Mémoire de la Résistance

Dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, de nombreux mémoriaux honorent la Résistance, ses héros et ses martyrs. Ils constituent des espaces privilégiés de commémoration. D’autres sites ont une importance mémorielle du fait des événements qui s’y sont déroulés, sans qu’ils soient pour autant commémorés. Quelques-uns de ces mémoriaux ou lieux de mémoire concernent plusieurs départements et ont une dimension régionale. C’est le cas du vallon des fusillés à Signes ou du fort Saint-Nicolas à Marseille : des résistants de toute la région y furent massacrés, dans le premier cas,  jugés et emprisonnés dans le second. Certains mémoriaux rayonnent même bien au-delà de la Provence, comme celui de Salon-de-Provence, dédié à Jean Moulin. D’autres, depuis le quartier et le village jusqu’au département, gardent la trace de femmes, d’hommes et d’événements de moindre notoriété mais essentiels pour la Résistance. Il importe, tout en recensant les sites les plus connus, de préserver également cette mémoire, plus exposée aux atteintes du temps.

Auteur(s): Robert Mencherini

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Le fort Saint-Nicolas, prison de la Résistance régionale haut ▲

Le fort Saint-Nicolas est l’un des deux forts, érigés au XVIIe siècle, par décision de Louis XIV, de part et d’autre de l‘entrée du port (aujourd’hui Vieux-Port) de Marseille. Il fait face, depuis la rive sud, au fort Saint-Jean qui occupe la pointe opposée. La « citadelle de Marseille » est conçue comme un instrument de protection mais aussi de contrôle de la ville. Forte, au XVIIIe siècle, d’une garnison de plusieurs centaines d’hommes, elle est aussi utilisée comme lieu de détention. Au XIXe siècle, l’ouverture d’une voie de 25 mètres de large qui relie Rive-neuve au palais impérial du Pharo (boulevard de l’Empereur devenu boulevard Charles Livon) divise le fort primitif en deux parties, le haut-fort ou fort d’Entrecasteaux et le bas-fort ou fort Ganteaume.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses personnalités ont été incarcérées dans les cellules du haut-fort Saint-Nicolas. Citons, parmi les plus connues, Jean Giono, détenu du 16 septembre au 11 novembre 1939, accusé de diffusion d’écrits pacifistes, Jean Zay, ministre de l’Éducation nationale dans les années 1930, condamné à la déportation par le tribunal militaire de Clermont-Ferrand, incarcéré au fort Saint-Nicolas du 7 décembre 1940 au 8 janvier 1941 ou, à la fin mars 1941, le député Jean Cristofol, futur maire de Marseille, en transit pour l’Algérie. D’autres sont jugées au fort Saint-Nicolas par le tribunal militaire de la XVrégion ou font l’objet d’enquêtes de celui-ci, par exemple, la philosophe Simone Weil.

De fait, le fort Saint-Nicolas remplit alors une triple fonction. Il accueille, dans le bas-fort, le bureau de garnison et le tribunal militaire de la XVrégion, et le haut-fort sert de lieu de détention.

De plus, en août 1941, le gouvernement de Vichy, a créé, en zone non-occupée, auprès des tribunaux militaires, des sections spéciales. Elles sont chargées de juger les « menées antinationales » et, plus particulièrement, les activités « communistes et anarchistes », qualification qui, dans la période, est  très largement interprétée et englobe, de fait, tous les courants de la Résistance. La mise en place de cette nouvelle juridiction explique que de très nombreux résistants soient jugés (ou rejugés) au fort Saint-Nicolas. Ils sont nombreux également à connaître les cellules du haut-fort, d’autant qu’elles sont aussi utilisées pour les condamnés d’autres régions envoyés Outre-mer : le départ se fait par le port phocéen.

