jews, leaving on the free French authorities to act against French Jews. Thus they prevent—though not always—deportations, with the Carabinieri even opposing police. It takes less than a year: September 8th, 1943, the armistice comes between the Allies and Italy, and the Germans occupy Drôme.

Petain and the Vichy government are generally in agreement on the objective of the Nazis to arrest and deport all Jews in France, with the exception of Jewish war veterans and reservations about those of French nationality. In the UZ, and until the occupation by the Germans, all anti-Semitic measures, certainly inspired and stimulated by the Nazis, are decided by the Vichy government and implemented by its administration. The "final solution to the Jewish problem", defined in January 1942 after the Wansee conference, is a death sentence for all Jews, including those living in France: concentration, deportation and extermination are the three stages of the obligatory plan. At first, the Germans "spare" Vichy, cleverly coaxing it, careful to avoid hurting the public's opinion while deporting foreign Jews. Laval is in agreement; as per usual, he tries to "bargain»: in order to obtain concessions favoring the French, he generously offers up foreign Jews, he even lends his police to arrest them, and proposes deporting children. This allows him to affirm the reality of his power, and delight the Germans, who are economizing.


Traduction : Megan Berman

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, Valence, Peuple Libre/Notre Temps, 2006.

Rafles et arrestations de Juifs, la déportation haut ▲



Après les grandes rafles de l'été 1942, l'année 1943 a été relativement calme en matière de répression contre les Juifs. En 1944, dès janvier et jusqu'en juillet, les arrestations suivies de déportations augmentent.

L'arrivée en septembre 1943 des Allemands à la place des Italiens comme occupants de notre département aggrave les risques pour les Juifs. Dès l'automne 1943, et surtout à partir de janvier 1944, l'ampleur des arrestations s'accroit de manière importante ; en 1944, dès janvier et jusqu'en juillet, les arrestations suivies de déportations se multiplient. Cependant, les Allemands ne sont pas assez nombreux et n'ont pas une connaissance suffisante du terrain pour se livrer seuls à ces opérations, d'autant qu'ils craignent les résistants et ne s'aventurent guère dans les zones montagneuses de l'est du département. Mais les autorités françaises et leurs forces de maintien de l'ordre, essentiellement la Milice, vont leur prêter un concours zélé.

L'assignation à résidence des anciens internés du camp de Montélimar, comme l'étroite dépendance des travailleurs étrangers du GTE de Crest, font de ces deux lieux des réservoirs facilement disponibles.

Au total, pour l'ensemble de la période de la Seconde Guerre mondiale, nos recherches ont permis d'aboutir à ce jour aux statistiques suivantes :
Sur 267 Juifs déportés de la Drôme retrouvés (nés, résidant ou arrêtés dans ce département) :
- 217 sont morts ou disparus (dont au moins 190 à Auschwitz),
- 31 ont eu un sort non connu,
- 1 s'est évadé,
- 18 sont rescapés : 11 avaient été transférés, 7 ont survécu à Auschwitz.


Les camps d’extermination sont destinés à la mise à mort immédiate, à l’exception d’une centaine par convoi selon les besoins : ce sont Chelmno, Treblinka, Sobibor, Belzec, plus Lublin-Maïdanek et Auschwitz-Birkenau, auxquels s’ajoutent des kommandos d’extermination, comme le château d’Hartheim. Ce sont essentiellement ces deux derniers camps, Maïdanek et Auschwitz-Birkenau, qui accueillent les Juifs de la Drôme après leur passage à Drancy.

Tous les autres sont des camps de déportation qui pourraient être appelés les camps de la mort lente où on travaille jusqu’à épuisement.



          Roundups and arrests of Jews, and Deportation

After the big roundups of the summer of 1942, 1943 was a relatively quiet year in terms of Jewish repression. In 1944, from January until July, arrests and subsequent deportations increase.

The arrival of the Germans instead of the Italians in September 1943 as occupiers of our county increases the risk for Jews. From autumn 1943, and especially after January 1944, the scale of arrests grows significantly; in 1944, from January until July, arrests and subsequent deportations increase. However, the Germans are not numerous enough and do not have sufficient knowledge of the land to engage in these operations alone, as they fear the resistants and rarely venture into the mountainous areas in the East. But French authorities and their law enforcement, mostly militia, will lend them a competitive zeal.

