Les écrits clandestins

La presse et l'édition sont sévèrement contrôlées dans les zones occupées mais aussi en zone sud. Les difficultés matérielles liées à la pénurie de papier ainsi que le désintérêt croissant des lecteurs face à des informations censurées et instrumentalisées entraînent la disparition de plus des deux tiers des journaux entre 1940 et 1944. A côté de la presse officielle et des auteurs autorisés dont les écrits sont teintés d'antisémitisme et de propos collaborationnistes, des feuilles clandestines circulent grâce à des noyaux de résistance qui se structurent. Leur tirage atteint plus de deux millions d'exemplaires à la veille de la Libération, soit autant que la presse autorisée. Certains poètes et écrivains publient sous pseudonyme dans des maisons d'édition clandestines, dont la plus connue demeure les Editions de Minuit. Ils risquent leur vie au côté de nombreux anonymes afin de diffuser leurs écrits, dont certains connaissent un succès retentissant , tel le Silence de la Mer de Vercors (pseudonyme de Jean Bruller).

Graffitis,tracts,calicots haut ▲

Dès l’automne 1940, les murs des villes portent les premières traces du refus de l’Occupation : les affiches de propagande allemande sont régulièrement arrachées ou couvertes d’inscriptions, de slogans et de symboles manuscrits. Les avis d’exécution sont ainsi recouverts des termes « martyrs » ou « morts pour la France ». À partir de 1941, l’apparition des « V » et des croix de Lorraine (emblème de la France Libre) témoignent de l’influence des émissions francophones de la BBC. Tout au long de la période, parallèlement au développement de la presse clandestine, les tracts demeurent des vecteurs essentiels de la contre-propagande menée par les résistants pour s'opposer aux sources d’information officielles. Les militants communistes sont particulièrement actifs dans ce domaine. Les tracts parachutés permettent également aux Anglais et à la France Libre de lutter contre les attaques lancées par le régime de Vichy et l’Occupant contre les Alliés, notamment après le décès de civils au cours de bombardements. L’aggravation des peines encourues pour distribution de tracts clandestins ne freine pas le phénomène qui ne cesse de s’amplifier, jusqu’à la Libération.

Source(s) :

Les tracts clandestins

Philippe Delangle, Signes de la collaboration et de la Résistance, catalogue de l'exposition présentée par l'Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg du 8 février au 15 mars 2000, itinérante en France et à l'étranger à partir d'octobre 2002, Paris, Autrement, 2002.

Les tracts diffusés dans l’Empire

Jacques Cantier, Eric Jennings, L’Empire colonial sous Vichy, Paris, Odile Jacob, 2004.

Eric Jennings, « La dissidence aux Antilles (1940-1943) », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, 2000, vol. 68, n° 68, pp. 55-72 : www.persee.fr/web/revue/home/prescript/article/xxs_0294-1759_2000_num_68_1_3935

Les tracts aéroportés alliés

Yves Le Maner, « La propagande britannique par tracts aériens en France (1940-1944) », in Robert Frank et José Gotovitch , La Résistance et les Européens du Nord, Bruxelles, CEGES, 1994.

Emmanuel Thiébot, Chroniques de la vie des Français sous l’Occupation, Paris, Larousse, 2011.

La presse clandestine haut ▲

Dès l'automne 1940, les Renseignements généraux de Paris confirment l'existence d'une presse clandestine ( Pantagruel de Raymond Deiss, imprimé en octobre 1940, est sans doute un des premiers journaux clandestins imprimés ). Une étape décisive est franchie avec la création de mouvements de Résistance, car ils se structurent autour de la publication de journaux clandestins : Libération-Nord de Christian Pineau ( numéro 1 en décembre 1940 ), Libération-Sud d'Emmanuel d'Astier de la Vigerie ( numéro 1 en juillet 1941 ), Les Cahiers du témoignage chrétien du père Chaillet ( première parution à Lyon en novembre 1941 ). Les risques encourus sont importants. Il faut trouver des financements, du papier, ainsi que des rotatives pour imprimer (facilement repérables car fort bruyantes à l'époque). Vient ensuite la diffusion de cette presse clandestine. La répression est très sévère et le Code des otages du 30 septembre 1941 rappelle que les otages doivent être choisis en premier lieu parmi les « personnes qui ont collaboré à la distribution de tracts ». Malgré cette répression, la presse clandestine est de plus en plus appréciée des Français, par rapport à la presse collaboratrice déconsidérée.

Pour en savoir plus sur la presse de la France Libre: http://www.france-libre.net/cnrd/2013/presse-france-libre.php

Pour en savoir plus sur le journal Défense de la France, visitez l'exposition virtuelle qui lui est consacrée. 

Pour en savoir plus sur le journal Libération-Nord : exposition virtuelle "Libération-Nord 1940-1944"

Source(s) :

Fabriquer et diffuser les journaux clandestins

AERI, La Documentation française, Imprimeurs et éditeurs dans la Résistance, Paris, La Documentation française, 2010

Claude Bellanger, La Presse clandestine.1940-1944, Paris, Armand Colin, coll « Kiosque », 1961.

Claude Bellanger, Jacques Godechot, Pierre Guiral et Fernand Terrou (dir), Histoire générale de la presse française, t.IV, de 1940 à 1958, Paris, PUF, 1975.

La Presse clandestine 1940-1944, colloque d’Avignon les 20 et 21 juin 1985, sous le patronage de l’IHTP CNRS, Conseil général du Vaucluse, , 1986.

Chauvet Paul, La Résistance chez les fils de Gutenberg dans la Deuxième Guerre mondiale, Paris, 1979.

Le rôle de la presse clandestine

Douzou Laurent, « Usages de la presse clandestine dans la Résistance française », Bruno Curatolo et François Marcot (dir), Ecrire sous l’occupation ? Du non-consentement à La Résistance, France-Belgique-Pologne, 1940-1945, Besançon, 14 octobre 2009.

Exemple d’un journal clandestin : Défense de la France

Marie Granet, Défense de la France. Histoire d’un mouvement de résistance (1940-1944),Paris, PUF, 1960

Marie Granet (intro et notes), Le journal Défense de la France, Paris, PUF, 1961 

Olivier Wieviorka, Une certaine idée de la Résistance. Défense de la France 1941-1949, Paris, Le Seuil, 1995