L’invasion de Marseille par les Allemands en novembre 1942 est suivie par la dissolution de l’armée d’armistice. La section spéciale est transférée auprès de la cour d’appel d’Aix-en-Provence et le fort Saint-Nicolas est occupé par les troupes allemandes. En août 1944, après le débarquement de Provence, lors de l’insurrection, il constitue l’un des lieux de repli des troupes d’occupation. Elles entendent, conformément à l’ordre d’Hitler, le défendre jusqu’à la dernière cartouche. Mais la garnison allemande doit plier sous les bombardements et le déluge de feu que les armées de Libération font pleuvoir depuis Notre-Dame de la Garde : elle capitule dans la soirée du 27 août 1944. 

On peut voir, aujourd’hui encore, les cellules où ont été incarcérés les résistants et dont les murs portent de nombreux graffiti. Les soldats allemands ont aussi laissé trace de leur passage avec des gravures dans la pierre des parapets. Beaucoup de détenus du fort Saint-Nicolas, comme Jean Zay, ont donné des témoignages précis et émouvants sur leur incarcération au fort Saint-Nicolas, beaucoup ont aussi témoigné de leur procès devant le tribunal militaire.

Auteur(s) : Robert Mencherini
Source(s) :

Bibliographie :

Joseph Billioud, « La citadelle de Marseille (fort Saint-Nicolas) I. Origine et construction», Marseille, n°30, octobre-décembre 1956, pp. 3-12.

Joseph Billioud, « La citadelle de Marseille (fort Saint-Nicolas) II. La garnison et ses privilèges », Marseille, n° 31, janvier-mars 1957, pp. 3-16.

Robert Mencherini, Midi rouge, Ombres et lumières. Histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône, 1930-1950, tome 1, Les années de crise, 1930-1940, tome 2, Vichy en Provence, 1940-1942, tome 3, Résistance et Occupation, 1940-1944, tome 4, La Libération et les années tricolores, 1944-1947, Paris, Syllepse, 2004-2014.

Le vallon des fusillés à Signes : la Résistance régionale massacrée haut ▲

Dans un vallon isolé et difficile d'accès, situé sur la commune de Signes, dans le département du Var, se trouve une nécropole nationale où sont conservés les restes mortels de résistants assassinés à la veille de la libération de la région.
Durant l'été 1944, en deux temps, le 18 juillet et le 12 août, les Allemands ont exécuté, dans ces lieux reculés, 38 hommes, pour la plupart des responsables de la Résistance en R 2 (actuelle région Provence-Alpes-Côte-d'Azur).
La diversité des victimes, représentant tous les âges, tous les milieux sociaux, et appartenant à différentes organisations de la Résistance, ainsi que les conditions et le contexte de leur exécution, font de ce vallon isolé un lieu de mémoire important et symbolique de la Résistance dans notre région.
Depuis la découverte du charnier, en septembre 1944, une cérémonie en hommage aux victimes a lieu chaque année, le 18 juillet, sur ce site surnommé le "vallon des martyrs". 
En 1996, le site est reconnu comme nécropole nationale.

Auteur(s) : Equipe MUREL PACA

Les mémoriaux et lieux de mémoire des Bouches-du-Rhône haut ▲

Dans les Bouches-du-Rhône comme ailleurs, les mémoriaux qui honorent la Résistance revêtent des configurations très diverses : édifices plus ou moins imposants, stèles, plaques de rues… Cette mémoire de pierre et de métal évolue au fil du temps, du point de vue de la forme et en fonction des événements commémorés. Ces mémoriaux peuvent honorer la Résistance de manière collective ou individuelle, perpétuer le souvenir d’un résistant ou de faits dramatiques ou glorieux. Les plus importants sont le lieu de cérémonies annuelles qui se perpétuent parfois jusqu’à nos jours. Certains sont regroupés autour de sites qui ont connu des événements particulièrement tragiques. C’est le cas, par exemple, des mémoriaux de la Chaîne des Côtes (autour du mémorial de Sainte-Anne). D'autres sont dédiés à des résistants ou groupes de résistants comme ceux du pays d'Arles (plaques des cheminots à la gare d'Arles, des exécutés de La Galine à Saint-Rémy-de-Provence, plaques de rues et sur divers édifices).

Auteur(s) : Robert Mencherini