The residence allocation of former Montélimar internees, as the close dependence of foreign workers on the Crest GTE, make these two reservoirs readily available.

In total, for the entire period of WWII, our research has resulted in the following statistics to date: From 267 Jews deported from Drôme found (born, residing, or detained in that county):
-217 are dead or missing (about 190 of which were sent to Auschwitz)
-31 met an unknown fate
-1 escaped
-18 are survivors: 11 were transferred, and 7 survived Auschwitz.

Extermination camps are designed for immediate death, with the exception of one hundred per convoy as per need: they are Chelmno, Treblinka, Sobibor, Belzec, as well as Lublin-Maidanek and Auschwitz-Birkenau, which are added to extermination kommandos, such as Hartheim castle. It is mainly the latter two camps, Majdanek and Auschwitz-Birkenau, who welcome the Drômois Jews after their transition to Drancy.

All other camps are deportation camps, which could be called prolonged-death camps, where internees are worked to death.


Traduction : Megan Berman

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Vincent Giraudier, Hervé Mauran, Jean Sauvageon, Robert Serre, Des indésirables, les camps d’internement et de travail dans l’Ardèche et la Drôme durant la Seconde Guerre mondiale, éd. Peuple Libre

Cache et sauvetage des Juifs haut ▲



Selon les résultats du recensement des Israélites fournis par les préfectures de la zone occupée à la date du 15 mars 1942, qui ne doit contenir que les plus de quinze ans, il y aurait dans la Drôme 967 Juifs, 745 de nationalité française et 222 étrangers. Les Juifs sont pourtant recherchés et poursuivis par la police française puis, évidemment, par la Milice et les Allemands. Tout un réseau clandestin d'hommes et de femmes va les aider.

La médaille des Justes parmi les Nations est la plus haute distinction décernée à titre civil au nom de l’État d’Israël à celles et à ceux qui ont risqué leur propre liberté ou même leur vie pour sauver des Juifs pendant l'occupation des nazis à travers toute l’Europe. Ces personnes reçoivent la médaille et un certificat honorifique (remis à un proche en cas de reconnaissance posthume) ; en outre, leurs noms sont inscrits sur le Mur d'honneur du Jardin des Justes du musée Yad Vashem à Jérusalem. L'attribution de la médaille des Justes n'est pas automatique. Elle n'est suivie d'effet que si une personne rescapée en fait la demande. Or certains rescapés ne se sont pas toujours manifestés après la guerre. Des personnes ayant accueilli des Juifs ont pu décéder dans les années qui ont suivi la guerre avant que des démarches puissent être entreprises. D'autres n'ont pas souhaité que les démarches soient entreprises.



                         Those who helped hidding and saving the Jews

According to the census of Israelites provided by the prefectures of the occupied zone as of March 15th, 1942, which should contain more than fifteen years of data, Drôme would have had 967 Jews, 745 of whom were French nationals, and 222 were foreigners. Jews are even sought-after and pursued by the French police, then, obviously, by the militia and the Germans. An entire underground network of men and women will help them.

The Medal of the Righteous among the Nations is the highest honor awarded to a civilian on the behalf of the State of Israel, and to those who risked their own freedom, and even their lives to save Jews during the Nazi occupation throughout Europe. A person who is recognized as "Righteous among the Nations" for having taken risks to help Jews during the Holocaust is awarded a medal in his name, a certificate of honor, and the privilege of having the name added to those on the Wall of Honor in the Garden of the Righteous at Yad Vashem in Jerusalem. The award of the Medal of the Righteous is not automatic. It is only acted upon if a rescued victim so requests. However, certain survivors have not shown up after the war. People who welcomed the Jews were dying out in the years following the war before measures could be taken. Others did not want any measures to be taken.


Traduction : Megan Berman

Auteur(s) : Robert Serre
Source(s) :

Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, Valence, Peuple Libre/Notre Temps, 2006. Israël Gutman, Lucien Lazare, Dictionnaire des Justes, Yad Vashem Jérusalem, librairie A. Fayard Paris, 2003. Féd&eacute